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L’ART FRANÇAIS

Si le tableau du Vésinet était un Rembrandt, il serait certainement cata-
logué quelque part, l’œuvre d’un tel maître est connue dans son entier.

— Mais il est daté de 1656, année où Rembrandt était — tout le monde
le sait, — littéralement traqué par ses créanciers ; n’aurait-il pu vendre quasi
secrètement cette toile de la main à la main ?

— Eh ! depuis deux cent cinquante ans qu’il existe, il aurait bien changé
de propriétaire ; il aurait paru dans quelques ventes. Je possède une biblio-
thèque spéciale bien complète. Nulle part, il ne se trouve un mot sur ce
tableau.

— Mais, à votre avis et toute question d’authenticité laissée de côté, le
tableau est-il bon ?

— C’est une bonne chose. Quant à être un Rembrandt, non, ce n’en est
pas un.

Cet expert n’est donc plus tout à fait l’étourneau que l’on
voulait bien dire tout d’abord. Il a son opinion, il ne croit pas à
l’authenticité du tableau ! C’est son droit.

Nous avons consulté, à ce sujet, un de nos plus grands pein-
tres, portraitiste brillant, membre de l’Institut, fanatique de
Rembrandt et dont l’opinion e'n de telles matières fait « auto-
rité ». Or, cet artiste nous a déclaré que l'Abraham recevant les
Anges était loin d’être un Rembrandt de premier ordre. Selon
lui, il se peut que cette peinture soit l’œuvre du maître, mais
elle est d’ordre inférieur.

Nous avons parlé de M. Paul Mantz. Voici quelques lignes de
son dithyrambe :

Nous avons vu ce tableau, et c’est tout simplement une merveille.

Au centre de la composition, le patriarche, somptueusement vêtu, est assis,
remerciant le ciel et bénissant les mets qu’un serviteur vient de déposer sur
la table. A droite et à gauche, les deux invités qui sont, non des pèlerins,
mais des anges ; sur le premier plan, le serviteur, vu de dos, un peu penché
et attentif aux paroles du maître de la maison. Figures à mi-corps, de gran^
deur naturelle. La signature, tout à fait triomphante, est dans le haut de la
toile, à gauche.

Cette peinture superbe ajoute quelque chose à ce que nous savions de
Rembrandt. Pour 1656, année difficile entre toutes, puisque c’est au mois
de juin que le grand peintre connut les ennuis de la saisie et les fatalités de
la procédure, on sait assez bien où en était Rembrandt au point de vue de
son idéal particulier et de sa technique. Il a pu recevoir la fâcheuse visite
des huissiers dépêchés par la chambre des insolvables, il a eu la douleur de
les voir procéder à l’inventaire de son atelier, mais il restait calme dans la
tempête, et il était plus fort, plus maître que jamais. On le voit par le tableau
du musée de Cassel, « Jacob bénissant les fils de Joseph », par le portrait du
docteur Arnoldus Tholinx (chez M. Edouard André), par un admirable por-
trait de femme du musée de l’Ermitage, et même par un paysage qui est à
Brunswick. En cette année 1656, attristée par la déconfiture, Rembrandt
a une vaillance de travail, une générosité de pinceau que lui seul a connues.

11 semble que la calamité financière lui soit un excitant. Il ne fait pas d'éco-
nomies sur les matières ; il emploie beaucoup de couleur, et il proteste par
avance contre les procédés avares des peintres timides et indigents. Ici, trai-
tant, dans « Abraham recevant les anges », un sujet biblique et qui le tou-
chait au cœur, il s’est modéré, du moins dans les visages, et il a cherché le
sentiment intime plus que la peinture exhubérante et à forte saillies. Il est
toujours brave, mais il est sage. La tête d’Abraham est peinte avec un soin
merveilleux, avec une unité de pâte, une caresse de modelé qui font plaisir
à voir. L’expression du patriarche bénissant et accomplissant une fonction
sainte est absolument religieuse et.respire une conviction profonde. La foi se
mêle à la tendresse dans cette prière qui monte de l’âme aux lèvres. Comme
nous l’avons dit, Abraham est au milieu du tableau et concentre toute la lu-
mière sur son visage et sur son vêtement qu’illumine une belle note d’un
blanc légèrement doré. Les autres personnages, très beaux aussi et très sé-
rieux, sont dans le demi-teinte. Tout est peint avec la plus grande vigilance
et sans fièvre. Les virtuosités du pinceau ne s’affirment que dans les acces-
soires, les plumes des ailes d’un des anges et aussi les mets et les ustensiles
déposés sur la table, le plat d’argent où est placé le quartier de viande, une
gouade en grès brun, qui est le triomphe de la technique et qui a dû en-
chanter le fin connaisseur Vollon. Il y a aussi quelques empâtements ou
quelques épaisseurs discrètes dans la barbe du patriarche, et cette barbe est
à elle seule un chef-d’œuvre de peinture.

