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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 1)

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NOTRE BIBLIOTHEQUE.

manière dont un paysagiste peut interpréter la nature, dit I
M. Ménard, ont leurs sources en Angleterre. Au lieu de voir b !
nature seulement par les rapports de l'ombre et de la lumière,
comme avaient fait les peintres du xvne siècle, les Anglais ont
abordé directement la teinte réelle de chaque objet : celle des
mousses qui croissent sur les rochers, des lichens qui couvrent les
troncs d'arbre, des roseaux et des plantes d'eau qui verdissent
les marais. Ils ont résolument abordé le bleu du ciel en plein midi
et les feux du soleil couchant, les verts intenses du feuillage au I
printemps et les tons calcinés qu'il prend en automne. C'était une
innovation de voir des feuillages avec leur couleur véritable se ;
détachant sur le ciel. Il est à remarquer que, à l'exception de
Huysmans de Malines, aucun paysagiste flamand OU hollandais
n'a cherché à rendre la coloration bleu intense d'un ciel d'été. Les
peintres anglais se séparent complètement par leur mode d'exécu-
tion de la plupart des paysagistes de l'école hollandaise. Ceux-ci, j
et principalement Van Goyen, qui fut un des initiateurs, ont
presque toujours traduit la verdure des prairies et des feuillages
par un ton bistré assez uniforme, et leurs tableaux sont loin de !
présenter la variété de teintes que l'école anglaise a remise en
vigueur. On croirait à tort que c'est là l'eflet d'une réaction chi-
mique et que les anciens paysagistes ont dû employer des co-
lorations ardentes aujourd'hui disparues, car la même réaction se .1
serait aussi produite dans les tableaux de genre, tandis que nous
y voyons des verts intenses, des bleus puissants, des tons rouges, 1
jaunes ou violets, qui ont gardé toute leur fraîcheur primitive.

< En revanche, les méthodes pour étudier la nature diffèrent
aujourd'hui beaucoup de ce qu'elles étaient dans les Pays-Bas.
Les peintres hollandais peignaient d'après nature le modèle vivant,
homme ou animal; ils peignaient également d'après nature des
fleurs, des fruits, du gibier. La plupart du temps les paysages de
leurs tableaux sont peints d'après des dessins ou à l'aide de cro-
quis dessinés, mais non point d'après nature. Nous avons des
tableaux hollandais qui représentent un artiste peignant une vache
dans la campagne ; mais en fait de paysage proprement dit, les
amateurs cherchent en vain des études de terrains, d'arbres, de
ciels, qui portent le cachet d'un travail fait au grand air; ils ne
trouvent que des tableaux exécutés dans l'atelier. Il n'en est pas
de même aujourd'hui, et quand un paysagiste s'avise de faire une
vente, on est surpris d'y voir une quantité de toiles qui res-
semblent à des études beaucoup plus qu'à des tableaux. Nos
artistes suivent en cela les méthodes anglaises, qui ont donné au
paysage contemporain un caractère tout particulier.

f Quand je regarde le Chemin près de Bath, il m'est impos-
sible de ne pas voir dans cette peinture de Gainsborough une
impression directe de la nature. Un Hollandais eût arrangé cela
autrement. Son tableau eût charmé par la disposition pittoresque
des lignes, par les figures qu'il n'eût pas manqué d'y mettre, par
l'effet vif et piquant de l'ensemble. Mais on n'y aurait pas trouvé
cette senteur de bois, cette simplicité dans le site, ce cachet de ,
réalité, en un mot, qui est le propre d'une observation directe et
naïve de la nature...

« La manière dont Constable comprend la composition d'un
tableau est l'antipode des méthodes classiques et même des dispo-
sitions habituelles à l'école hollandaise. Dans les tableaux de
Ruysdael, de Wynants ou de Berchem, aussi bien que dans les
paysages historiques du Poussin, on trouve presque toujours au
premier plan un buisson, une plante, un tronc d'arbre ou un frag-
ment d'architecture dont le détail est très-étudié et forme un acci-
dent destiné à être comme la clef de voûte de l'exécution, en ce sens
que la touche est de moins en moins accentuée à mesure qu'on se
rapproche de l'horizon. C'est un procédé employé par tous les
artistes du xvne siècle, pour exprimer la fuite et la profondeur
de la scène, en accompagnant la dégradation des tons par une
dégradation équivalente dans la manière de peindre. Constable,
au contraire, usant d'un procédé qui fut repris depuis par plusieurs
peintres français, et notamment par Théodore Rousseau, s'efforce
généralement d'attirer l'attention vers le second plan et de con-

