LES PORTRAITS SCULPTÉS
DE THÉODORE SP1CER-SIMSON
T A recherche de la vérité en art exige
t ^ encore plus de tact que de science, et
plus de jugement
que de résolution
convaincue ; c'est
pourquoi nous ne
devons pas nous
étonner de voir
notre époque, tant
soucieuse de vé-
rité, commettre
un nombre si
humiliant de
fautes de goût.
Chez la plupart
des peintres, des
écrivains, des sta-
tuaires d'aujour-
d'hui, onconstatc
l'inHucnce parti-
culière d'une vie
affairée, où le re-
cueillement , la
méditation n'ont
guère de place :
des impulsions
vives, des har-
diesses, de la
violence, quelque-
fois de la force, mais point d'efforts métho-
diques et soutenus ; ils se précipitent sur le
vrai bien plus qu'ils ne vont à lui, et n'en
réalisent trop souvent qu'une image sèche et
figée, conventionneile à force d'être excessive
et instantanée. Jamais je n'ai admiré plus
complètement la sagesse ingénieuse des ar-
tistes du XVIIT siècle, si habiles à rejoindre
la vérité au détour d'une convention aimable,
qu'en voyant tant de fois l'effort irréfléchi
d'un contemporain courir tout droit à elic
et la renverser, avant de l'atteindre.
Voici pourtant un artiste d'aujourd'hui,
un moderne, un jeune, qui réussit à donner
de l'envergure et de la profondeur à la vérité,
et cela dans un genre de productions qui ne
laisse qu'un minimum de ressources à l'ima-
gination et à la recherche de l'originalité :
je veux dire !e portrait, et le portrait sculpté.
— Le fait de voir un homme, au tournant
de la trentaine, enfermer toute sa volonté,
tout son savoir, tout son acquit dans un cadre
qui peut sembler étroit, subirait à caractériser
la mentalité de cet homme, et à indiquer
ce qu'il veut et ce qu'il cherche. A la vérité,
Théodore Spicer-Simson, né au Havre,
frotté de parisianisme et d'américanisme,
est bien plutôt un observateur calme, et qui
voit juste, qu'un logicien inflexible. Il y a
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