A notre tour, nous avons voulu voir cette toile sensationelle,
et nous sommes absolument de l’avis — non pas de l’enthou-
siaste M. Mantz ! — mais du peintre éminent dont nous avons
pu contrôler l’appréciation tout à notre aise. Certes, on retrouve
ça et là, dans cette peinture, les magiques artifices du maître Hol-
landais. Mais les figures manquent, pour la plupart, d’affirmation

et de caractère. La nature morte est admirablement traitée et a
pu enchanter M. Vollon, mais l’expression des anges n’est ni hu-
maine, ni divine. En somme, Rembrandt peut-être, mais Rem-
brandt médiocre et nullement comparable aux chefs d’œuvre que
nous possédons du peintre de la Bethsabé.

Mercredi dernier a eu lieu la célébration du mariage de
M. Jules Silvestre, co-directeur de Y%Art Français et de la Revue
des Musées, avec Mlle Adrienne Didier, fille de l’éminent graveur,
M. A. Didier.

Les témoins du marié étaient MM. Jules Chapon, directeur
de la Fetite Gironde, et F. Javel, rédacteur en chef de la Revue
des Musées et de 1’*Art Français. Ceux de la mariée, MM. Lay-
raud, artiste peintre, et le docteur Piberet. Nous adressons ici
nos plus sincères félicitations aux jeunes époux.

-- ^-

Jachos ^Artistiques

L’inauguration du monument de Paul Baudry a eu lieu, au Père-la-Chaisc,
la semaine dernière. Dix allocutions ont été prononcées par MM. Bouguereau,
Meissonier, Larroumet, Charles Garnier, Emile Richard, etc.

On sait que le monument est l’œuvre de MM. Paul Dubois et Antonin
Mercié, statuaires, et Ambroise Baudrv, architecte.

X

M. Bernard a adressé la lettre suivante à M. le Préfet de la Seine :


Par votre lettre du 5 février courant, en réponse à ma demande du 14 novembre
dernier, vous me faites l’honneur de m’informer que je suis autorisé à occuper le Pa-
villon de la Ville de Paris, du 11 juin au 10 juillet, pour organiser l'Exposition annuelle
de Bhine et cHJoir.

J’ai le regret de ne pouvoir accepter ce local à la date que vous voulez bien m’in-
diquer.

J’avais fait ma demande pour les mois de mars et d’avril parce que cette date est, à
mon avis, la meilleure pour cette Exposition qui peut être considérée comme un pré-
lude du Salon.

Faire cette Exposition pendant ou aussitôt après le Salon serait vouloir lui enlever
toutes chances de réussite et compromettre les nombreux intérêts qui me sont confiés.

La troisième Exposition comptait plus de 2,000 exposants, presque tous les journaux
illustrés et un certain nombre d’Ecoles de dessin.

Celle de cette année promettait d’étre plus importante encore, plusieurs Sociétés
m’ayant demandé à en faire partie, mais elle 11e peut avoir lieu.

Tout le monde sait ce que m’ont coûté les trois premières Expositions et ce 11’est
qu’encouragé par l'élite des artistes qui composent !e jury, et dans un intérêt général,
pour continuer à soutenir une idée répondant à un besoin, que je viens vous demander,
Monsieur le Préfet, de bien vouloir m’accorder ce même local pendant les mois d’oc-
tobre et novembre de cette année, ne pouvant l’accepter pour les mois de juin et
juillet.

Dans l’espoir d’une réponse favorable, j’ai l’honneur d'être, etc.

E. Bernard.

L’Exposition de « Blanc et Noir » n’aura donc pas lieu, comme il avait été
annoncé, du 11 juin au 10 juillet.

Ajoutons que le Pavillon de la Ville de Paris sera occupé, du 20 mars à la
fin d’avril, par la Société des Artistes Indépendants.

Nous sommes certains que M. le Préfet de la Seine, à moins d’empêche-
ments imprévus, fera droit à la demande de M. Bernard.

Le Gérant : SILVESTRE

Paris. — Glyptographic SILVESTRE i. Cie, rue Oberkampf, 97.
 
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