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L’ART FRANÇAIS

AU CERCLE VOLNEY

L’exposhion annuelle du cercle de la rue Volney s'est ouverte
lundi.

C’est la première de ces manifestations artistiques qui sont si
courues et qui servent en quelque sorte de préface au Salon.
Après celle-ci, consacrée à la peinture et à la sculpture, viendra
l’exposition des dessins, également dans la galerie de la rue
Volney.

Nous serons, à peu près en même temps, conviés à l’exposi-
tion des Aquarellistes, qui sera suivie de celle des Pastellistes, rue
de Sèzc.

Nous aurons ensuite à visiter l’exposition de peinture, sculp-
ture et dessins du cercle de la rue Boissy-d’Anglas, et il ne nous
restera plus qu’à traverser deux ou trois autres expositions par-
tielles pour arriver aux deux Salons officiels, celui de la Société
des artistes et celui de la Société nationale des Beaux-Arts.

Pour le moment, nous n’avons qu’à nous occuper des ouvra-
ges de peinture exposés rue Volney.

Comme toujours, nous sommes en présence d’un petit nom-
bre de toiles, — nous passons, bien entendu, sous silence les
inévitables envois d’amateurs qui « garnissent » le haut des
murailles — et il nous est agréable de constater une fois de plus
que chacun des artistes sociétaires a réservé à cette exposition une
ou deux œuvres de choix. Ce n’est parfois qu’une ébauche un
peu poussée. Mais cette ébauche présente tout l’intérêt d’un
tableau. C’est le plus souvent, une étude'faite dans l’intimité de
l’atelier, le portrait d’un ami, portrait enlevé de verve en quel-
ques séances de bonne causerie. C’est un coin de nature dont
l’aspect a vivement impressionné le paysagiste, et que ce dernier
a évoqué, restitué cordialement. C’est une scène de genre, sur-
prise dans un salon ou dans la rue, et racontée avec autant
d’esprit que de concision.

Toutefois, quelques portraitistes se distir menty' ici, par le
soin qu’ils apportent dans l’exécution de le-ufs ouvrages, et il est
certain que rien n’est inachevé dans les envois de MM. Elie
Delaunay, J.-J. Weerts, Carolus-Duran, Doucet, Giacomotti,
Emile Lévy, Lobrichon, Toulmouche, Gustave Courtois, tandis
que M. Bonnat s’est contenté d’indiquer d’un frottis sommaire le
fond de son superbe ‘Portrait de M. Harpignies. Le vieux silvain,
comme l’appelait Edmond About, est représenté de profil, la tète
rejetée un peu en arrière, le regard fixé sur quelque chêne invisi-
ble que l’éminent paysagiste semble étudier avec une attention
passionnée.

M. Elie Delaunay a donné à son grand portrait d’homme une
attitude de rêverie souriante, qui révèle tout un caractère. L’au-
tre portrait du maître, pour représenter un homme plus grave,
n’en est pas moins d’un puissant intérêt artistique.

M. J.-J. Weerts, dont j’ai eu souvent l’occasion de signaler les
remarquables toiles, envoie deux petits portraits, celui de M. X.
et celui de M. F. J. Chacun d’eux est traité dans une manière
appropriée au caractère de i’original. Pour ma part, je suis très
embarrassé de dire œ que je pense de celui de ces portraits qui
représente M. F. J., et je me borne à féliciter une fois de plus
l’éminent artiste, car ses deux nouveaux portraits seront certai-
nement parmi les plus appréciés du public amateur.

Je dois noter encore M. Gustave Courtois, un charmant
talent; M. Maurice Desvallières, un jeune qui a déjà fait ses
preuves ; M. Carolus-Duran, dont le T or trait de. maître Démangé
est « parlant»; MM. Bridgman, Toulmouche, Giacomotti,Lobri-
chon, Emile Lévy, qui expose un élégant petit portrait d’homme
en pied ; — et M. A. de Curzon — qui se révèle portraitiste.

Le paysage et la peinture d’animaux sont représentés par
MM. Félix de Vuillefroy, Barau, Vavson, Montenard, Damoye,
Edmond Yon, Vallois, Tancrèdé Abraham, Adolphe Guillon,
Maurice Eliot, Charnay, Grandjean, Monginot, Nozal, et la
marine par M. Auguste Flameng. C’est assez dire que la nature
est étudiée ici dans ses effets les plus divers.

f es vaches de M. de Vuillefroy prennent un caractère fanto-
matique; parce que le maître s’est plu à nous les montrer en pleine
mit dans la liberté des champs déserts où elles reposent leurs
masses pesantes, sous un ciel embarrassé de nuages noirs, que la
lune troue de son disque d’argent. M. de Vuillefroy, dont nous

ns suivi les travaux avec le plus vif intérêt, depuis l’époque

de ses brillants débuts, n’a jamais atteint à plus de maîtrise que
dans cette petite toile extrêmement curieuse, d’un effet absolu-
ment neuf.

