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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 1)

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Ménard, René: Le Bernin en France
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https://doi.org/10.11588/diglit.16670#0287

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LE BERNIN EN FRANCE

Lorsque Colbert prit la charge de surintendant des bâtiments, il eut à cœur de mener à bonne fin
l'achèvement du Louvre, dont les travaux avaient déjà été commencés sous la direction de l'archi-
tecte Le Vau. Colbert aimait peu le plan de cet artiste qu'il ne trouvait pas assez grandiose pour la
majesté du roi. Mais comme il était difficile de changer sans motif l'architecte d'une aussi vaste con-
struction , il fit exécuter en relief le projet de Le Vau, et appela les architectes à venir l'examiner pour
en donner leur avis. Ceux-ci naturellement déchirèrent à l'envi le projet de leur confrère, et, fort de
l'opinion publique, Colbert fit suspendre les travaux. 11 ordonna en même temps un concours, décidant
que celui qui aurait obtenu l'assentiment du roi serait chargé d'élever l'édifice.

Les concurrents se présentèrent en nombre, mais un seul projet plut à Colbert et au roi; il ne
portait pas de nom d'auteur. On l'attribua d'abord à un artiste étranger qui n'aurait pas voulu se nommer.
Quand on apprit que l'auteur n'était pas un architecte, mais simplement un médecin, Claude Perrault, les
quolibets commencèrent a pleuvoir sur les architectes battus au concours, et on disait partout que l'ar-
chitecture en France devait être bien malade puisqu'elle avait recours au médecin. Les hommes spé-
ciaux, froissés dans leur amour-propre en même temps que blessés dans leurs intérêts, s'écrièrent que
le monument était inexécutable. Colbert, arrêté par des considérations techniques, et redoutant un
effondrement, se vit obligé de renoncer au seul projet qui le satisfit; mais les architectes n'y gagnèrent
rien, car il résolut aussitôt de confier le travail à un étranger.

Le Bernin avait alors une réputation colossale que la postérité, il est vrai, n'a pas ratifiée, mais
qui était universellement admise : en Italie on le plaçait sans hésiter à cûté de Michel-Ange, et en
matière de goût, l'Italie à cette époque était l'arbitre de l'Europe. Colbert, qui voulait mettre au ser-
vice du roi les hommes les plus éminents de tous les pays, songea donc au Bernin ; mais il ne se con-
tenta pas de lui demander des plans pour le Louvre, il voulut faire venir l'artiste lui-même. Ce projet
pourtant présentait de sérieuses difficultés. Le Bernin avait soixante-huit ans et on pouvait supposer
qu'il hésiterait devant un voyage aussi fatigant. D'un autre côté, on savait que le pape tiendrait beau-
coup à ne pas laisser partir un artiste qui depuis un demi-siècle n'avait cessé de travailler aux embel-
lissements de la Ville éternelle, et que le peuple romain regardait comme la plus grande gloire de
l'Italie. Mais l'idée de Colbert avait reçu l'agrément du roi, et Louis XIV n'était pas homme à aban-
donner un projet qui flattait sa vanité.

Les premières négociations traînèrent en longueur ; et comme le roi commençait à s'impatienter,
on eut recours aux grands moyens. Louis XIV écrivit au Bernin la lettre suivante :

« Seigneur cavalier Bernin, je fais une estime si particulière de votre mérite, que j'ai un grand
désir de voir et de connaître une personne aussi illustre, pourvu que ce que je souhaite se puisse
accorder avec le service que vous devez à notre Saint-Père le Pape et avec votre commodité
particulière.' Je vous envoie en conséquence ce courrier exprès, par lequel je vous prie de me
donner cette satisfaction, et de vouloir entreprendre le voyage de France, prenant l'occasion favorable
qui se présente du retour de mon cousin le duc de Créqui, ambassadeur extraordinaire, qui vous fera
savoir plus particulièrement le sujet qui me fait désirer de vous voir et de vous entretenir des beaux
dessins que vous m'avez envoyés pour le bâtiment du Louvre; et, du reste, me rapportant à ce que
mon dit cousin vous fera entendre de mes bonnes intentions, je prie Dieu qu'il vous ait en sa sainte
garde, seigneur cavalier Bernin. (Signe) LOUIS. (Contresigné) De Lionne. —A Paris, le n avril 1665. »

Le Bernin recevait en même temps le portrait de Louis XIV avec un encadrement enrichi de
diamants, représentant une valeur de trois mille écus, et il apprenait que des artistes, envoyés de
France par leur gouvernement, avaient reçu pour mission d'exécuter des copies d'après ses principaux
ouvrages. Décidément le roi se faisait le courtisan du Bernin, et il était impossible à l'artiste de ne
pas obtempérer à ses désirs. Mais il fallait encore obtenir l'assentiment du pape, et on savait combien
Alexandre VII tenait à ne pas se séparer d'un homme qu'il regardait comme la plus grande illustration
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