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Oppermann, Charles A. [Hrsg.]
Album pratique de l'art industriel et des beaux-arts — 10.1866

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No 60 (Novembre- Décembre 1866)
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https://doi.org/10.11588/diglit.26971#0030
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ALBUM PRATIQUE DE L’ART INDUSTRIEL. — 10* ANNÉE. — NOVEMBRE-DÉCEMBRE 18(56.

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raie, décoré d’arabesques et de feuilles au travers desquelles se
jouent des oiseaux, nous sommes pleins d’admiration pour l’artiste de
la Renaissance qui créa ce chef-d’œuvre de délicatesse et de goût ;
mais une année de sa vie s’usa peut-être à ce travail qu’un prince seul
put acquérir : c’est une œuvre d’art pur, et non un simple objet de dé-
coration en rapport avec les besoins et les tendances actuelles.

L’industrie des glaces a d’ailleurs marché entraînant à sa suite l’art
du miroitier, et si l’on ne veut réduire ia glace au rôle d'ustensile
souvent transformé en joyau, comme était le miroir dans l’antiquité,
et jusqu’à Colbert, on doit faire de son encadrement une simple bor-
dure pour la glace, et un ornement décoratif pour l’appartement.

Jusqu’au xve siècle, les miroirs furent de dimensions assez res-
treintes, mais fort ornés; iis faisaient déjà partie de tous les nécessaires
de toilette, et entraient dans les ustensiles précieux dont le contrat de
mariage contenait ordinairement la minutieuse énumération. La bim-
beloterie de Paris, ou plutôt les bimbelotiers-miroitiers parisiens dont
la corporation jouissait de privilèges particuliers et d’un grand renom,
furent fort habiles à les décorer. Les guerres d’Italie apportèrent en
France les glaces de Venise de plus grandes dimensions, les spécimens
que l’on en conserve ont une valeur très-grande comme objet d’art et
comme souvenirs artistiques; mais cette valeur est toute convention-
tionnelle; elles ne sauraient être comparées comme qualité aux pro-
duits des verreries modernes.

Le procédé du soufflage, seul connu alors, donnait des glaces d’une
dimension forcément restreinte, et rarement exemptes de légers dé-
fauts. Les miroitiers du Murano, fort habiles dans la taille du verre,
avaient trouvé dans le biseau et la gravure des ressources précieuses
pour faire ressortir la grandeur du morceau principal, pallier ses dé-
fauts et, en combinant ensuite les petits morceaux, ils en formaient un
encadrement très-riche d’effet et souvent gracieux dans son ensemble.

Florence exagéra l’effet du biseau en plaçant la glace en saillie sur
un large cadre en bois sculpté, et ce relief augmenta encore dans les
cadres en ébène ou en écaille décorés d’émaux, et plus souvent d’ap-
pliques en cuivre repoussé sous Louis XIII.

Au xvip siècle, les hautes cheminées du moyen âge commencèrent
à s’abaisser, et l’on s’occupa aussitôt à poser au-dessus des glaces en
trumeau qui refléteraient la lumière des lampes et l’image des cau-
seurs groupés autour du foyer. La découverte du procédé du coulage
des glaces allait généraliser ce mode de décoration.

L’industrie verrière était fort ancienne en France; dès les plus an-
ciens temps de la monarchie, on trouve sur les listes des nobles, figu-
rant aux montres, des gentilshommes verriers, qui ne dérogeaient pas
en se livrant au métier, et portaient épée en soufflant au chalumeau.
Jean de Nethon possédait les verreries de Tours-la-Ville, près de
Cherbourg; il reconnut que la plus grande partie des défauts qui dé-
paraient les glaces était due au soufflage, et chercha à trouver un meil-
leur procédé d’étendre en feuille la masse vitreuse. Le rouleau du pâ-
tissier lui en inspira le moyen ; il renversa le creuset plein de verre en
fusion sur une table en métal poli, plaça de chaque côté des règles
d’une épaisseur égale à celle qu’il voulait donner à la glace, et fit
rouler dessus un lourd cylindre en fonte, qui étendit la pâte absolu-
ment comme le rouleau étend le feuilletage sous la main du pâtissier.
La planche de verre ainsi obtenue, après avoir subi dans des fours ap-
propriés une recuisson et un refroidissement gradués, était dégrossie
et polie par de longs frottages à l’émeri. Depuis le procédé a été im-
mensément perfectionné dans ses opérations, mais il reste le même
pour l’ensemble de tous les détails essentiels.

Colbert vil tout l’avenir de cette invention, et sous ses auspices une
puissante compagnie se forma pour exploiter les privilèges des brevets
qu’il lui accorda au nom d’Abraham Thévard. La manufacture s’éta-
blit d’abord à Paris, puis, en 1691, à Saint-Gobain, où elle sert encore
de modèle à toutes celles qui se sont créées depuis.

Les procédés d’étamage étaient seuls restés en arrière; ils donnaient
d’excellents réflecteurs, mais ils sont dangereux à cause de l’emploi
obligé du mercure. L’argent n’avait pu, jusqu’à ce jour, être employé;
un habile miroitier parisien, M. Brocette, dont l’industrie regrette la
perte récente, a su trouver des procédés substituant l’argenture à l’é-
tamage, et donnant des glaces d’un éclat et d’une durée incomparables,
sans nul danger pour la santé des ouvriers qui l’appliquent.

Les glaces arrivent généralement étamées de la manufacture; l’éta-
mage occupe cependant encore aujourd’hui, à Paris, un grand nombre
de bras. La taille, l’ornementation, l’encadrement des glaces, tout ce
qui, en dehors de l’industrie qui la produit, exige du goût, delà déli-
catesse, tout ce qui, en un mot, est œuvre d’art, se fait par le miroi-
tier. L’encadrement peut rappeler toutes les époques, s’approprier
tous les styles; on ne doit cependant jamais perdre de vue qu’il doit,
avant tout, être en harmonie avec les exigences de l’architecture et
de l’ameublement modernes, et ne pas produire de trop violents con-
trastes.

