Deuxième année. — N° 50
LE NUMERO : 15 CENTIMES
*) Juin 1888
L’ART FRANÇAIS
jHfcnuu JUrtistiqiu J^ebïromaîiair;.
Texte par Firmin Javel
Illustrations de MM. SILVESTRE & Cie, par leur procédé de Glyptographie
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
ABONNEMENTS. - Paris : un an, 9 francs; six mois, 5 francs. — Départements : un an, ÎO francs; six mois, 6 francs.
Salon de 1888
LES RÉCOMPENSES
On trouvera plus loin la liste des récompenses décernées par-
les divers jurys du Salon.
A part quelques omis-
sions regrettables, nous
ne pouvons qu'approu-
ver l’ensemble de ce
travail , encore qu’il
nous paraisse fatalement
destiné à soulever beau-
coup de discussions, à
froisser nombre d’am-
bitions plus ou moins
légitimes, à créer, en un
mot, d’amères décep-
tions. Nous plaignons
sincèrement, pour notre
part, les artistes chargés
de procéder à cette be-
sogne, qui nous a tou-
jours semblé d’une par-
faite inutilité. Mais si
l’on admet le système
des récompenses , il
faut bien reconnaître
qu’elles n’ont pas été
trop mal distribuées
cette année.
Pour les médailles
d’honneur, il est juste
de mettre les jurys hors
de cause. On sait, en
effet, que ces médailles
sont décernées par le
suffrage des artistes ré-
compensés.
Il ne viendra à l’idée
de personne de mécon-
naître le gland talent
dont M. Edouard De-
taille a donné tant de
preuves. L’élève de M.
Meissonier, devenu un
maître à son tour, s’est
surpassé cette fois. Il
s’est élevé, il a élargi sa
manière, il s’est élancé
jusqu’aux régions
idéales explorées par les
génies, il a eu un su-
perbe coup d’aile et de
simple peintre, il s’est
affirmé comme un pen-
seur et un poète.
Le 7lève représente un régiment de lignards endormis sur le
terrain, près des fusils réunis en faisceaux. La nuit s’achève et
dans la demi-clarté de l’aube naissante, le ciel s’anime peu à
peu. De glorieuses visions, d’héroïques chevauchées le traver-
sent, où l’on distingue les drapeaux noircis, lacérés par les balles
ennemies, et flottant sur la tête des grognards de la grande ar-
mée. C’est Pâme de la patrie qui passe là-haut ! Tel est le rêve
qui lait tressaillir toutes ces poitrines, telle est la sublime vision
qui éblouit tous ces yeux fermés par le sommeil.
A coup sûr, c’est là l’œuvre maîtresse de Al. Edouard Détaillé.
Est - ce à dire que
M. Henner ou M. Roll
n’eussent pu lui être
préférés, pour ne citer
>que ces deux grands ar-
tistes ? Est-ce à dire
que AL Benjamin-Cons-
tant dût être « reporté »
encore une fois, et que
AIM. Maignan, Harpi-
gnies, Flameng n’eus-
sent point, eux aussi,
exposé chacun une page ?
Apollon , dieu des
Arts, nous garde de
nous immiscer en ces
querelles ! Ce qui doit
consoler largement les
concurrents de M. De-
taille, c’est l’éparpille-
ment des voix. Il y a eu
chaude lutte, et ce sont
là combats où les vain-
cus ne sont pas toujours
les moins glorieux.
En sculpture, les suf-
frages sont allés tout
droit à M.Turcan, l’au-
teur de ce beau groupe :
Y Aveugle et le Paralyti-
que, qui fut accueilli par
des éloges unanimes
lorsqu’il parut pour la
première lois au Salon,
sous la lorme du plâtre,
et qui nous revient cette
fois, plus noble et plus
superbe encore dans la
définitive beauté du
marbre. Ici, pas d’hési-
tation possible, et l’on
peut dire que les sculp-
teurs se sont honorés
eux-mêmes en s’accor-
dant à consacrer le mé-
rite de cette œuvre vrai-
ment exceptionnelle.
De même , tout le
monde applaudira au
choix des architectes et
des graveurs, qui ont
attribué, les premiers,
la médaille d’honneur à M. Deglane et les seconds à M. Hé-
douin.
Nous donnons aujourd’hui, outre Y Etoile du ‘Berger, de
M. Jules Breton, la reproduction des deux ouvrages de peinture
qui ont remporté les deux premières médailles décernées : la
-m
JULES BRETON.
SALON DE
188.8
3*
<*m % iiaS
ü
L’Étoih du cBe
mer.
