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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 1,1.1898/​1899

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No. 1 (Octobre 1898)
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L’ART DÉCORATIF
N° I. OCTOBRE 1898

N la peinture et la sculpture,
la France est souveraine de
l’art. Son sceau s’est im-
primé sur celles de tous les
peuples. De nos jours, en
tous les pays, l’artiste part
en pèlerinage pour Paris
comme il partait jadis pour
l’Italie. La sculpture fran-
çaise n’a plus d’égale au monde, et l’éclat de notre
peinture en cette fin de siècle restera pour les géné-
rations futures comme le crépuscule glorieux de
l’art d’une époque.
Le nouveau siècle va nous donner un nouvel
art, à la naissance duquel nous assistons. Cet art
sera autre que le notre, comme le notre fut autre
que celui du siècle dernier, l’art de Boucher et
de Watteau. Il sera l’art répondant aux conceptions
sociales modernes, celui de tous, non plus de
quelques-uns. Conscient de sa mission, il s’emparera
de l’outil de l’artisan: forgeron, menuisier, tisserand,
céramiste, verrier, imprimeur, relieur, universel
ouvrier en un mot, sa tâche sera de répandre le
beau sur tout ce qui nous entoure et de donner le
charme au cadre de notre vie, aujourd’hui si triste-
ment banal. Il ne sera plus la chose rare, l’idole
gardée au fond du sanctuaire par des prêtres jaloux
et devant laquelle la susperstition, non l’amour,
prosterne le peuple aux jours des grandes solennités,
mais le génie familier toujours à nos cotés,
berçant notre vie de son sourire, nous enveloppant
de sa caresse.
Quelle sera la part de la France dans cette trans-
formation?
Grande sans doute; la plus grande, dirions-nous,
s’il n’était téméraire de vouloir trop prévoir.
L’Angleterre, qui donna le signal du départ — c’est
sa gloire — s’est arrêtée en chemin; les successeurs
des Morris et des Crâne s’immobilisent dans l’œuvre
de ces premiers apôtres de l’art nouveau. Leur vrais


continuateurs sont les Belges qui, reprenant le
mouvement anglais à l’origine, surent en développer
les conséquences, débarrasser la voie des attaches
au passé, trouver des formes nouvelles, et surtout,
définir nettement dans leur œuvres les principes
auxquels Morris n’avait fait que préluder.
Entrée à son tour dans la voie nouvelle, la
France y marche à grands pas aujourd’hui. Ceux
qu’elle oppose aux artistes anglais et belges sont
maintenant essaim. Mais dans sa production, un
danger se révèle. La tendance de nos artistes,
pris en bloc, est trop souvent de voir dans la chose
à faire belle surtout prétexte à sculpture et peinture.
La conception de l’art industriel moderne, celle de
«l’objet beau par lui-même, pour lui-même-» semble
jusqu’ici plutôt leur répugner. Pour la plupart
d’entre eux, l’art appliqué, c’est «du petit grand art».
Pour définir ceci, un chandelier, par exemple, ne
sera qu’en seconde ligne dans leurs mains l’usten-
sile servant à l’usage qu’on sait; il est surtout le
support d’une délicieuse statuette. La glorieuse
tradition de sa peinture et de sa sculpture, son
orgueil à bon droit, poursuit la France artiste et la
domine dans ce nouveau domaine.
Ceci ne veut pas dire que les peuples sans
tradition artistique, ou restés jusqu’ici dans des
rangs plus obscurs — tels l’Amérique ou l’Allemagne
— soient les plus aptes à marcher à la tête de
l’art de l’avenir. Les dons heureux qui firent l’art
français grand, la sensibilité, la grâce, la charme,
l’élégance, l’esprit, la facilité continueront de le faire
grand dans l’avenir. Mais en entrant dans le champ
nouveau, ces dons doivent se retremper à la source
qui le féconde, à l’esthétique de la chose belle par
elle et pour elle.
Telles sont les convictions qui nous guideront
dans l’examen critique des œuvres du nouvel art,
et telle est la raison pour laquelle nous consacrons
ce premier numéro à l’oeuvre de l’artiste qui re-
présente le plus complètement jusqu’ici, selon nous,

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L’ART DÉCORATIF. No. I.

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