L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne (3,1.1900/1901)

NOVEMBRE 1900


H. SAUVAGE, ARCHITECTE ; PIERRE ROCHE, SCULPTEUR THÉÂTRE DE LA LOIE FULLER
FRANCIS JOURDAIN, PEINTRE noonnonnnoooon

Les décorations murales de ce pavillon
sont exquises. Depuis la porte, où deux
arbustes dressent leur touffe étoilée, à l'inté-
rieur de chaque salle, en chaque angle, sur
chaque fronton, avril prodigue ses claires mer-
veilles, sa verdure neuve si fraîche et si menue,
ses pommiers roses, ses lilas en bouquets, son
azur profond, pâle encore des dernières gibou-
lées. Dans une frise volètent des colombes; des
jacinthes laissent pendre dans une autre leurs
grappes harmonieuses. Une rampe de rosiers
monte au long de l'escalier, une guirlande pa-
rallèle court au sommet du mur et c'est, sur le
fond crème des panneaux, un délicat fleurisse-
ment de corolles jaunes et blanches. Mais voilà
qu'alentour d'une baie se découpe un décor
sylvestre, des arbres élancés, des platanes aux
feuilles légères, et que sur le tympan, dans un
médaillon, la Muse même du printemps appa-
raît, toute gracile, avec des regards d'Aurore.
La conception proclame un poète; la variété et
la souplesse de la composition, l'accord tendu
et subtil des nuances, la distinction si person-
nelle de l'ensemble révèlent en outre chez
M. Ruty un de nos artistes les plus avisés et
les plus sensibles.
Félix Aubert est bien connu pour l'abon-
dance et la simplicité de ses œuvres. Près des
élucubrations laborieuses de bon nombre de ses
confrères, ses créations ont le charme des choses
nées sans effort. On lui confie de grandes sur-
faces à embellir; il les couvre rapidement
d'images florales, hardiment synthétisées, mais
gardant la souplesse et la grâce vivantes. Sa
vaste composition pour le tympan des Industries
chimiques, au Champ-de-Mars, combine heu-
reusement plusieurs motifs d'un style parfait.
A l'Esplanade, section de la papeterie, le Salon
du matériel du dessin est tout enguirlandé de

ses feuillages. Des branches d'acacias s'en-
lacent, se nouent, se déploient en courbes pleines
d'aisance; rien n'égale l'harmonie des verdures
avec le gris de la muraille et la note jaune
des grappes en festons. Voilà un art jeune,
spontané, et qui, parmi les ordinaires tarabisco-
tages, nous a une fraîcheur d'oasis.
Les inventions de M. Ruepp sont plus com-
pliquées pour la plupart et voisines du tarabis-
cotage dont je parle. Quelques-unes pourtant
paraissent originales sans extravagance et sa-
vantes sans pédantisme. Tels par exemple le
plafond et la frise ornant, aux Invalides, le
salon qu'occupe à lui seul le plus audacieux
des décorateurs; les éléments végétaux et con-
ventionnels s'y allient pour d'excellents effets
de couleurs et de lignes. Nos lecteurs jugeront
de ces motifs par nos reproductions. Nous leur
présentons aussi certains fragments décoratifs
empruntés aux expositions étrangères d'alimen-
tation, à la section danoise, à la section des
Pays-Bas, curieusement installée par M. Sluy-
terman. Ils trouveront à ces dernières œuvres
de la solidité, de la science, une saveur très
originale; ils leur préféreront comme nous, sans
doute, les créations de MM. Ruty et Félix
Aubert, si simples, si mesurées, si discrètes en
leur grâce française.
ALBERT THOMAS.

LES PETITES CONSTRUCTIONS
DE L EXPOSITION
L faut du temps pour se reconnaître dans cette
vaste Exposition, où les constructions cyclo-
péennes pèsent avec tant d'insistance sur l'indi-
vidu. Mais, le moment de stupeur passé, l'esprit

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