NOVEMBRE 1901
«se passe quelque chose)), la gaîté ou la peine,
le bonheur, la détresse, la Destinée. Malheureu-
sement M. Gustave Soulier a décrit trop subti-
lement cette merveille pour que je puisse m'y
attarder à mon tour. Le marteau, c'est une
maigre fillette qui, par un jour d'hiver, s'accroche
désespérément au grillage ; sur la plaque de la
serrure, une autre enfant implore asile, grelot-
tante, les mains contre la bouche; la clef repré-
sente un chien; le bouton du loquet et les gonds
figurent des pavots flétris, les même pavots qui
s'effeuillaient tout à l'heure dans le vase d'Émile
Galle. Mais pourquoi cette porte implacablement
close où la fillette se heurte en vain ? Est-ce ab-
sence des hôtes, insouciance, égoïsme cruel? ..
Je songe de nouveau aux poètes, à Verhaeren,
à Rodenbach, à Maeterlinck, je murmure les
vers de notre collaborateur Camille Mauclair,
dans les «Sonatines d'Automne)):
Oh! ouvre la porte ma fille,
M y a quelqu'un qui défaille!
Je ne peux pas aller voir qui c'est,
Je mets des rubans à mon corset!
L'art décoratif de M. Vallgren est donc plus
pittoresque et sentimental que pratique. Toute-
fois l'ornement, souvent extérieur à l'objet, ne
lui semble point étranger. Nous voyons qu'il s'y
rattache par de mystérieuses correspondances.
Certaines œuvres mêmes témoignent d'un rare
souci des constructions rationnelles. La chemi-
YVBTTB, FILLETTE BRETONNE
née reproduite hors texte, dans ce numéro,
nous en apporte la preuve.
Admirez les contrastes d'un
riche talent! Jamais peut-être
aucun sculpteur fiançais n'a
créé un ensemble plus simple,
plus solide, mieux équilibré
dans toutes ses parties. Les
piliers, avec leur socle et
leur couronnement, le cadre
du foyer, la haute corniche
forment une magnifique ar-
chitecture de pierre que ne
trouble pas le détail orne-
mental. De légers reliefs,
colorés discrètement aux
acides, décorent les mon-
tants; trois chardons accu-
sent le profil des chapiteaux;
dans la frise , entre des
hélianthes, les hiles-fleurs
chères à l'artiste emmêlent
leurs pas légers, et d'autres,
attentives, se penchent sur
7
«se passe quelque chose)), la gaîté ou la peine,
le bonheur, la détresse, la Destinée. Malheureu-
sement M. Gustave Soulier a décrit trop subti-
lement cette merveille pour que je puisse m'y
attarder à mon tour. Le marteau, c'est une
maigre fillette qui, par un jour d'hiver, s'accroche
désespérément au grillage ; sur la plaque de la
serrure, une autre enfant implore asile, grelot-
tante, les mains contre la bouche; la clef repré-
sente un chien; le bouton du loquet et les gonds
figurent des pavots flétris, les même pavots qui
s'effeuillaient tout à l'heure dans le vase d'Émile
Galle. Mais pourquoi cette porte implacablement
close où la fillette se heurte en vain ? Est-ce ab-
sence des hôtes, insouciance, égoïsme cruel? ..
Je songe de nouveau aux poètes, à Verhaeren,
à Rodenbach, à Maeterlinck, je murmure les
vers de notre collaborateur Camille Mauclair,
dans les «Sonatines d'Automne)):
Oh! ouvre la porte ma fille,
M y a quelqu'un qui défaille!
Je ne peux pas aller voir qui c'est,
Je mets des rubans à mon corset!
L'art décoratif de M. Vallgren est donc plus
pittoresque et sentimental que pratique. Toute-
fois l'ornement, souvent extérieur à l'objet, ne
lui semble point étranger. Nous voyons qu'il s'y
rattache par de mystérieuses correspondances.
Certaines œuvres mêmes témoignent d'un rare
souci des constructions rationnelles. La chemi-
YVBTTB, FILLETTE BRETONNE
née reproduite hors texte, dans ce numéro,
nous en apporte la preuve.
Admirez les contrastes d'un
riche talent! Jamais peut-être
aucun sculpteur fiançais n'a
créé un ensemble plus simple,
plus solide, mieux équilibré
dans toutes ses parties. Les
piliers, avec leur socle et
leur couronnement, le cadre
du foyer, la haute corniche
forment une magnifique ar-
chitecture de pierre que ne
trouble pas le détail orne-
mental. De légers reliefs,
colorés discrètement aux
acides, décorent les mon-
tants; trois chardons accu-
sent le profil des chapiteaux;
dans la frise , entre des
hélianthes, les hiles-fleurs
chères à l'artiste emmêlent
leurs pas légers, et d'autres,
attentives, se penchent sur
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