Première année.
N° 5U
LE NUMÉRO : 15 CENTIMES
7 Avril 1888
L'ART FRANÇAIS
Jünnu j^trtiôtiquc JÜfbî>omaî)airf
Texte par Firmin Javel
Illustrations de MM. SILVESTRE & Cic, par leur procédé de Glyptographie
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
ABONNEMENTS. —• Paris : un an, 9 fr.; six mois, B francs. — Départements : un an, lO fr.; six mois, 6 francs.
SOMMAIRE
ILLUSTRATIONS : I” page : La Japonaise
aux papillons (M“* Louise Abbéma); —
2* page : L’homme an singe (Edmond
Picard) ; - 3‘ page : Au couvent (Vic-
tor Prouve).
TEXTE : il/"’ Louise Abbéma ; — Le
prochain Salon; — Echos artistiques.
Mlle Louise ABBÉMA
EXPOSITION DE Mlle LOUISE ABBÉMA
Il y a un certain courage,
de la part d’un artiste, à affron-
ter seul le jugement de la cri-
tique et celui, souvent plus
cruel, des amateurs et des
artistes ses confrères. Tel était,
il y a quinze jours, le cas de
M. Gustave Jacquet, dont les
aquarelles continuent à attirer
la foule à la galerie des artistes
modernes, 5, rue de la Paix.
Tel est aujourd’hui le cas de
M1Ie Louise Abbéma, qui a
réuni, dans l’un des salons de
M. Georges Petit, 8, rue de
Sèze, une trentaine de ta-
bleaux ou pastels, fantaisies,
paysages, marines, portraits,
etc., etc.
Mlle Louise Abbéma s’est
créé une manière toute per-
sonnelle d’interpréter les êtres
et les choses. Qu’elle ait de-
vant elle une figure ou un
arbre, elle y trouvera égale-
ment prétexte à d’intéressantes
recherches de coloration, a de
très heureuses combinaisons
de lignes, à des hardiesses de
modelé qui vous séduisent du
premier coup.
Ses portraits ont une fraî-
cheur particulière qui sied à
ravir aux images de femmes
et d’enfants, et cette même
qualité, qui est la base de sa
« manière », se retrouve dans
ses belles fleurs et dans les
fantaisies où se joue à l’aise
son imagination de poète.
Où la femme se révèle, chez
La Japonaise aux papillons.
APPARTIENT A M. DUVELLEROY
Mlle Abbéma, c’est dans ces
éventails au pastel qu’elle in-
titule : la Japonaise et le Bord
de la mer. Il y a là des exqui-
sités, des tendresses d’harmo-
nie qu’une âme féminine pou-
vait seule rêver et que, seule,
la main d’une femme pouvait
transcrire.
La Japonaise est une des
plus jolies fantaisies qui aient
jamais hanté l’esprit d’un ar-
tiste : coquettement drapée
dans une étoffe aux riches
couleurs, la japonaise , au
visage charmant de sérénité
et de grâce, s’élève dans l’es-
pace, emportée par un grand
papillon aux ailes éployées.
C’est bien là l’inconsciente
rêverie, avec son imprévu, ses
chimères et son aspiration vers
l’infini...
Cette « idée » originale a
inspiré à Mile Abbéma, non
seulement l’éventail dont nous
parions, mais encore un grand
panneau décoratif : la Japo-
naise aux papillons, qui est une
page.
La jeune artiste a rapporté
d’un séjour récent aux Petites-
Dalles toute une série d’é-
tudes et d’esquisses d’un vif
intérêt : le Sentier couvert,
Forte normande, Fin de septem-
bre, le Radeau à marée basse,
1a Falaise des Fetites-FJalles,
Chaumière normande, etc. Il
faudrait tout citer, car dans
chacune de ces petites toiles
MHe Abbéma a su trouver un
accent nouveau, un effet sai-
sissant, une note inédite. Tout
cela est d’un attrait réel, en-
core que l’artiste ne nous pa-
raisse pas toujours aussi émue
qu’elle devrait l’être en pré-
sence de la nature. Il semble
qu’elle se plaise parfois à
défier la mer, et qu’elle la
N° 5U
LE NUMÉRO : 15 CENTIMES
7 Avril 1888
L'ART FRANÇAIS
Jünnu j^trtiôtiquc JÜfbî>omaî)airf
Texte par Firmin Javel
Illustrations de MM. SILVESTRE & Cic, par leur procédé de Glyptographie
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
ABONNEMENTS. —• Paris : un an, 9 fr.; six mois, B francs. — Départements : un an, lO fr.; six mois, 6 francs.
