Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Hinweis: Ihre bisherige Sitzung ist abgelaufen. Sie arbeiten in einer neuen Sitzung weiter.
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
L’ART FRANÇAIS

CHARLES CHAPLIN

Charles Chaplin, le peintre des grâces et des amours, est mort le 7 janvier
dernier.

Né aux Andelys, le 6 juin 1825, de parents anglais, Chaplin avait demandé
et obtenu ses lettres de grande naturalisation. Élève de Drolling, il débuta au
Salon de 1845 par un portrait de femme. Puis il s’essaya, sans trop de succès,
dans la peinture d’histoire, dans le paysage avec animaux, et enfin aborda ce
genre gracieux qui devait, d’un jour à l’autre, établir sa réputation ; cette der-
nière manière nous a valu : Diane endormie, les Bulles de savon, les Tourterelles,
Y Oiseau envolé, les ‘Premières roses, et quantité d’autres scènes où l’art de Bou-
cher et de Fragonard s'avive d’une pointe de « modernisme », œuvres d’une
séduction immédiate et d’un sentiment très personnel.

Chaplin était aussi un graveur habile. On a de lui. notamment, une remar-
quable interprétation de la Noce juive, d’Eugène Delacroix.

MEISSON IER

L’Ecole française a perdu son représentant le plus illustre : Jean-Louis-
Ernest Meissonier a succombé le 31 janvier, à'l’âge de 80 ans, après une
courte maladie. Il était né à Lyon, le 21 février 1811, d’une ïamille de com-
merçants, et fut lui-même tout d’abord destiné au commerce. Bientôt sa
vocation se révéla, et après avoir étudié le dessin à Grenoble chez M. Fériot,
puis à Paris, à l’atelier Léon Cogniet, il partit pour Rome d’où il envoya au
Salon de 1834, son premier tableau, les Bourgeois flamands, connu aussi sous
le nom de Visite che% le Bourgmestre.

A partir de cette époque, jusqu’en 1878, Meissonier ne cessa pour ainsi
dire, de figurer aux Salons annuels. Son œuvre considérable ne saurait être,
ici, l’objet d’une énumération même sommaire. Toutefois, nous nous efforce-
rons d’en résumer le catalogue dans un de nos prochains numéros, en même
temps que nous publierons la reproduction d’une des plus célèbres pages du
maître disparu.

Meissonier demeurera l’une des figures les plus curieuses de ce temps. Sa
vie entière s’est écoulée en une sorte de spéculation rétrospective. Le specta-
cle contemporain ne l’intéressa qu’à de très rares intervalles et en des circons-
tances tout exceptionnelles.

« Un demi-siècle s’est accompli; les révolutions ont bouleversé notre
pays; les génies modernes ont illuminé le monde; les vieilles conventions se
sont évanouies comme des fantômes; sur les murs des temples écroulés, l’art
nouvau a jeté partout ses floraisons radieuses... M. Meissonier n’a rien vu,
rien entendu, rien ressenti. »

Les veux fixés sur d’autres siècles et sur des costumes pittoresques qui lui
offraient une inépuisable série de « prétextes », ou bien encore tout à la
légende napoléonienne qui le hantait et qu’il voulait enfermer dans huit pages
immortelles, il s’isola. Il s’efforça de pénétrer toujours plus avant dans l’es-
prit d’un temps qui n’était pas le sien, et encore moins le nôtre. Il a vécu,
non de la vie au delà, comme les grands idéalistes, mais, pour ainsi dire, de la
vie en deçà. Quelle volonté ne lui a-t-il pas fallu pour demeurer ainsi, pen-
dant toute sa « carrière », hors du monde actuel ! Car enfin, ses rares incur-
sions sur le domaine du dix-neuvième siècle, si riche pourtant, ne sont que
des accidents. Ses portraits ne nous séduisent surtout que lorsqu’ils affectent un
caractère d’anachronisme, comme par exemple celui de Mlle Steinheil, qui
pourrait être signé: Fragonard. Nous ne voudrions point faire entendre que
le Portrait de M. Het^el, celui de PC. Victor LeJ'ranc, celui de M. Alexandre
"Dumas, celui de PC. Meissonier fils, celui de M. Alfred Quidant, ne sont point
d’admirables portraits. Mais la séduction, encore une fois, en est diminuée de
tout l’intérêt « pittoresque » du costume et des accessoires d’un autre âge.