M. Vayson, outre Une jeune fille faisant boire un veau, char-
mante petite scène de genre, expose une autre toile qui rappelle
les jolies descriptions de la Sologne par M. Jules Mary.

M. Barau est extrêmement hardi, et sa hardiesse vous touche
et lui conquiert immédiatement votre estime.

M. Valois est original; il est ému, visiblement, en face d’un
bois ou d’un village qui se profilent à l’horizon.

^ A ne considérer que leurs présents ouvrages, MM. Bouguereau,
Carolus-Duran, Dinet, Raphaël Collin, Louis Deschamps, Paul
Tillier, Bergeret, Monginot, Pasini, Beyle, Saintpierre, Werthei-
mer, Toulmouche, Ch. Thomas, Chalon, José Frappa, et quel-
ques autres artistes pourraient être classés parmi les peintres de-
genre, c’est à dire parmi les observateurs de la vie moderne.
Ainsi M. Bouguereau a résumé toutes ses qualités d’impeccable
facture dans cette Elude de jeune fille qui me paraît destinée à être-
plus d une fois gravée ou lithographiée, et que nous sommes
heureux de faire, dès aujourd’hui, connaître aux lecteurs de
Y Art français.

M. Carolus Duran nous semble avoir traité un peu sommai-
rement la tète de sa Madeleine, dont le torse nu est une merveille
de modelé.

M Dinet est fidèle à ces types africains qui lui ont valu déjà
de si beaux succès. Le Combat autour d’un sou à Laghouai est un
des bons tableaux, des mieux venus sous le rapport du mouve-
ment et de la chaleur, que le jeune peintre ait signés.

Le dessin très pur, de la figure de femme exposée par
M. Raphaël Collin.

M. Louis Deschamps a-t-il voulu nous montrer la vierge-
mère Pou n’a-t-il pensé qu’à une jeune femme jouant avec son
enfant ? Toujours est-il qu’une grande sincérité se dégage de sa
composition.

Il est malaisé de dire si M. Monginot doit être classé ici parmi
les peintres de nature morte ou parmi les peintres de genre, mais
ce qui est certain, c’est que ses deux toiles sont d'un beau senti-
ment décoratif. J’aime surtout celle qui pourrait être intitulée:
le Triomphe du lapin : sur un radeau improvisé, remorqué par un
canard qui serre un fil dans son bec, un lapin se prélasse tandis
que deux martins pêcheurs, posés sur des roseaux, regardent
philosophiquement passer surl’étang cette embarcation singulière.

M. Pasini est un paysagiste d un immense talent, et c’est en
même temps un orientaliste et un peintre de genre.

M. Ch. Thomas, dans un Intérieur d’église, demeure le coloriste-
opulent que nous ont révélé ses magnifiques études de fleurs.

M. José Frappa est toujours spirituel, M. Chalon toujours
étrange, M. Beyle toujours sincèrement épris de ses types habi-
tuels de gens de mer, M. Saintpierre toujours fantaisiste,gracieux,
élégant, M. Wertheimer en quête de belles silhouettes d’animaux,
et M. Toulmouche demeure le peintre attitré des élégances
parisiennes.

Quelques jolis envois de sculpture complètent cet intéressant
« petit Salon >», ou, à côté des talents arrivés — les Bouguereau,
Bonnat, de Vuillefroy, Weerts, Carolus-Duran, Elie Delaunay,
Valadon, Montenard, Yon, Louis Deschamps, etc. on trouve des
œuvres signées : Emile Barau, Charles Valois, Maurice Eliot,
Desvallières, etc., c’est à dire signées de noms encore peu connus
aujourd’hui, mais qui seront célèbres demain.

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LA SCISSION DE LA SOCIÉTÉ DES ARTISTES

Nous n’avons pu qu’annoncer en quelques mots, dans notre dernier
numéro, la création de la Société nationale des Beaux-Arts, présidée par
M. Meissonier, et qui compte parmi ses membres fondateur» : MM. Puvis
de Chavannes, DagnamBouveret, Dalou, Besnard, Galland, Gervex, Roll,
Cazin, Bracquemond, Wçltner, etc.

L’espace nous manque, cette fois encore pour décrire ici toutes les phases
de cette création. Disons seulement que le prochain Salon de la Société-
Nationale ouvrira le 15 mai 1890 au Palais des beaux-arts du Champ de mars,
et qu’il durera un mois.

De leur côté, les sections de peinture et de sculpture dé la Société des
Artistes français vient d’adopter le principe du roulement pour la formation
du jury.

U (a1 runt : SII.VKSTHK

ATLlyptnjjraitliiu SiLVESTHE & Oie, rue Oüerkampf, ‘J7,
 
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