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duire l'œil jusqu'au lointain. Le premier plan est dans cette
intention peint d'une manière assez vague, et tout l'effet de l'en-
semble se détermine à une certaine distance du cadre. »

A l'appui de ces remarques judicieuses, M. Ménard nous
donne une série d'eaux-fortes, qui sont comme la démonstration
visible de ses observations. Nous avons Comvay-Castle, de
Richard Wilson, un paysage romantique à la manière de Walter-
Scott, un vieux manoir bâti au bord de la mer, et derrière
lequel brille la lune qui paraît à travers des nuages, dans un ciel
tourmenté; John Barney Crome, plus réaliste, garde cependant
quelque chose du parti pris de Wilson. Ce sont encore des ruines
qui se détachent en pleine ombre sur un ciel vivement éclairé par
la lune, formant ainsi un contraste plein de vigueur. Avec le Che-
min près de Bath. de Gainsborough, et le Cottage, de John
Constable, nous nous retrouvons en face d'une nature moins
arrangée, plus ordinaire, mais non moins attrayante. Sans doute
il a bien fallu renoncer à reproduire par l'eau-forte toutes ces
innovations de teintes et de couleur vraie que le texte nous a
détaillées, mais le caractère de sincérité, de vérité qui éclate dans
tout l'ensemble suffit pour nous faire comprendre que ces artistes
ont dû porter dans la reproduction des tons la même fidélité que
dans celle des lignes.

Nous ne saurions trop applaudir à ce système, qui fait de la
gravure le commentaire perpétuel et visible du texte, et nous
pensons qu'on nous saura gré d'avoir insisté pour le mettre dans
son jour, bien que les développements auxquels cette exposition
nous a entraîné nous oblige à laisser de côté tout le reste.

Les lecteurs de Y Art ont pu juger du mérite des gravures
qui accompagnent le texte par l'eau-forte inédite de YHeureuse
Mère, de Boucher, par Boilvin, que nous avons donné comme
spécimen.

L'Histoire des Beaux-Arts du même auteur est conçue dans
le même esprit. Cet exposé rapide et précis du développement
de la faculté artistique dans toutes les grandes civilisations est
accompagné d'une multitude de bois qui mettent sous les yeux du
lecteur tous les genres, tous les styles, tous les chefs-d'œuvre.
Grâce à l'appui mutuel que se prêtent le texte et les représenta-
tions graphiques, grâce aussi au soin qu'a pris partout l'auteur
d'éviter les mots techniques ou de les expliquer clairement quand
il ne peut leur échapper, ce livre peut être lu et compris par les
personnes les plus étrangères à l'art.

Ce résumé manquait à l'enseignement. Par suite de cette
lacune, il était impossible de donner aux enfants aucune idée
précise de la série des développements artistiques qui marquent
les étapes de l'humanité, et les jeunes gens pouvaient sortir des
écoles sans avoir aucune notion de l'histoire des arts. Aujourd'hui
ce danger n'est plus à craindre. Rien qu'en regardant les images,
on peut se faire une idée à peu près exacte de cette histoire con-
sidérée dans ses grandes lignes. Le rapprochement intelligent du
quelques bois suffit à faire ressortir les rapports et les différences
des diverses civilisations et des périodes successives.

Ce volume esc divisé en deux parties : l'Art antique, compre-
nant l'Egypte, Jérusalem, la Phénicie, l'Assyrie, la Perse, l'Inde,
la Grèce et l'Italie anciennes; et l'Art Moderne, qui s'étend depuis
les Origines de l'art chrétien jusqu'à l'Art en France depuis la
Révolution. L'auteur n'a négligé aucune partie du monde. Rien de
ce qui touche à l'art ne le laisse indifférent. Il a un chapitre
pour l'art russe, un pour l'art musulman, un pour l'art de
l'extrême Orient, et chacun d'eux, dans sa brièveté, suffit pour
donner une idée générale du caractère artistique de la civilisation
à laquelle il se rapporte.

M. Ménard,en s'imposant ce travail, a fait une œuvre des plus
utiles. Le ministre de l'instruction publique vient d'en autoriser
l'introduction dans les écoles publiques. Nous ne pouvons que
féliciter de cette heureuse idée le ministre et les écoles.

A. JULLIEN'.
 
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