Ce qui restera de l’œuvre de Meissonier, c’est cette merveilleuse resti-
tution des siècles passés. Il a réellement coudoyé, fréquenté, intimement
connu ces hallebardiers, ces mousquetaires, ces gardes du temps de Louis XIII,
et, aussi, ces encyclopédistes qu’il réunit dans le cabinet de Diderot. Meisso-
nier a poussé les échecs avec ses Joueurs d'échecs, lancé des boules avec ses
Joueurs de houles, lu avec ses Liseurs, monté la garde avec ses Vedettes. Dans
les moindres attitudes, dans l’expression des figures, dans la manière si vraie
dont les costumes se plissent, s’entre-baillent, s’effiloquent, se fripent, dans la
disposition comme dans le détail des accessoires, on retrouve toute une
époque, tout un ordre d’idées et de caractères. Il exprime, avec un art infini,
l’insouciance du reitre amoureux et buveur, les joies délicates et raffinées du
lettré enfoui dans le demi-jour de sa bibliothèque, de l’amateur d’art puisant
à pleines mains dans des cartons richissimes. Dans la ‘RJxe, il montre la haine
farouche, mortelle, de deux soldats que leurs camarades ont peine à désarmer.
Le drame, très simple, est terrible. Dans les Bravi, un chef-d’œuvre., il nous

donne l’angoisse du crime qui va se commettre, du sang qui va couler... Il
faut réserver certains petits tableaux comme le Graveur, la Lecture du manus-
crit, le Bibliophile, d’autres enrore, où l’intérêt se résume sur un Seul per-
sonnage.

Ce sont là des monologues qui valent tous les dialogues imaginables. La
lumière caresse les étoffes, avive les angles des meubles, piquant ça et là des
flèches d’argent. Dans ses petites scènes de plein air, dans ces incomparables
Joueurs de houles, le maître n’est pas moins personnel et séduisant.

Les réserves dont je parlais tout à l’heure porteraient sur des questions de
goût, sur certaines juxtapositions de tons, sur certaines duretés dans le modelé.
Elles porteraient encore sur l’exagération de l’importance du costume au
détriment de l’intérêt de la physionomie dans ce Polichinelle que nous montrait
un jour le grand artiste. Eh! non, Polichinelle n’est pas cet ivrogne — vulgaire
et brèche-dents. Il a cinquante ans bien marqués, cet ivrogne — et- Polichinelle
n’a pas d’age. Il est immortel, comme l’ironie, comme le rire.

Je n’admire qu’à demi, encore, ce Régiment de cuirassiers qui semble une
fresque — par ses dimensions —- à côté des autres tableaux de Meissonier.
En dépit de la science prodigieuse, du dessin scrupuleusement exact, et de
telle autre qualité qu’on y voudra voir, je n’y retrouve pas l’enthousiasme
que produit toujours l’aspect d’un régiment de cavalerie rangé dans une
plaine, le piaffement, le hennissement des chevaux, l’étincellement des cui-
rasses et des casques. Le paysage, le ciel même, sont « quelconques ». En
revanche « 1814 » restera la page la plus dramatique qui ait encore été
écrite sur le maudit des Jambes. C’est la déroute, la grande armée est repoussée,
les chevaux enfoncent leurs sabots dans la boue. L’empereur s’avance en tête
de ses généraux. Les figures sont saisissantes, tellement le désespoir, mais le
désespoir sans phrases, y est empreint. A ce propos, on n’a pas dit assez jus-
qu’à quel point le grand artiste poussait la conscience. Pour peindre ce Napo-
léon, il avait demandé la redingote grise de l’ex-musée des souverains. Il l a
revêtue, il s’est fait établir, dans son atelier, un cheval de bois, sellé comme
le cheval blanc de l’Empereur, puis, se plaçant sur la selle, il s’ingéniait à
prendre les attitudes familières du petit caporal, en s’étudiant dans une glace,
passant ainsi des heures entières à déterminer le plissement de la redingote
sur la croupe du cheval. Tenez pour certain qu’à ces heures-là, Meissonier
croyait être Napoléon. Il l’était absolument, en effet.

----

pCHOS Artistiques

Le défaut d’espace nous oblige à remettre à notre prochain numéro le
compte-rendu des expositions ouvertes au Cercle Artistique de la rue Boissy-
d’Anglas et dans la galerie Georges Petit, rue de Sèze (aquarellistes français).

X

Voici les noms des candidats qui briguent la succession de Léo Delibes à
l’Académie des Beaux-Arts.

Ce sont : MM. Lalo, Guiraud, Widor, Victorien Joncières et Théodore
Dubois. Ce fauteuil avait été occupé par Auber, Adolphe Adam et, en der-
nier lieu, par Victor Massé.

X

La vente au profit du peintre Bénédict Masson a atteint 12,000 francs.

Le tableau offert par Gérôme, Y ^Amante jouant avec un lévrier, a été vendu
2,660 francs.

X

Nos artistes français se préoccupent beaucoup de l’Exposition de Moscou.
Parmi les œuvres qui seront envoyées en Russie, en cite, dès à présent, les
suivantes :

M. Bonnat exposera : le portrait du cardinal Lavigerie ; celui de Puvis de
Chavannes et son Barbier turc.

M. Jules Lefebvre : le portrait de Mme Trébutien, qui lui valut la médaille
d’honneur, et une étude de « Nu ».

M. Saint-Pierre : la Chanteuse et un autre tableau, Y Aurore.

M. Gervex : le Jury du Salon.

M. Friant : trois tableaux.

M. Emile Belmann : Un juif, exposé au Salon de 1889.

M. Dauphin : le Port de Toulon.

M. Mathey : deux portraits.

L’Administrateur-Gérant : SILVESTRE

Glyplographie SILVESTRE & C", rue Oberkampf, 5*7, à Paris.
 
Annotationen