Les glaces tiennent, nous l’avons dit, la part la plus large dans la
décoration de nos appartements; c’est le luxe de tous : à la fois un
ornement et un meuble utile. On ne doit pas les poser au hasard,
mais choisir leur place d’après le jeu de la lumière et l’effet qu’on veut
produire. Surmontant une riche et élégante console, elles donnent du
caractère, du style au salon, à la galerie. La fantaisie pure s’empare
souvent de leur encadrement et les taille suivant son caprice; il faut
alors savoir les mettre à une place où elles apparaissent comme orne-
ment, sans tenir d’une manière directe à la décoration de la pièce, et
sans choquer en rien son harmonie.

Comme la glace, le tableau tranche sur la tenture qui doit faire va-
loir l’un et l’autre, leur servir comme de fond, de repoussoir. Son
encadrement n’est pas soumis aux mêmes règles architectoniques, mais
on ne doit cependant pas oublier que, placé dans une pièce, loin de
choquer la décoration générale, il doit lui venir en aide comme effet.
Les bordures ne doivent pas être arbitraires, il existe des règles pour
la largeur des cadres, chaque genre, chaque tableau trouvent dans leur
encadrement des proportions qui les font valoir ou qui les tuent. Les
anciens entouraient leurs tableaux d’une mince bordure et leurs fres-
ques d’un simple trait qui suffisait pour les isoler de la décoration géné-
rale sans faire trou ni saillie. Quelques anciens peintres mettaient à
leurs tableaux des bordures plates assez larges; les frères Van Eyck
les peignaient eux-mêmes dans le ton le plus en harmonie avec le ton
dominant du tableau. C’est peut-être entre ces deux extrêmes qu’est
l’à-propos. On doit mettre le plus grand soin à le chercher; les plus
grands artistes ajoutent une extrême importance à ces détails. « Quand
vous avez reçu votre tableau, écrit Nicolas Poussin àM. de Chantelou,
je vous supplie, si vous le trouvez bien, de l’orner d’un peu de bor-
dure, car il en a besoin, afin qu’en le considérant en toutes parties les
rayons visuels soient retenus et non pas épars en dehors et que l’œil
ne reçoive pas les nuages des autres objets voisins qui, venant pêle-
mêle avec les choses peintes, confondent le jour. Userait fort à propos
que ladite bordure fût dorée, mais tout simplement, car le ton de l’or
s’unit très-doucement avec les couleurs sans les offenser. » Nous avons
tenu à reproduire cette lettre du grand peintre parce qu’elle explique
de la manière la plus précise et la plus vraie ce que doit être la bor-
dure pour le tableau qu’elle entoure.

Dans les grands établissements qui, comme le nôtre, produisent pour
la consommation générale et envoient leurs produits non-seulement
dans toutes les parties de la France, mais dans le monde entier, on
cherche généralement à produire manufacturièrement, abordant d’une
manière complète l’exploitation qu’on appelle de détail, la clientèle
ordinaire. On se prive ainsi d’un puissant moyen d’émulation vers le
progrès. On s’isole pour ainsi dire du seul juge qui soit compétent pour
apprécier nos œuvres, rectifier notre goût, pour nous ramener vers la
droite ligne du vrai et nous rappeler les règles du beau et du convena-
ble, si nous nous en éloignons, pour nous empêcher de nous endormir
dans une routine qui nous rendrait bientôt étranger à la marche des
idées, aux tendances de l’art. On se soustrait à la critique sévère et
juste des gens du monde, des artistes, de tous ceux qui vivent journel-
lement dans le mouvement des arts, le font, le dirigent ou l’apprécieut;
on se prive des conseils les meilleurs, les plus utiles.

STYLE ÉGYPTIEN. — STYLE GREC. — STYLE ROMAIN.

Le symbolisme égyptien a peu à donner à l’art moderne; les idées
qu’il glorifiait sont bien loin de nous, le climat dans lequel il se déve-
loppa est complètement différent du nôtre, les constitutions sociales
des deux peuples reposent sur des principes contraires. Les peintures
ou les sculptures hiéroglyphiques dont il couvrait la façade des monu-
ments et l’intérieur des édifices étaient plutôt faites pour parler à l’es-
prit que pour plaire aux yeux; elles seront muettes pour nous. Cepen-
dant quelques-uns de ces emblèmes resteront toujours. Le sphinx, à
l’étrange sourire, s’accroupit encore à la porte du palais. Le scarabée
sacré est souvent reproduit, et l’on pourrait mettre à profit, pour
certaines décorations particulières, les répétitions de palmes,de plumes
d’autruche, de fleurs de lotus, de triangles qui étaient les principaux
ornements artistiques de ce style conventionnel.

Les œuvres en bois de l’ancienne Égypte méritent, au point de vue
de l’ameublement, un intérêt réel. Le bois y est tourné, taillé, sculpté
avec habileté et avec goût, et la peinture polychrome vient ajouter
souvent ses embellissements à ceux de la sculpture. Ce sont toujours les
ornements que nous avons dits qui se répètent, mais dans les meubles
la forme s’approprie bien. Des sièges à pied de chacal, à dos con-
tourné, ornés pour appuie-mains de têtes de lion, recouverts de cous-
sins à fond rouge, quadrillés de noir et étoilés d’or dont le bout débor-
dait en volute par-dessus le dossier, paraîtraient assez élégamment
confortables pour figurer dans nos ameublements modernes. Ce n’est
pas une description de fantaisie que nous donnons; le meuble est re-
 
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