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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 2,2.1900

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No. 19 (Avril 1900)
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Thomas, Albert: L' exposition de la Société nouvelle
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https://doi.org/10.11588/diglit.34204#0055

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-3=^5)- L'ART DÉCORATIF

L'EXPOSMiON
DE LA
SOCiÉTÉ NOUVELLE
-y A Société nouvelle de peintres et de sculpteurs,
qui s'est constituée A Paris cet hiver sous la
^ présidence de M. Gabriel Mourey, vient de
nous donner la première de ses expositions
annuelles. L'événement est significatif et suggère
quelques réflexions.
Prisant des formules veiliies, ruinant des conven-
tions gênantes — qui n'avaient pas empêché tout de
même la floraison de chefs-d'œuvre -—- les artistes
de tempérament révolutionnaire continuent de mar-
cher à la conquête de l'indépendance de l'art, com-
mencée par Manet. Leurs manifestations âpres et
farouchessententlafièvre du combat; ellesmanquent
nécessairement de cette pondération, de cette ordon-
nance où les âmes délicates se plaisent. Aussi,
leur effort n'est suivi que par les esprits d'avant-
garde; on entoure les talents moins outranciers qui
savent discerner l'original du téméraire et, selon
de très subtiles méthodes,accommoder les tentatives
les plus hardies aux exigences de la raison et du
goût.La chose est commune àtoutesles révolutions.
Après s'être un instant accordés pour le même acte
de violence, les chefs de parti se reprennent et
s'orientent vers des buts différents. Les uns ne
veulent pas désarmer, et, suivis des turbulents,
desinquiets, travaillent déjà aux révolutions futures;
les autres, à la satisfaction du grand nombre, s'oc-
cupent d'organiser les libertés acquises. Ce sont
ces <?. républicains libéraux de l'esthétique 2-, par oppo-
sition aux -r révolutionnaires 2-, que M. Gabriel
Mourey a su grouper dans un parti vraiment cohé-
rent et sympathique. Dans ce parti, fn: est
le mot d'ordre, la discipline s'appelle /g g-ofrf ;
mais chacun garde son initiative et porte uniforme
à son gré.
Les pastels de M. Aman-Jean sont le grand
charme de cette réunion choisie. On a justement
observé qu'ils marquaient une transformation dans
la manière du peintre. Ce sont toujours les mêmes
accords de couleurs douces, roux et violets rompus,
roses éteints, jatmes amortis; mais dans cette
tonalité un peu sourde chante, plus vibrante, la
note de la ffeur, de la lèvre rouge, du ruban soufre
ou cerise par laquelle l'artiste réveillait déjà ses
dormantes symphonies. Puis les formes sont mieux
modelées, serrées d'un trait moins sommaire ; les
gestes, naguère figés en arabesques décoratives,
ont A présent la grâce libre, imprévue et mouvante.
Ces danseuses au ferme corsage, aux bras pleins
et ronds tournoient bien dans le remous des gazes
légères; l'air se sent aux plis de leurs jupes. Ces
deux femmes, penchées si naturellement au bord
d'une loge, offrent aux jeux de la lumière des
épaules et des gorges très humainement désirables.
L'œuvre d'Aman-Jean, mystérieuse et joliment
irréelle, s'est éclairée d'un rayon de vérité, les
princesses lointaines s'en sont venues lentement
du fond du rêve et sourient A la chaude beauté de
la vie.
Les personnages de Gaston La Touche se com-
plaisent au contraire dans leur domaine chimérique,
domaine absurde et resplendissant où les arbres
sont d'or, où les cieux se parent de nuances mer-
veilleuses, où les fontaines jaillissent en gerbes de
pierreries. Je goûte peu et

Ces nymphes, ces marquises Louis XV, ces satyres
qui mènent parmi les parcs royaux leurs théâtrales
fêtes galantes m'étonnent plus qu'ils ne me sédui-
sent. Mais l'/UrâM me charme infiniment ; la dame
tendant sa main au baiser, l'amant qu'on entre-
voit, mais dont on devine la reconnaissante ferveur,
le frisson quasi-sensuel de la lumière sur les lan-
bris, les ciselures, les miroirs et les lustres, tout
cela compose une délicieuse image de l'Amour et
la Volupté.
Aux féeries joyeuses de Gaston La Touche, Le
Sidaner oppose le rêve mélancolique de la Bruges
de Rodenbach : les quais déserts, les canaux
mornes, les vieux hôtels à pignons dentelés, la
splendeur mourante du soleil sur la ville, les fenê-
tres éclairées pareilles à des yeux de songe et d'an-
goisse, les formes hallucinantes des ténèbres.
Silhouettes flottantes, relief nul, couleur forcée, je
ne saurais affirmer que ce soit là de la peinture,
c'est en tout cas de la pénétrante poésie.
La poésie remplit encore les toiles sombres et
graves de M. Dauchez, le beau paysage de M. René
Ménard, largement peint, conçu dans un excellent
style, les œuvres de M. Baertscen qui rend avec
une extraordinaire puissance le sombre pittores-
que des cités du Nord et l'éclat surnaturel de la
neige au crépuscule. M. Duhem a goûté, lui aussi,
le mystère nocturne dans les villes de province et,
le jour, son Ame virgiüenne s'est penchée sur les
jardinets, sur l'humble vie des arbustes et des
plantes. La vie des choses familières bruit douce-
ment* dans les intérieurs de Walter Guy. Personne
dans ces salons et dans ces chambres, décorés par
laplushnepalette, mais des livres en désordre,
quelques fleurs, des braises qui se consument,
rappellent M présence humaine, disent les plus
tièdes intimités. —Les maisons au soleil d'Emile
Claus, toutes roses et rayées d'ombres mauves,
offrent une jolie fête de couleurs, mais elles sont
par trop inconsistantes. Elles flottent, légères et
diaphanes, elles vont s'évaporer, dtrait-on, aux
rayons plus vifs de midi. C'est chez Claus qn'appa-
rait avec le plus d'évidence un défaut commun, il
faut bien le dire, à la plupart des peintres actuels,
le peu de solidité dans les surfaces, de relief dans
les volumes, l'absence de la perspective aérienne
et de son élément subtil, lavaient*.
Si M. Claus, artiste de victorieux tempérament,
ignore ou dédaigne mm partie du métier de
peintre, M. Vail et M. Thaulovv en connaissent
toutes les ressources. Il nous montrent une Venise
assez différente de la Venise romantique, tantôt
froide et grise, tantôt délicatement ensoleillée, et
l'adresse de Thaulow surtout est incomparable à
noter les plus fines vibrations de la lumière, le
moindre frémissement des eaux.
Voilà maintenant les allégories d'Henri Martin.
La signification morale en est toujours admirable-
ment noble, la facture en demeure maigre et puérile.
Pourquoi s'obstiner ainsi dans un procédé qui in-
terdit toute synthèse ? M. Alexander brosse ses
figures avec bien plus d'ampleur, il indique large-
ment les clartés et les ombres, mais l'enveloppe
argentée dont il baigne ses toiles ne suffit pas à
relier ses grands tons plats, il y faudrait mille
nuances de modelé. Malgré le manque de finesses,
l'étude de femme en rose ravit par la qualité de la
couleur et la largeur du faire. Les scènes orientales
de Brangwyn, toutes en décor, sont d'une harmo-
nie sourde et riche, d'un ragoût fort savoureux.
Les toiles de M. Griveaux que l'on a malmenées pour
leur air de sécheresse vieillotte prouvent tout de
 
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