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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 13.1887 (Teil 1)

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Jullien, Adolphe: "Lohengrin" a Paris
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https://doi.org/10.11588/diglit.25558#0276

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LOHEN GRIN » A PARIS

«

Lohengrin a été représenté à Paris. Une fois ! Comme
en son temps le Roi s’amuse, et quand on le rejouera —
dans dix, vingt, trente ans, que sais-je ? — on pourra
mettre aussi fièrement sur l’affiche : Deuxième représen-
tation. M’est avis cependant que F « opéra romantique »,
pour employer la qualification même adoptée par Richard
Wagner, n’attendra pas aussi longtemps que le « drame
romantique » avant de reprendre possession d’un théâtre,
et qu’une fois remis en scène, il n’en disparaîtra pas de
sitôt.

C’est ce qu’avaient clairement compris tous les gens
dont les intérêts artistiques ou commerciaux pouvaient être
atteints le moins du monde par la réussite immédiate de
l’entreprise tentée par M. Lamoureux. Aussi s’était-il formé
de longue date, et sans qu’il fût besoin d’entente préalable, une ligue de tous ces inquiets et de
tous ces envieux : directeurs de théâtre, enrageant de n’avoir pu jouer ce chef-d’œuvre et crai-
gnant qu’il ne devînt trop fructueux pour leur rival d’un jour; éditeurs de musique, inquiets du
discrédit que pouvait jeter sur leur fonds commercial le triomphe de cette œuvre admirée
universellement ; compositeurs de musique, exaspérés de penser qu’on allait voir combien ils
avaient profité du maître après lequel ils s’acharnaient pour le proscrire un peu plus longtemps
de France ; chefs d’orchestre ou directeurs craignant que l’exécution parfaite à laquelle attein-
drait sûrement M. Lamoureux ne fût une humiliation pour eux et ne fît d’autant mieux ressortir
la pauvreté des représentations qu'ils offraient au public.

Autant de gens qui, non de franc jeu, mais insidieusement, par de perfides propos et des
agissements sournois, s’employaient depuis longtemps à desservir les projets si louables de
M. Lamoureux, et ces manœuvres, si habiles qu’elles crussent être, étaient, dans ces temps
derniers, devenues tellement palpables que des journaux, ordinairement très réservés, surtout en
face de gens avec lesquels ils sont en rapports constants d’affaires théâtrales ou autres, n’avaient
pu faire autrement que de s'en expliquer : cela devenait par trop fort. Et n’est-ce pas le Figaro,
entre autres, qui, par la plume de son rédacteur en chef, dénonçait cette odieuse campagne et
nommait presque les gens : « Tout cela, disait-il, provient de rancunes d'éditeurs bataillant pour
leur boutique, de musiciens « nationaux » ratés, de chanteuses désappointées et de directeurs sur
le seuil de la faillite. »

Et cependant, ces « artistes » désintéressés ne seraient arrivés à rien de bon ou de mauvais
— comme on voudra — s’ils n’avaient trouvé de précieux alliés dans quatre ou cinq journaux
qui partirent en guerre, au nom du patriotisme, et qui vinrent ainsi renforcer cette ligue d'intérêts
ou de vanités contre un homme uniquement préoccupé de son art. Il faut le dire : il n’y eut
dans toute cette affaire, à quelque point de vue qu'on l’envisage, qu’une affaire de gros sous :
les uns craignaient d’en perdre et les autres en auraient voulu gagner. Mais comme l’entrepre-
neur ainsi harcelé se souciait aussi peu de ceux-ci que de ceux-là et ne prêtait pas plus l’oreille
aux attaques qu’aux propositions, la campagne entamée ainsi sous le couvert du patriotisme alla
jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’aux cris poussés dans la rue et devant l’Éden, par une troupe
de polissons dont la plupart ne connaissaient de nom ni Wagner ni Lohengrin : tous imberbes
et tous patriotes.

Wagner dans le feu de la composition.
Caricature allemande.

{Gravure extraite de : Richard Wagner,
sa vie et ses œuvres.')
 
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