LE MUSÉE DE SÈVRES. 165
Ce décor s'exécute, soit par des applications de couleurs, en fond, ou en peinture, soit par
l'addition de métaux précieux, or, argent, platine, en filets ou en fond. Des contre-maîtres intelli-
gents, et d'une obligeance parfaite, vous expliquent, de la façon la plus claire et la plus précise,
toutes les particularités du travail qui s'exécute sous vos yeux, de telle sorte que lorsque vous
arrivez au musée céramique, but final de votre voyage, vous êtes déjà muni de notions suffisantes
pour jouir de l'intéressant spectacle qui s'offre à vos regards... et qui les charme.
Un chimiste éminent, qui fut en môme temps un savant de premier ordre et un administra-
teur d'une capacité rare, Brongniart, dont nous avons déjà cité le nom, avec tous les éloges qu'il
mérite, entreprit, en 180), de rassembler les matériaux d'un musée céramique, dans lequel la
question scientifique devait l'emporter de beaucoup sur la question d'art. Brongniart était un spé-
cialiste, et il entendait ne pas sortir de sa spécialité. Quoi qu'il en fût, la petite collection fondée
par lui devint l'embryon singulière-
ment vital, le germe incessamment
grossissant de celle que nous admi-
rons aujourd'hui.
Louis XVI avait acquis de De-
non, en 178 ^, une assez belle col-
lection de vases grecs. 11 en fit don
à la manufacture de Sèvres, pour
laquelle ce fut, en quelque sorte,
une première mise de fonds. Depuis
lors, le comte Daru fit demander
aux fabriques étrangères des types
de toutes les porcelaines, en même
temps que l'on recommandait aux
préfets l'envoi d'échantillons des
terres et des poteries françaises de
leurs départements. Vingt-six ans
de voyages, fructueusement em-
ployés par le directeur lui - même
dans tous les grands centres de la
fabrication européenne, furent aussi FÀ,t„ci éhaillék; ^b»iqu« d. Nevers) vers rôoo.
féconds en résultats. Les achats, les ( Musée de Sèvres.)
échanges, les dons reçus, sollicités, Un grand plat ro,ld ; éma" bleu .foncé *'* Perse ; d0c<"' rf\e" b'T 4 " mani4re dcs
o 5 3 5 *" w 1 émaux limousins; au centre, un vase rempli de Meurs
pl"OVOqués leS envois des VOyageUrS dans lequel se jouent des oiseaux: décor analogue sur le bord. Diamètre, om,y87.
. , . Fac-similé d'un dessin de H. Toussaint.
officiers de manne, naturalistes,
archéologues, agents diplomatiques, fabricants et inventeurs, furent également des sources inépui-
sables d'acquisitions incessantes.
Le principe qui dirigea M. Brongniart dans ses choix, — quand il put choisir, — fut
inébranlable chez lui. Le musée de la manufacture devait se composer, selon réminent chimiste,
de tous les produits dont une terre ou un mélange vitrifiable fait la base, ayant subi l'action du
feu, ou, tout au moins, d'une haute température. Ce n'étaient point des objets d'art, sous le
rapport des formes, de la composition et du dessin, ni des objets historiques, ni des pièces
archéologiques, que le directeur de Sèvres entendait rassembler. La considération technique
domina toujours dans son esprit. Pour lui, les objets les plus curieux, et par conséquent ceux qu'il
préférait, c'étaient ceux qui faisaient le mieux connaître l'histoire de la céramique, les décou-
vertes et les progrès des principales pâtes et de leurs diverses glaçures. M. Brongniart préférait
un vase grec, romain ou mexicain avec des défauts faisant connaître les principes de sa fabrica-
tion, au vase représentant le sujet le plus intéressant de l'histoire, mais sans intérêt direct pour
cette étude de la céramique qu'il ne perdait jamais de vue.
