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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 4,1.1901/​1902

DOI Heft:
No.41 (Février 1902)
DOI Artikel:
Mauclair, Camille: L' œuvre d'Auguste Renoir, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.34268#0218

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L'ART DÉCORATIL


A. RENOtR
vives, tantôt verticalement, tantôt dans R
sens des modelés. Ainsi est peint le De/cnner
Jex CttHonerA, où figure une des plus admi-
rables natures mortes qu'on puisse voir dans
l'école française, ou encore la TYn Je Jé/'gM-
?zer, si large et si minutieuse, où un homme
barbu allume une cigarette avec une allu-
mette dont on voit rougir le bois, et cela
sans mesquinerie d'exécution. On ne peut
s'empêcher de songer à l'allumette jetée à
terre du GrnveMr à /'eaM-^orfe de Meissonier,
pour comparer le puéril triomphe de la pein-
ture « finie o à la vraie et franche peinture.
Dans la Loge, la facture devient beaucoup
plus large. C'est un régal de tonalités assour-
dies, de subtils ivoires, un poème de trans-
parences alternant des opacités. Ce morceau,
pour nous le plus beau qu'ait signé M. Re-
noir, égale en charme purement pictural les
plus savantes choses de Reynolds, de Gains-
borough et de Lawrence : l'exécution en est
aussi riche et aussi élégante que le sujet, on
aimerait découper un morceau de cette toile

et en examiner la matière
comme un bibelot, elle
peut donner un plaisir
analogue à ceux que
goûtent les connaisseurs
de très vieux vins ou les
amateurs de porcelaines
chinoises qui, indifférents
à leurs délicieux orne-
ments, en palpent la sur-
face en fermant les yeux.
Mais R technique du
portrait de Jenzzne éLt-
est encore diffé-
rente. Le visage, les
épaules, la gorge, les
bras, sont peints au cou-
teau à palette, les yeux,
les sourcils, la bouche,
les narines s'y inscrivent
au pinceau avec la préci-
sion des dessins japonais,
on dirait presque avec
du khôl, des cosmétiques
et un bâton de rouge, tan-
disqueles gants et la robe
sont peints en pleine
pâte. Les volants de la
robe, blanc sur blanc,
sont presque en relief.
C'est d'une exécution à la
fois étourdissante et naïve. C'est lait avec
rien, c'est une improvisation de couleurs ac-
cumulées dans une sorte d'aveu de l'artiste
qui ne sait pas imiter et qui invente,
avec une ignorance transfigurée par un
goût naïvement exquis. Il en sait peut-être
moins long, dans l'art du trompe-l'œil des
étohes, qu'un Delaunay ou un Lefebvre, mais
il va bien plus loin et bien plus haut, parce
qu'il a plus de génie que d'acquit, et que
son acquit, constamment renouvelé par la
vie, ne l'emprisonne pas dans une stérile ha-
bileté. a Chaque fois que je commence un
tableau, disait Manet, je me jette à l'eau pour,
apprendre à nager. H C'est ce que fait aussi
M. Renoir — et il apprend. Là où un prati-
cien de l'Ecole eût peint une robe, correcte
et capable de servir de modèle à une coutu-
rière, il a créé une sorte d'incrustation, de
poème de la fanfreluche soyeuse vu volup-
tueusement par un œil de peintre sensitif et ima-
ginatif, en harmonie avec la figure elle-même
de l'attachante diseuse aux pâles boucles d'or.

PORTRAtT DE SISLEY
 
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