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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 1)

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Lafenestre, Georges: Jean-Louis Hamon
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https://doi.org/10.11588/diglit.16670#0424

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JEAN-LOUIS HAMON.

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des sources vertes par l'Ondine babillarde aux longs cheveux d'or. Fils d'un de ces pauvres douaniers
dont les huttes basses en terre battue sont tapies à distance régulière le long de la côte, dans
les échancrures des dunes, il passa de longues années à contempler en silence ces brumes de la
mer et ces brumes de la lande; il les peupla sans nul doute, comme tous les enfants bretons, avec
sa foi vive aux miracles et aux légendes, d'apparitions sans nombre, souriantes, rapides, changeantes.
A quatorze ans, il suivait les cours du séminaire et se crut, pendant un temps, destiné à l'état
ecclésiastique. Quand sa vocation d'artiste l'emporta enfin, quand il vint à Paris, en 1840, avec une
très-maigre pension de son département et entra chez Delaroche, le jeune homme, par bonheur pour
lui, n'était plus à temps pour altérer le fond de sa nature. Ses habitudes de rêverie naïve changèrent
seulement d'objet; la galerie d'antiques au Louvre lui fut une révélation soudaine qui donna une
forme grecque à ses songes celtiques; le paysan candide s'éveilla un matin changé en un Athénien
raffiné; la délicatesse naturelle de son âme lui avait d'un seul coup révélé- la délicatesse de l'âme
antique; mais en entrant dans ce monde nouveau, sur les traces de Prud'hon et de Chénier, il
ne songea pas un seul instant à y dépouiller son origine plébéienne, et il y conserva toujours,
sans rougir, une certaine gaucherie provinciale et une certaine bonhomie enfantine qui lui firent
prendre très-vite son rang à part dans ce groupe un peu froid des néo-grecs qui florissait, on s'en
souvient, de 1850 à 1860.

A la différence, en effet, de plusieurs de ses camarades qui, enthousiasmés par la Stratonice d'In-
gres, le Combat de coqs et l'Intérieur grec de (Jérôme, refroidissaient de jour en jour leur talent
dans les études d'érudition archéologique et l'imitation exacte et matérielle des œuvres antiques.
Jean-Louis Hamon, plus nonchalant et plus naïf, se laissant bonnement aller à sa pente naturelle,
n'ayant souci ni des anachronismes ni des incohérences, se contentait, en vrai poëte qu'il était,
d'être ému et inspiré par les figurines grecques ou romaines, sans devenir leur copiste ni se faire leur
esclave. Plein de cette rêverie charmante, il retrouvait Pompéi dans Paris, l'Hélicon dans Montmartre,
les nymphes du Permesse dans toutes les troupes de grisettes, en costume de travail, qui le frôlaient
au passage. En ceci, Hamon ressemblait à tous les artistes sincères, à tous les vrais poètes : le
point de départ des plus grandes conceptions est toujours une impression réelle, quelquefois très-
commune. Mais chez la plupart des grands créateurs ce point de départ disparait dans la
splendeur du développement postérieur: on ne voit plus que le grand essor de l'imagination envolée,
sans plus heurter ses regards à l'humble motte de terre où elle a di\ poser d'abord le pied pour
prendre son élan. Chez Hamon au contraire il y a peu d'effort pour dissimuler la simplicité primi-
tive de la sensation ou la vulgarité, parfois.puérile, de l'impression reçue par un esprit très-sensible
devant les actes les plus ordinaires de la vie quotidienne. Le néo-grec a beau envelopper du voile
délicat et flottant de ses réminiscences antiques les figures de fillettes et d'enfants qu'il a prises à
ses côtés, ces figures sentent toujours, parfois avec une grâce exquise, leur origine toute moderne.
L'artiste le sait; aussi, le plus souvent n'essaye-t-il pas de leur donner des étiquettes trompeuses, et
se moque-t-il avec un rare sans-façon du pédantisme archéologique; telle scène en toge et en
peplum s'intitulera Boutique à quatre sous, telle autre Blanchisseuse d'Amours, etc., etc..

Cette disposition naturelle à se livrer, au gré du vent et des saisons, aux caprices les plus inat-
tendus d'une fantaisie aimable et subtile, fut certainement développée parle long séjour que fit Hamon
à la manufacture de Sèvres. C'était Gleyre, son second maître, qui l'avait fait attacher à cet établisse-
ment, pressentant avec justesse tout le parti qu'on pourrait tirer d'une imagination si souple et déli-
cate en P'appliquantà la décoration d'objets fragiles. Hamon, plus libre en effet devant la panse arrondie
des vases aux formes fuyantes comme les formes de son rêve, que devant la toile encadrée aux angles
précis qui exige une composition nette et logique, peignit pour la manufacture un certain nombre de
scènes ingénieuses où la grâce des mouvements et des expressions servait déjà de passe-port et
d'excuse aux complications mystérieuses de sa pensée. De cette époque date un grand nombre
d'esquisses et de dessins qui se trouvent aujourd'hui entre les mains de ses amis; on y voit avec qiielle
patience de contemplation, quelle persévérance d'artiste il poursuivait, dans de nombreux essais
successifs, l'expression d'une rêverie souvent presque insaisissable, mais d'un ordre toujours poétique
et pur. Le trait, dans tous ces dessins, est d'une allure assez nette, mais parfois à peine
 
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