Fidèle à ce système, il classa les objets admis dans son musée, en tenant compte de leur
Ce décor s'exécute, soit par des applications de couleurs, en fond, ou en peinture, soit par
l'addition de métaux précieux, or, argent, platine, en filets ou en fond. Des contre-maîtres intelli-
gents, et d'une obligeance parfaite, vous expliquent, de la façon la plus claire et la plus précise,
toutes les particularités du travail qui s'exécute sous vos yeux, de telle sorte que lorsque vous
arrivez au musée céramique, but final de votre voyage, vous êtes déjà muni de notions suffisantes
pour jouir de l'intéressant spectacle qui s'offre à vos regards... et qui les charme.
Un chimiste éminent, qui fut en môme temps un savant de premier ordre et un administra-
teur d'une capacité rare, Brongniart, dont nous avons déjà cité le nom, avec tous les éloges qu'il
mérite, entreprit, en 180), de rassembler les matériaux d'un musée céramique, dans lequel la
question scientifique devait l'emporter de beaucoup sur la question d'art. Brongniart était un spé-
cialiste, et il entendait ne pas sortir de sa spécialité. Quoi qu'il en fût, la petite collection fondée
par lui devint l'embryon singulière-
ment vital, le germe incessamment
grossissant de celle que nous admi-
rons aujourd'hui.
Louis XVI avait acquis de De-
non, en 178 ^, une assez belle col-
lection de vases grecs. 11 en fit don
à la manufacture de Sèvres, pour
laquelle ce fut, en quelque sorte,
une première mise de fonds. Depuis
lors, le comte Daru fit demander
aux fabriques étrangères des types
de toutes les porcelaines, en même
temps que l'on recommandait aux
préfets l'envoi d'échantillons des
terres et des poteries françaises de
leurs départements. Vingt-six ans
de voyages, fructueusement em-
ployés par le directeur lui - même
dans tous les grands centres de la
fabrication européenne, furent aussi FÀ,t„ci éhaillék; ^b»iqu« d. Nevers) vers rôoo.
féconds en résultats. Les achats, les ( Musée de Sèvres.)
échanges, les dons reçus, sollicités, Un grand plat ro,ld ; éma" bleu .foncé *'* Perse ; d0c<"' rf\e" b'T 4 " mani4re dcs
o 5 3 5 *" w 1 émaux limousins; au centre, un vase rempli de Meurs
pl"OVOqués leS envois des VOyageUrS dans lequel se jouent des oiseaux: décor analogue sur le bord. Diamètre, om,y87.
. , . Fac-similé d'un dessin de H. Toussaint.
officiers de manne, naturalistes,
archéologues, agents diplomatiques, fabricants et inventeurs, furent également des sources inépui-
sables d'acquisitions incessantes.
Le principe qui dirigea M. Brongniart dans ses choix, — quand il put choisir, — fut
inébranlable chez lui. Le musée de la manufacture devait se composer, selon réminent chimiste,
de tous les produits dont une terre ou un mélange vitrifiable fait la base, ayant subi l'action du
feu, ou, tout au moins, d'une haute température. Ce n'étaient point des objets d'art, sous le
rapport des formes, de la composition et du dessin, ni des objets historiques, ni des pièces
archéologiques, que le directeur de Sèvres entendait rassembler. La considération technique
domina toujours dans son esprit. Pour lui, les objets les plus curieux, et par conséquent ceux qu'il
préférait, c'étaient ceux qui faisaient le mieux connaître l'histoire de la céramique, les décou-
vertes et les progrès des principales pâtes et de leurs diverses glaçures. M. Brongniart préférait
un vase grec, romain ou mexicain avec des défauts faisant connaître les principes de sa fabrica-
tion, au vase représentant le sujet le plus intéressant de l'histoire, mais sans intérêt direct pour
cette étude de la céramique qu'il ne perdait jamais de vue.
Fidèle à ce système, il classa les objets admis dans son musée, en tenant compte de leur