Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette archéologique: revue des Musées Nationaux — 1.1875

DOI Heft:
Nr. 4
DOI Artikel:
Le Blant, Edmond: Les Larmes de la prière
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.25048#0081
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
— 73 —

LES LARMES DE LA PRIÈRE.

(Planche 19.)

L’un de ces beaux sarcophages chrétiens d’Arles, que Rome même
nous envie, présente un groupe inexpliqué et qui me semble digne
de fixer l’attention, car il est, si je ne me trompe, la seule œuvre d’art
qui rappelle un trait important des pratiques pieuses de nos pères.
Aux pieds du Rédempteur assis, les pieds posés sur un riche scabcl-
lum et tenant le volumen sacré, deux personnages se prosternent (i) ;
« jacent in oratione », comme le disent les textes antiques. Telle est
sur d’autres tombes l’humble attitude de Marthe devant Jésus-Christ
ressuscitant Lazare; telle fut celle de l’empereur Théodose, admis
pour la première fois dans l’église de Milan après son crime (2). Au-
dessus de ces fidèles et de chaque côté du Christ, deux autres hom-
mes, s’inclinant devant lui, couvrent des deux mains leurs yeux d’un
linge flottant. Eux aussi prient, et, selon toute apparence, des pleurs
accompagnent leur prière.
Rien en effet n’est plus fréquent, dans les textes anciens, que la
mention de larmes versées en invoquant le Seigneur. Les Juifs de l'an-
cienne loi en avaient dès longtemps donné l’exemple; Tobie, Judith
avaient ainsi pleuré, et le Psalmiste avait écrit : J’arroserai mon lit
de mes sanglots (3). Les païens eux-mêmes connaissaient et pratiquaient
ce pieux usage. « C’est par des larmes ou jamais, écrit Ovide, qu’on
peut fléchir les dieux (4). » Prosterné devant la déesse, la face long-
temps appliquée sur ses pieds divins, le héros du roman d’Apulée les

(1) Les autres sujets sont le frappement du ro-
cher, la résurrection de la fdle de Jaïre et la gué-
rison de 1 Hémorrhoïsse. Le Christ est donc à la
fois représenté, sur cette tombe, ainsi que nous
le voyons souvent ailleurs (Bosio, Roma sotterra-
nea, p. 45, 63, 65, 67, etc.), dans un acte de sa
vie humaine et sous son caractère purement di-
vin, comme le montrent, à ce dernier point de
vue, son siège élevé et son scabellum (Pausanias,

VIII, 37 ; Lenormant et de Witte, Élite des monu-
ments céramographiques, t. III, pl. ix; Bosio,
Roma sotterranea, p. 45, etc.), particularité qui ne
se trouve pas dans les représentations antiques
des autres miracles.
(2) Theodoret., Hist. eccl., V, 18.
(3) Tob., III, H; Jud., XIII, 6; Psalm.,
VI, 7.
(4) III Pont., I, 99.
11

GAZETTE ARCHÉOLOGIQUE. — lr* ANNÉE. — N° 4. — JUILLET 1875.
 
Annotationen