MAI 1901
position de la question. La poser de n'importe
quelie autre manière, c'est s'insurger contre ia
force des choses.
Puisque ies sources auxquehes on a puisé
le beau jusqu'ici n'en font couier que ie cher, ii
faut puiser à d'autres. Ii en est une intarissabie :
ia vérité. Allons à elle.
J'ai dit à peine la moitié de ce que je me
proposais, c'est-à-dire de montrèr que (( i'art
dans tout)) se iie à i'organisation des rapports
entre i'art et i'industrie, actuehement chaotiques,
et vois qu'ii rne reste juste la place nécessaire
au compte rendu que je dois faire. Le reste sera
pour une autre occasion.
î'EXPOSirioN de la rue Caumartin présentait
i__ cette année un intérêt de premier ordre.
Deux courants s'y montraient distinctement :
celui des œuvres d'art proprement dit ou d'ex-
ception, représenté notamment par MM. Dampt,
Aiexandre Charpentier, Desbois; et celui des
œuvres tendant piutôt vers l'art industriel, dans
iequei nous trouvons MM. Piumet et Tony Sel-
mersheim, M. Henri Sauvage, et particuiière-
ment M. Sorei, chez qui la tendance se change
en expression catégorique.
Même dans ia première ciasse, certaines
œuvres sont visiblement influencées par la
préoccupation de mettre l'œuvre à Ia portée des
moyens de l'industrie.
C'est le cas de M. Dampt. Le fossé qui sé-
pare ses œuvres des possibilités d'exécution
courante est moins large aujourd'hui qu'autre-
fois. Dans ses admirables appareils d'éciairage
électrique (déjà parus à l'Exposition universelle),
M. Dampt a même franchi 1e fossé. C'est un
signe des temps. Qu'un artiste d'une pareilie
valeur, si hautement doué pour l'œuvre person-
nelle, ne dédaigne pas de montrer à l'occasion
comment ses dons peuvents'assouplir à l'œuvre
indéhniment reproduisible sans que 1a délica-
tesse de cette œuvre en souffre, c'est un symp-
tôme rëjouissant — je dirais, si je ne craignais
d'être taxé d'exagération, une date à marquer
dans l'histoire de l'art.
Tout ce qu'on peut dire des belles choses,
elles 1e disent eiles-mèmes: épiloguer sur ies
appareils d'éclairage de M. Dampt serait perdre
1a place. Le fauteuil exposé par l'artiste a
davantage 1e caractère d'exception, quoique
très sobre. II est en bois de charme, sur 1e ton
clair duquel 1e petit bouquet de cyclamens, fait
de marqueterie en relief au sommet du dossier,
jette un point de couleur. La forme de l'objet,
dérivée de celle du fauteuil de bureau à dossier
bas arqué, est pleine de noblesse, et ies détails
de sculpture et de modelé s'incorporent à cette
forme indissolublement. Un simpie cuir de truie
en couvre 1e siège.
M Angst, auteur d'un ingénieux bougeoir
en fer forgé et de deux pommeaux de canne,
est l'élève de M. Dampt; il en est de même de
M. Bocquet, qui présentait quelques travaux
d'orfèvrerie en argent pleins de distinction et
L. SOREL TABLE DE SALLE A MANGER (CERISIER)
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position de la question. La poser de n'importe
quelie autre manière, c'est s'insurger contre ia
force des choses.
Puisque ies sources auxquehes on a puisé
le beau jusqu'ici n'en font couier que ie cher, ii
faut puiser à d'autres. Ii en est une intarissabie :
ia vérité. Allons à elle.
J'ai dit à peine la moitié de ce que je me
proposais, c'est-à-dire de montrèr que (( i'art
dans tout)) se iie à i'organisation des rapports
entre i'art et i'industrie, actuehement chaotiques,
et vois qu'ii rne reste juste la place nécessaire
au compte rendu que je dois faire. Le reste sera
pour une autre occasion.
î'EXPOSirioN de la rue Caumartin présentait
i__ cette année un intérêt de premier ordre.
Deux courants s'y montraient distinctement :
celui des œuvres d'art proprement dit ou d'ex-
ception, représenté notamment par MM. Dampt,
Aiexandre Charpentier, Desbois; et celui des
œuvres tendant piutôt vers l'art industriel, dans
iequei nous trouvons MM. Piumet et Tony Sel-
mersheim, M. Henri Sauvage, et particuiière-
ment M. Sorei, chez qui la tendance se change
en expression catégorique.
Même dans ia première ciasse, certaines
œuvres sont visiblement influencées par la
préoccupation de mettre l'œuvre à Ia portée des
moyens de l'industrie.
C'est le cas de M. Dampt. Le fossé qui sé-
pare ses œuvres des possibilités d'exécution
courante est moins large aujourd'hui qu'autre-
fois. Dans ses admirables appareils d'éciairage
électrique (déjà parus à l'Exposition universelle),
M. Dampt a même franchi 1e fossé. C'est un
signe des temps. Qu'un artiste d'une pareilie
valeur, si hautement doué pour l'œuvre person-
nelle, ne dédaigne pas de montrer à l'occasion
comment ses dons peuvents'assouplir à l'œuvre
indéhniment reproduisible sans que 1a délica-
tesse de cette œuvre en souffre, c'est un symp-
tôme rëjouissant — je dirais, si je ne craignais
d'être taxé d'exagération, une date à marquer
dans l'histoire de l'art.
Tout ce qu'on peut dire des belles choses,
elles 1e disent eiles-mèmes: épiloguer sur ies
appareils d'éclairage de M. Dampt serait perdre
1a place. Le fauteuil exposé par l'artiste a
davantage 1e caractère d'exception, quoique
très sobre. II est en bois de charme, sur 1e ton
clair duquel 1e petit bouquet de cyclamens, fait
de marqueterie en relief au sommet du dossier,
jette un point de couleur. La forme de l'objet,
dérivée de celle du fauteuil de bureau à dossier
bas arqué, est pleine de noblesse, et ies détails
de sculpture et de modelé s'incorporent à cette
forme indissolublement. Un simpie cuir de truie
en couvre 1e siège.
M Angst, auteur d'un ingénieux bougeoir
en fer forgé et de deux pommeaux de canne,
est l'élève de M. Dampt; il en est de même de
M. Bocquet, qui présentait quelques travaux
d'orfèvrerie en argent pleins de distinction et
L. SOREL TABLE DE SALLE A MANGER (CERISIER)
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