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Coignet, Jules [Hrsg.]; Achard, Amédée [Hrsg.]
Bade et ses environs — Paris, 1858

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https://doi.org/10.11588/diglit.11216#0083
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FORBACH.

avec d'éternels retentissements. Les ravins semblent obstrués par une végétation puissante qui
verse partout une ombre épaisse. A quelques pas en aval du pont, le Schwarzenbach fait une chute
de trente pieds. Cette chute furieuse ajoute encore au fracas des mille cascatelles qui se précipitent
de tous côtés.

Il n'y a qu'un siècle à peu près que cette vallée a été parcourue et exploitée. Les chemins qu'on y a
pratiqués pour utiliser les richesses forestières qu'elle renferme en si grande quantité datent de 1758
seulement. Ils permettent de visiter ces gorges mystérieuses, ces montagnes profondes, sans en altérer
la beauté.

Dès le matin du jour fixé pour l'ouverture de l'écluse, les gardes de la forêt préparent quelques
bancs dont des rameaux de sapins recouverts de fougères font tous les frais ; ces sièges rustiques,
dressés en face du pont, auprès de grands feux clairs, attendent les touristes. Les deux rivières, le
Schwarzenbach et le Raumunzach, se croisent sous les regards des spectateurs, séparés de leurs eaux
par quelques pieds de mousse et de rochers.

Bientôt voyageurs, étudiants, forestiers, s'étendent sur l'herbe autour des bancs qu'une galanterie
cosmopolite cède alors aux jeunes voyageuses attirées là par l'étrangeté du spectacle.

Tous les regards sont tournés vers le pont de pierre dont l'arche unique doit laisser passer le torrent
grossi subitement par les eauxduSchwellung. On attend avec une impatience dont chaque minute ac-
croît la vivacité. Tout à coup une rumeur sourde se fait entendre au loin, c'est comme le roulement
d'un chariot sur la pierre, d'abord vague, lointain, confus ; tout le monde se dresse : c'est le Schwellung
qui arrive. Le bruit devient plus fort, croissant de minute en minute ; c'est bientôt comme le gron-
dement du tonnerre ou le retentissement de dix chars passant au galop sur une chaussée : tous les
échos de la montagne répercutent le bruit.

Enfin, sous l'encadrement formé par l'arche du pont, au fond du ravin, on voit paraître un mur de
bois qui roule avec une rapidité terrible et des bruits effrayants. On ne distingue rien que des entasse-
ments de bûches mêlées de troncs d'arbres. La masse bruyante, poussée par le flot encore invisible,
arrive debout comme un rempart, et roule sur un lit de roches au travers desquelles elle se heurte avec
de formidables retentissements. La muraille mouvante s'approche du pont et le choque avec la force d'un
bélier. Un instant l'écume jaillit par-dessus les parapets ; l'arche, trop étroite, ne peut donner passage à
cette avalanche emportée avec la rapidité de la flèche : on dirait que le pont va crouler. Une poussière
d'eau l'enveloppe, un nuage d'écume en efface les contours -, le flot en effleure le tablier. Des arbres
se dressent debout avec des mouvements convulsifs et retombent de toute leur hauteur : on dirait des
géants montant à l'assaut d'une tour. Partout les troncs de sapins se hérissent, chassés par l'impulsion
de l'eau ; puis la muraille flottante se brise avec d'horribles déchirements, l'arche est franchie, et toute
la masse se précipite dans le ravin, chassée par un tourbillon furieux.

Les spectateurs ont le vertige. La rivière est blanche d'écume; l'eau couvre tous les rochers mons-
trueux dont tout à l'heure le lit de la rivière était obstrué ; les cascades sont nivelées, et sur la surface
bouillonnante du torrent, les morceaux de bois et les troncs d'arbres disparaissent par milliers avec un
bruit semblable à vingt pièces d'artillerie tonnant à la fois.

Tandis que le Schwarzenbach reçoit le tribut des eaux supérieures, le Raumunzach , également grossi
par l'ouverture d'un autre barrage qui en double la vitesse et le volume, accourt avec fracas et marie
Ses flots chargés de madriers et de bûches aux flots qui viennent de franchir l'arche du pont.

C'est une rencontre furieuse, un heurt effrayant qui mêle et confond les deux rivières trop à l'étroit
dans leur lit. Une vapeur d'eau monte jusqu'aux cimes des vieux sapins.

Ce spectacle, dont aucune description ne peut donner l'idée, dure à peine une demi-heure. 11 se
renouvelle, il est vrai, plusieurs fois dans le courant du mois d'avril. Des barrages situés au sommet
de la vallée, tout auprès des frontières du Wurtemberg, maintiennent les eaux dans d'immenses
bassins. Quand les forestiers de Gernsbach, auxquels appartiennent ces montagnes chargées de sapins,
jugent le moment opportun, ils font ouvrir les écluses, et la masse des eaux, tombant tout à coup dans
 
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