Musée et l'Ecole Moderne des Beaux-Arts <Paris> [Hrsg.]: Annales du Musée et de l'Ecole Moderne des Beaux-Arts / Salon (Tome second.1808) [Cicognara, 3401-22-2]

C 10 )
« Cependant Télémaque voyant cet ensant qui se
« jouait avec les nymphes, fut surpris de sa douceur
« et de sa beauté. Il l’embrasse, le prend tantôt sur
« ses genoux, tantôt entre ses bras. Il sent en lui-
« même une inquiétude dont il ne peut trouver la
« cause. Plus il cherche à se jouer innocemment, plus
v il se trouble et s’amollit. Voyez-vous ces nymphes,
« disait-il à Mentor , combien sont-elles difsérentes
« de ces femmes de l’ile de Cypre , dont la beauté
« était choquante à cause de leur immodestie ? Ces
« beautés immortelles montrent une innocence, une
h modestie, une simplicité qui charme. Parlant ainsi,
« il rougissait sans savoir pourquoi. Il ne pouvait s’em-
« pêcher de parler ; mais à peine avait-il commencé,
« qu’il ne pouvait continuer; ses paroles étaient en-
« trecoupées, obscures , et quelquefois elles n’avaient
« aucun sens. » ( Télémaque, liv. VU- )
Le peintre a choisi pour sujet de son tableau le
moment où l’Amour ayant inspiré à Télémaque une
vive passion pour Eucharis , excite la jalousie de
Calypso.
Cette production, d'un style gracieux et tempéré, a
été remarquée des connaisseurs pour la simplicité et
l’élégance de la composition ; pour la douceur des
caractères , la grâce du dessin et le bon goût des ajus-
temens. Mais ces qualités , qui servent à caractériser
la peinture historique, ne frappent pas toujours la
multitude. Elles ne sont donc pas suffissantes pour
obtenir le suffrage général. En effet, un tableau saible
de coloris et d’un effet peu saillant, ne satisfera point
cette portion du public qui ne cherche dans les ou-
vrages de l’art que l’imitation matérielle. En ne
considérant le tableau dont il s’agit cpie sous ce
dernier rapport , on doit présumer qu’il n’a point