SOMMAIRE
ILLUSTRATIONS : I” page : La Japonaise
aux papillons (M“* Louise Abbéma); —
2* page : L’homme an singe (Edmond
Picard) ; - 3‘ page : Au couvent (Vic-
tor Prouve).
TEXTE : il/"’ Louise Abbéma ; — Le
prochain Salon; — Echos artistiques.
Mlle Louise ABBÉMA
EXPOSITION DE Mlle LOUISE ABBÉMA
Il y a un certain courage,
de la part d’un artiste, à affron-
ter seul le jugement de la cri-
tique et celui, souvent plus
cruel, des amateurs et des
artistes ses confrères. Tel était,
il y a quinze jours, le cas de
M. Gustave Jacquet, dont les
aquarelles continuent à attirer
la foule à la galerie des artistes
modernes, 5, rue de la Paix.
Tel est aujourd’hui le cas de
M1Ie Louise Abbéma, qui a
réuni, dans l’un des salons de
M. Georges Petit, 8, rue de
Sèze, une trentaine de ta-
bleaux ou pastels, fantaisies,
paysages, marines, portraits,
etc., etc.
Mlle Louise Abbéma s’est
créé une manière toute per-
sonnelle d’interpréter les êtres
et les choses. Qu’elle ait de-
vant elle une figure ou un
arbre, elle y trouvera égale-
ment prétexte à d’intéressantes
recherches de coloration, a de
très heureuses combinaisons
de lignes, à des hardiesses de
modelé qui vous séduisent du
premier coup.
Ses portraits ont une fraî-
cheur particulière qui sied à
ravir aux images de femmes
et d’enfants, et cette même
qualité, qui est la base de sa
« manière », se retrouve dans
ses belles fleurs et dans les
fantaisies où se joue à l’aise
son imagination de poète.
Où la femme se révèle, chez
La Japonaise aux papillons.
APPARTIENT A M. DUVELLEROY
Mlle Abbéma, c’est dans ces
éventails au pastel qu’elle in-
titule : la Japonaise et le Bord
de la mer. Il y a là des exqui-
sités, des tendresses d’harmo-
nie qu’une âme féminine pou-
vait seule rêver et que, seule,
la main d’une femme pouvait
transcrire.
La Japonaise est une des
plus jolies fantaisies qui aient
jamais hanté l’esprit d’un ar-
tiste : coquettement drapée
dans une étoffe aux riches
couleurs, la japonaise , au
visage charmant de sérénité
et de grâce, s’élève dans l’es-
pace, emportée par un grand
papillon aux ailes éployées.
C’est bien là l’inconsciente
rêverie, avec son imprévu, ses
chimères et son aspiration vers
l’infini...
Cette « idée » originale a
inspiré à Mile Abbéma, non
seulement l’éventail dont nous
parions, mais encore un grand
panneau décoratif : la Japo-
naise aux papillons, qui est une
page.
La jeune artiste a rapporté
d’un séjour récent aux Petites-
Dalles toute une série d’é-
tudes et d’esquisses d’un vif
intérêt : le Sentier couvert,
Forte normande, Fin de septem-
bre, le Radeau à marée basse,
1a Falaise des Fetites-FJalles,
Chaumière normande, etc. Il
faudrait tout citer, car dans
chacune de ces petites toiles
MHe Abbéma a su trouver un
accent nouveau, un effet sai-
sissant, une note inédite. Tout
cela est d’un attrait réel, en-
core que l’artiste ne nous pa-
raisse pas toujours aussi émue
qu’elle devrait l’être en pré-
sence de la nature. Il semble
qu’elle se plaise parfois à
défier la mer, et qu’elle la