L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne (4,1.1901/1902)

L'ART DECORATIF

est encore excellent. Ferme, naturel et pourtant
distingué. La décoration est aussi d'un bon
effet On se la figure mal sur Limage, il faut
voir l'objet en nature pour en juger. Cette
lampe se fait en cuivre repoussé, argenté ou
non argenté.
Le service de toilette en faïence par lequel
nous terminons la série me semble l'objet le
moins heureux du lot. Les formes sont très
cherchées, trop cherchées ; l'idée de donner à
la bofte à savon et aux autres petites pièces
des formes épousant celles des places qu'eMes
occupent sur la table de toilette, idée qui parait
d'abord juste, l'est beaucoup moins quand on
considère que les matériaux céramiques excluent
l'angle. La surprise d'en voir à ces pièces où
l'on ne l'attend pas a quelque chose de pénible.
La décoration aussi manque d'attrait; dans son
aversion pour le chargé, l'artiste est tombé dans
le sec. C'est une revanche à prendre.
Elle est toute prise, d'ailleurs; car la demi-
douzaine de pièces que vous voyez ici n'est
qu'une toute petite partie des cent bibelots
en métal, en cristal, en cuir, en bois, com-
posés par M. Dufréne en quelques mois. Le
tout sur commande, pour le commerce. Car —
j'avais oublié de le dire — il ne s'agit pas de
raretés de musées. Au mérite artistique s'unit
ici celui d'un bon pas dans la voie de donner
du beau à tous, et à chacun pour son argent.
Ces objets se font et se vendent couramment.
Les plats coûtent cinquante francs pièce,
argentés ; la lampe, quarante-cinq francs pièce
en cuivre, un peu plus argentée ; le reste à l'a-

venant, suivant le débit. C'es prix ne sont pas
encore des prix de bazar, mais ils sont loin des
sommes fabuleuses qu'on demandait pour le
moindre objet venant d'un vrai artiste il n'y a
pas plus d'un an. Progrès trop réjouissant pour
ne pas le noter. Qui veut changer ses vieilles
lampes pour des neuves ? Préparez-les, l'homme
vient. MusEY-GRÉViN.

LES MEUBLES DE MAJORELLE
ARLER des productions de M. Majorelle
dans cette revue est une tâche délicate.
D'une part, il y a dans beaucoup de ces pro-
ductions des erreurs dont le principe a toujours
été condamné ici et qu'il nous est impossible
d'approuver, même chez l'homme de talent —
surtout chez l'homme de talent. D'autre part,
l'ensemble de l'œuvre de M. Majorelle montre
des qualités si rares et si nombreuses, il se
distingue par une supériorité si évidente, divers
traits y reflètent si brillamment le goût français,
qu'il force l'estime, bien plus, la sympathie. En
ce qui me concerne, je me suis pris vingt fois à
m'en vouloir de ne pas critiquer M. Majorelle
comme m'y invite ce que je désapprouve chez
lui ; mais c'est plus fort que moi, il faut l'aimer
quand même. Aussi personne n'est mieux placé
pour s'expliquer sa vogue.
M. Majorelle est de Nancy, on le sait. On
sait aussi que les artistes de cette ville, qui
rendirent dans un temps de grands services à
notre art, parce qu'ils furent les premiers en
France à chercher de nouvelles voies, sont



L. MAJORELLE

CADRE DE GLACE EN ACAJOU, PANNEAUX EN MARQUETERIE

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