Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 2.1876 (Teil 2)

DOI Artikel:
Visconti, P. H.: Le Musée Torlonia
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.16690#0041

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
26

L'ART.

de certains personnages fameux, ont puissamment aidé à les faire reconnaître dans les œuvres de la
plastique et de la peinture. La foule comprenait aisément les œuvres des artistes grâce aux chants des
poètes qui avaient imprimé dans toutes les mémoires les aventures des héros.

L'art profita bien vite d'éléments qui lui étaient aussi favorables. Le sculpteur et le peintre
osèrent présenter certains épisodes des événements célèbres sans avoir à se préoccuper de les disposer
dans leur ordre strictement historique ni d'en faciliter l'intelligence par un enchaînement exact. Ils
comptaient visiblement que ces lacunes seraient comblées et ces faits expliqués par les spectateurs
qui verraient leurs ouvrages. La moindre allusion, l'emblème le moins direct devaient leur sembler suf-
fisants du moment qu'ils pouvaient compter sur la connaissance entière du sujet, de la part de ceux
auxquels la représentation en était destinée.

Ce que nous venons de rappeler a trouvé déjà des applications nombreuses dans bien des mo-
numents de l'antiquité figurée. Nous en présentons un exemple dans le dessin du bas-relief très-re-
marquable que nous mettons sous les yeux de nos lecteurs. Il rappelle les principaux épisodes de
l'expédition des Argonautes, entreprise qui signala le commencement de l'ancienne navigation. Sous
la conduite de Jason, la fleur de la jeunesse de la Grèce avait quitté Argos pour aborder aux rivages
de la Colchide. Là d'immenses trésors, que les récits populaires célébraient au loin sous la figure
d'une toison d'or, devaient être la récompense de l'audacieuse entreprise, dont tant de dangers fictifs
ou réels allaient rehausser la gloire.

Un personnage, animé à la fois des plus violentes passions de l'amour et de la haine, domine'
toute la légende : Médée la femme si profondément malheureuse et si atrocement coupable. Cette
figure était connue en Grèce de même qu'à Rome, non-seulement des esprits cultivés, mais des masses
populaires elles-mêmes. Car l'épopée et les théâtres avaient concouru à célébrer et à populariser le
sujet. Sans tenir compte des vers d'Epiménide et de Cléon, le poëme d'Apollonius, dit l'Hérodien, et
la tragédie d'Euripide suffisaient seuls en Grèce pour attacher vivement les esprits à des faits dont le
souvenir était un titre de gloire pour plusieurs des peuples de l'Hellade.

A Rome cette légende, bien que d'origine étrangère, devint également familière, grâce au poëme
de Valerius Flaccus et à la tragédie de Sénèque.

Agrippa, voulant consacrer la mémoire de sa victoire maritime qui avait assuré à Auguste, son
beau-père, l'empire du monde, fit élever un portique qu'il dédia à Neptune. Peut-être dans ce
monument, comme dans la plupart de ceux qui furent bâtis alors par Auguste même et par les hommes
de son plus intime entourage, pensa-t-on à effacer quelques-uns des souvenirs de la république et des
derniers de ses défenseurs. Le nouveau portique d'Agrippa pouvait faire oublier celui du grand
Pompée. Il devint en effet très-populaire; le choix des sujets des peintures pour le décorer était in-
diqué d'avance. L'homme de mer se plut à y faire représenter l'expédition des Argonautes, le pre-
mier et le plus noble souvenir des entreprises maritimes.

On s'éprit tellement de la beauté de ces peintures et de la célébrité du sujet, que Ton mit de
côté les dieux mêmes auxquels l'édifice avait été dédié. Le peuple, qui a toujours le dernier mot en
fait de dénominations, appela la construction d'Agrippa, le portique des Argonautes, et cette désigna-
tion lui resta. Or il est pour moi plus que probable que les nombreuses sculptures de l'expédition de
Jason, appartenant à l'art gréco-romain, ont été plus ou moins imitées ou inspirées des peintures
qui décoraient le portique d'Agrippa. Peut-être le bas-relief du musée Torlonia en offrait-il une répé-
tition fidèle. Evidemment il n'a pas été fait pour orner un sarcophage, comme l'ont été la plupart
des bas-reliefs qui reproduisent ce sujet, ainsi que le prouve un mémoire très-remarquable où
M. Dilthey vient, après plusieurs autres, de réunir les éléments de cette question \ C'est bien une
partie d'une frise destinée à la décoration d'un édifice ; l'action y est résumée en trois groupes difîe-
rents ; nous pouvons considérer ce bas-relief comme représentant à peu près la troisième partie d'un
des côtés de l'ensemble de la composition.

Un des taureaux aux pieds d'airain est entre deux femmes qui expriment leur frayeur. Dans le

i. Annales de VInstitut de correspondance archéologique, tome XLI, Rome, 1869. Je dois signaler aussi le bel ouvrage publié vers le
milieu du siècle passé par le comte Jean Renauld Carli, sous ce titre : Délia spediïione degli Argonauti in Colco. libri quattro; Venezia,
Recurti, 1745; quatre figures.
 
Annotationen