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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 7.1881 (Teil 2)

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Heulhard, Arthur: Art dramatique, [9]
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ART DRA

MATIQUE

Théâtre de Cluny : la Fausse Agitas. — Théâtre des Nou-
veautés : la Boîte à Bibi. — Théâtre du Vaudeville :
l'Irrésistible. — Théâtre des Nations : la Cellule n" 7.

IiOur peu que l'été continue d'allumer ses feux, les
critiques seront forcés d'abandonner la partie : on
nous verra, houlette en main, conduire les troupeaux
hors des bergeries, et, mollement couchés sur les gazons
diaprés, gonfler, à notre tour, les pipeaux chéris de Segrais, de
Racan et de M11"' Deshoulières. C'est le sort qui nous attend,
et je sais plus d'un confrère qui ne s'en plaindra pas.

En attendant, et pour nous tenir en haleine, l'Odéon, cédant
à la volonté du cahier des charges, a donné des représentations
du vieux répertoire qu'il était de notre intérêt de suivre avec
attention. Un jour nous avons vu la Fausse Agnès, de Des-
touches. Ce n'est pas que Destouches et la Fausse Agnès soient
pour nous des questions d'actualité brûlante, mais voilà un
nom et un titre célèbres avec lesquels notre génération n'entre-
tient qu'un rare commerce; il n'en faut pas plus pour trouver
matière à réflexion sur l'inanité des gloires humaines. On a
tort pourtant de tenir Destouches en telle rigueur : outre deux
ou trois pièces qui occupent le premier rang dans la littérature
dramatique du second ordre, Destouches laisse à la postérité
un vers fameux, qui suffirait à assurer, pendant un demi-siècle,
l'existence de toute une famille. Et quel est, direz-vous, le vers
qui a cette propriété merveilleuse de remplacer le pain quoti-
dien? Je vais vous l'indiquer, bien persuadé d'ailleurs que vous
avez dans l'àme trop d'honnêteté pour utiliser la recette. Ce
vers est celui-ci :

La critiqua est aisée et l'art est difficile.

Et comment s'y prendre pour vivre, soi et ses enfants, avec ce
seul vers pour patrimoine? Rien n'est plus simple. Il n'est pas
de conversation qui ne puisse amener, au moins une fois par
jour, cette citation d'ailleurs classique ; or quatre-vingt-dix
personnes sur cent, parmi les plus instruites, ont la conviction
qu'elle est de l'Art poétique de Boileau. Quand votre tour de
parole est venu, vous corroborez votre argumentation par :

« La critique est aisée et l'art est difticile. »

en insistant sur le sens décisif de cet apophthegme, et vous
ajoutez plus timidement, comme si vous aviez l'air de craindre
un avis contraire : « a dit Destouches ». Aussitôt, votre inter-
locuteur se rengorge, porte la main à son faux-col, et répond
d'un ton assuré : « Non... pas Destouches... Boileau... » Vous
vous défendez faiblement, l'autre insiste, offre de parier, vous
acceptez, on va aux preuves, et on découvre que le vers, objet
de la contestation, est emprunté au Méchant, comédie de
Destouches. A vingt francs par tête, dans une société nom-
breuse, supputez les bénéfices et avouez avec moi qu'un emploi
à l'enregistrement, à la ville ou dans les ministères, est une
pure duperie, en comparaison du gagne-pain dont je viens de
vous révéler le secret, au prix de mon honneur.

Quant à la Fausse Agnès, je ne vous en dirai rien que
vous ne sachiez déjà, sinon qu'elle a été très proprement
jouée.