LE NUMERO : 15 CENTIMES
*) Juin 1888
L’ART FRANÇAIS
jHfcnuu JUrtistiqiu J^ebïromaîiair;.
Texte par Firmin Javel
Illustrations de MM. SILVESTRE & Cie, par leur procédé de Glyptographie
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
ABONNEMENTS. - Paris : un an, 9 francs; six mois, 5 francs. — Départements : un an, ÎO francs; six mois, 6 francs.
Salon de 1888
LES RÉCOMPENSES
On trouvera plus loin la liste des récompenses décernées par-
les divers jurys du Salon.
A part quelques omis-
sions regrettables, nous
ne pouvons qu'approu-
ver l’ensemble de ce
travail , encore qu’il
nous paraisse fatalement
destiné à soulever beau-
coup de discussions, à
froisser nombre d’am-
bitions plus ou moins
légitimes, à créer, en un
mot, d’amères décep-
tions. Nous plaignons
sincèrement, pour notre
part, les artistes chargés
de procéder à cette be-
sogne, qui nous a tou-
jours semblé d’une par-
faite inutilité. Mais si
l’on admet le système
des récompenses , il
faut bien reconnaître
qu’elles n’ont pas été
trop mal distribuées
cette année.
Pour les médailles
d’honneur, il est juste
de mettre les jurys hors
de cause. On sait, en
effet, que ces médailles
sont décernées par le
suffrage des artistes ré-
compensés.
Il ne viendra à l’idée
de personne de mécon-
naître le gland talent
dont M. Edouard De-
taille a donné tant de
preuves. L’élève de M.
Meissonier, devenu un
maître à son tour, s’est
surpassé cette fois. Il
s’est élevé, il a élargi sa
manière, il s’est élancé
jusqu’aux régions
idéales explorées par les
génies, il a eu un su-
perbe coup d’aile et de
simple peintre, il s’est
affirmé comme un pen-
seur et un poète.
Le 7lève représente un régiment de lignards endormis sur le
terrain, près des fusils réunis en faisceaux. La nuit s’achève et
dans la demi-clarté de l’aube naissante, le ciel s’anime peu à
peu. De glorieuses visions, d’héroïques chevauchées le traver-
sent, où l’on distingue les drapeaux noircis, lacérés par les balles
ennemies, et flottant sur la tête des grognards de la grande ar-
mée. C’est Pâme de la patrie qui passe là-haut ! Tel est le rêve
qui lait tressaillir toutes ces poitrines, telle est la sublime vision
qui éblouit tous ces yeux fermés par le sommeil.
A coup sûr, c’est là l’œuvre maîtresse de Al. Edouard Détaillé.
Est - ce à dire que
M. Henner ou M. Roll
n’eussent pu lui être
préférés, pour ne citer
>que ces deux grands ar-
tistes ? Est-ce à dire
que AL Benjamin-Cons-
tant dût être « reporté »
encore une fois, et que
AIM. Maignan, Harpi-
gnies, Flameng n’eus-
sent point, eux aussi,
exposé chacun une page ?
Apollon , dieu des
Arts, nous garde de
nous immiscer en ces
querelles ! Ce qui doit
consoler largement les
concurrents de M. De-
taille, c’est l’éparpille-
ment des voix. Il y a eu
chaude lutte, et ce sont
là combats où les vain-
cus ne sont pas toujours
les moins glorieux.
En sculpture, les suf-
frages sont allés tout
droit à M.Turcan, l’au-
teur de ce beau groupe :
Y Aveugle et le Paralyti-
que, qui fut accueilli par
des éloges unanimes
lorsqu’il parut pour la
première lois au Salon,
sous la lorme du plâtre,
et qui nous revient cette
fois, plus noble et plus
superbe encore dans la
définitive beauté du
marbre. Ici, pas d’hési-
tation possible, et l’on
peut dire que les sculp-
teurs se sont honorés
eux-mêmes en s’accor-
dant à consacrer le mé-
rite de cette œuvre vrai-
ment exceptionnelle.
De même , tout le
monde applaudira au
choix des architectes et
des graveurs, qui ont
attribué, les premiers,
la médaille d’honneur à M. Deglane et les seconds à M. Hé-
douin.
Nous donnons aujourd’hui, outre Y Etoile du ‘Berger, de
M. Jules Breton, la reproduction des deux ouvrages de peinture
qui ont remporté les deux premières médailles décernées : la
-m
JULES BRETON.
SALON DE
188.8
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L’Étoih du cBe
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