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L' art ornemental: revue hebdomadaire illustrée — 1.1883

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Nr. 28 (11 Août 1883)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19485#0137

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I 10

L'ART ORNEMENTAL.

devant. Les queues de poisson qui terminaient leurs corps s'entremêlaient
gracieusement. L'Océan était assis sur ce groupe, dans une attitude remplie
de fierté. Une foule de poissons et d'autres animaux marins nageaient
autour de lui et fendaient des vagues recouvertes d'un émail exactement
de la couleur de l'eau. La Terre, sous les traits d'une belle femme nue,
tenait de la main droite une corne d'abondance et de la gauche un petit
temple d'ordre ionique, délicatement ciselé, propre à renfermer le poivre.
Au-dessous de cette figure étaient rassemblés les plus beaux animaux que
produise la terre. Une partie des rochers qui se trouvaient près d'elle

était émaillée : j'avais laissé l'autre en or. Ce groupe était encastré dans
une base d'ébène, dans l'épaisseur de laquelle j'avais ménagé une doucine
ornée de quatre figurines d'or en demi-relief. Elles représentaient la Nuit,
le Jour, le Crépuscule et l'Aurore, et étaient séparées l'une de l'autre par
les Quatre Vents principaux, ciselés et émaillés avec tout le soin imagi-
nable. Quand je mis cette salière devant les yeux du roi, il poussa un grand
cri d'étonnement et ne put se lasser de la contempler. Il m'ordonna ensuite
de la garder chez moi jusqu'à ce qu'il me dît ce que je devais en faire. Je
la remportai donc. J'invitai de suite plusieurs de mes amis à un dîner qui

fut des plus gais et où la salière figura au milieu de la table ; nous fûmes
les premiers à nous en servir. »

La salière fut appréciée par le roi comme elle le méritait : c'est en
effet une œuvre tout à fait hors ligne comme exécution, sinon au point de
vue de la disposition.

Cellini avait mené ce travail de front avec le grand modèle d'un
Jupiter qui lui avait été commandé. Dès qu'il l'eut terminé il résolut de le
couler en bronze; mais comme c'était un essai absolument nouveau pour
lui, il fit un marché avec des maîtres fondeurs parisiens qui s'engagèrent

sous leur responsabilité à lui livrer sa statue en bon état. Cependant,
quand il les vit à l'œuvre, il leur fit quelques observations que les fondeurs
reçurent assez mal. Cellini ne voulut pas les arrêter, mais il se mit à com-
poser deux têtes colossales, les fondit lui-même et les réussit, affirmant
sa supériorité en cela comme en tout autre chose.

Cellini termina promptement son Jupiter pour lequel il fit un piédestal
orné de deux bas-reliefs, représentant d'un côté Léda avec le cygne, de
l'autre l'Enlèvement de Ganymède. Puis il s'occupa de la décoration du
château de Fontainebleau. Commençant par la porte, il exécuta, sur le

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Coupe en cristal de roche gravé, avec monture en or emaille.
Travail italien du xvi" siècle. — Dessin de H. Toussaint.

désir manifesté par le roi, la Nymphe de Fontainebleau qui est aujourd'hui
au Louvre. Il fit en même temps un projet de fontaine pour le même
palais. Aux quatre angles du bassin, il avait placé des figures personnifiant
la Science des lettres, l'Art du dessin, la Musique et la Libéralité royale
sans laquelle les autres ne sauraient exister. L'édifice devait être couronné
par une grande figure du dieu, mais sous les traits de François Ier. Le roi,
ravi de ce projet, envoya à Cellini des lettres de naturalisation avec le titre
de seigneur du Petit-Nesle, où il demeurait. Cette haute faveur ne garantit
pas Cellini des effets de la haine de la duchesse d'Étampes. Elle lui
opposa Primatice qui arrivait d'Italie et l'irritable Florentin ne vainquit
cette concurrence redoutable qu'en menaçant son concurrent de mort.
Primatice, fort effrayé, se fit envoyer en mission en Italie, mais son départ
n'eut d'autre résultat que d'irriter davantage les ennemis de notre statuaire

et particulièrement la duchesse d'Étampes, qui lui fit la vie tellement
insupportable qu'il se vit forcé de quitter la France et de retourner à
Florence.

Nous suivrons Cellini, dans un prochain numéro, au milieu de cette
troisième phase de son existence.

PETITE CHRONIQUE

— L'inauguration du monument la Défense de Paris, de M. Bardas,
est fixée.au 12 août. M. Jules Ferry présidera.
 
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