En même temps que les Nouveautés reprenaient la Boite
à Bibi, grosse bouffonnerie dont les gros effets portent sur le
gros public, le Vaudeville nous conviait à la première repré-
sentation d'un acte posthume d'Octave Gastineau : l'Irrésistible.
C'est une pieuse pensée qui a inspiré M. Raymond Deslandes,
et comme un hommage rendu à l'amitié. Le public, tout en

partageant les généreux sentiments du directeur, n'a que médio-
crement goûté ce vaudeville arraché aux ténèbres de la mort.
L'idée première de l'Irrésistible est assez peu naturelle, et le
dialogue, quoique aisé, ne rachète pas cet inconvénient.
Deux amis, fervents apôtres du célibat, édictent une pénalité
contre celui des deux qui se mariera, nonobstant clameur de
haro : il est convenu que celui qui sera resté célibataire aura
pleins pouvoirs de courtiser la femme de l'autre. Roger d'Auber-
ville, ayant manqué à la foi jurée, essaye de se soustraire aux
obligations du contrat en se réfugiant aux eaux, loin de son
ami. Dans cette station balnéaire, le ménage d'Auberville fait
connaissance d'une veuve, aussi séduisante que peu éplorée.
Cette veuve (il faudrait être Huron ou Topinambou pour ne
pas deviner la suite) est fatalement destinée à épouser l'ami
célibataire et à le réconcilier avec M. d'Auberville. Et les
choses se passent comme j'ai l'honneur de vous le dire, sans
plus de façons.

Un monologue, dit par M"u Lincelle, accompagne l'Irré-
sistible sur le programme. Ce morceau de diction familière,
excellent exercice pour une débutante, a généralement plu.
Il met en scène une jeune tille d'une ingénuité irrécusable qui
répond : Oh ! Monsieur, et pas plus, à toutes les questions
qu'on lui adresse, qu'elles viennent d'un amoureux ou de tout
autre homme. En agissant de la sorte, cette jeune fille candide
obéit aux prescriptions d'une mère jalouse des prérogatives et
avantages de la plus extrême pudeur. Et c'est précisément cette
recommandation qui enlève toute spontanéité, tout caractère
piquant à l'éternel Oh ! Monsieur, derrière lequel l'ingénue
se retranche. En dehors de Coquelin cadet, qui approprie
merveilleusement le genre à sa nature, le monologue n'a point
d'interprètes autorisés, et, à aucun titre, il ne saurait rentrer
dans la grande famille des arts dramatiques.

Il n'y a pas longtemps que j'ai entendu réciter le Capita-
liste dans un théâtre fréquenté par un artiste aimé des spec-
tateurs; le Capitaliste est un des morceaux où Coquelin cadet
réussit le plus; eh bien, il perd toute saveur dans une bouche
étrangère, et, du commencement à la fin, pas un rire n'a inter-
rompu ce malencontreux monologue. On se regardait avec des
airs navrés en sentant la parfaite vanité de la mode. Les mono-
logues iront rejoindre les chansons parlées de Levassor.

Il y a tantôt dix mois, MM. Théodore Henry et Mary
Cliquet firent représenter au théâtre des Nations, dirigé par
M. Ballande, un drame en cinq actes tiré d'un roman de Pierre
Zaccone et intitulé les Nuits du boulevard; ce drame était
absurde de point en point, bourré de péripéties grossières, et
écrit en un style d'une platitude et d'une incorrection révol-
tantes ; il alla triomphalement jusqu'à cent représentations.
Aujourd'hui, le même M. Henry, sans l'appoint de M. Mary
Cliquet, extrait d'un roman du même M. Zaccone un nouveau
drame également en cinq actes, également monstrueux par les
faits et par la facture, et, comme le premier, tombé sous le
ridicule; pourtant rien ne prouve que la Cellule n° 7 n'accom-
plisse sa période de cent représentations à l'imitation des Nuits
du boulevard! En matière de drame, le goût public est abomi-
nablement perverti, et il faut reconnaître que M. Ballande ne
néglige rien pour aggraver le mal. Le titre seul de la Cellule
;i» 7 nous apprend que l'action traverse, à certain moment, les
maisons les plus pénitentiaires. Il s'agit ici d'un individu,
escarpe et prince, qui assassine couramment pendant quatre
actes, ce dont il est puni au cinquième. 11 assassine d'abord
une jeune fille, se dérobe à la justice, et dénonce le fiancé de
la jeune fille comme étant le véritable meurtrier; il assassine
 
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