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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 8.1882 (Teil 2)

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Heulhard, Arthur: Art dramatique: Comédie-Française: Les Rantzau
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https://doi.org/10.11588/diglit.19459#0053

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ART DRAMATIQUE

COMÉDIE-FRANÇAISE : LES RA NT Z A U

'esthétique familière de MM. Erckmann-Chatrian n'est pas du goût de
tout le monde, et j'ai rencontré des esprits infiniment délicats qui ne se
plaisent pas à leurs récits, des cœurs extraordinairement sensibles qui ne
battent pas à leurs drames. Au théâtre commî dans le roman, les auteurs
de l'Ami Frit\ et du Conscrit de 1813 ont ce qu'on appelle très justement
un genre : ils plaident les grandes choses par le petit côté. Observez de
près leur œuvre commune, elle a, comme les ménagères d'Alsace, la tète
au ciel et le pied dans l'herbe ; elle chante un lied en empilant les pièces
blanches, et c'est elle qui crie le plus haut : Les bons comptes font les bons amis.
MM. Erckmann-Chatrian font tenir l'idée de patrie dans un sabot, l'idée de piété filiale
dans une vigne, et servent l'idée d'amour sur un vieux plat de Strasbourg, entre un pot
de Wolxheim et une choucroute garnie. Ils ont tiré de grands effets de ces associations
bizarres où les spiritualités de la conception littéraire chevauchent côte à côte avec les
matérialités de la vie. Ce sont des naturalistes, qui peignent à leur façon non la bataille
pour l'existence, mais la lutte pour le confortable. Un homme de bon appétit est presque
toujours un partisan d'Erckmann-Chatrian.

Les Rant\au, que la Comédie-Française a triomphalement représentés, ont ravivé non
les haines, mais les querelles de sentiment qu'avait suscitées l'Ami Frit\. Il ne se livre
pas de combats furieux dans la critique, parce que le procédé dramatique de MM. Erck-
mann-Chatrian n'innove rien qui nous étonne ; mais çà et là des réserves se font jour.
11 n'y a pas de grincements de dents, il y a des moues et des grimaces. Disons les choses
comme elles sont : on trouve MM. Erckmann-Chatrian un peu sans gêne en matière d'art
et on ajoute qu'ils cherchent à s'attirer les sympathies du public en lui tapant sur le
ventre. Voyons.

Un riche paysan du village des Chaumes, Antoine Rantzau, meurt laissant deux fils ;
il a commis la faute de favoriser l'aîné aux dépens du plus jeune : de là inégalité dans la
condition des deux frères et franche inimitié entre eux. Dans la suite des temps, Jean
Rantzau a une fille nommée Louise, et Jacques Rantzau, un fils nommé Georges. Au
moment où l'action s'engage, la situation est à la fois celle de Roméo et Juliette de
Shakespeare et des Deux Frères de Kotzebue. Pour tenir l'emploi de Fra Lorenzo,
MM. Erckmann-Chatrian ont engagé spécialement M. Florence, maître d'école des
Chaumes, et par une coïncidence d'autant plus curieuse à enregistrer ici qu'elle n'a été
relevée nulle part, M. Florence, comme Fra Lorenzo lui-même, herborise avec passion.
Si les auteurs des Rantzau n'ont pas mis dans la bouche de leur maître d'école la
merveilleuse poésie qui parfume les lèvres du personnage shakespearien, c'est qu'apparem-
ment la ressemblance eut été trop forte... ou que la poésie leur va moins bien qu'à
Shakespeare. A défaut d'inspirations géniales, M. Florence a des vues honnêtes et droites
et une grande générosité naturelle. Aussi le voyons-nous, le rideau levé, donner mysté-
rieusement à la vieille Nanette une pièce de quarante sous en réparation du dommage que
 
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