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L' art pour tous: encyclopédie de l'art industriel et décoratif — 44.1905

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https://doi.org/10.11588/diglit.22779#0042
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L'ART POVR TOVS

22

Pour le XIVe siècle, Montfaucon nous a laissé, dans ses
papiers, le dessin d'une cloche de l'église de Mende, laquelle
fut commencée par le pape Urbain V, en 1368 ; les dimen-
sions de cette cloche étaient consi-
dérables : 3 mètres de diamètre et
2m60 de haut, le battant seul ayant
2 mètres. Le diamètre inférieur des
cloches s'évase souvent davantage
à la fin du XIVe siècle, pour consti-
tuer un type définitif. Quant aux
clochettes à main, elles acquièrent
quelquefois alors un grand prix ; on
lit, en effet, dans l'inventaire de
Charles V, en 1379 : « Une clochéte

d'or dont le tenon est une fleur de
Amiens, AlIP siècle.

hz et pesé à tout le battant un marc
une once. » Dans le manuscrit de la Bibliothèque nationale
intitulé Spéculum humanœ consola lionis, on voit un per-
sonnage qui tinte vigoureusement une sonnette à large
panse et de petite hauteur.

On a cru, mal à propos, que l'invention des carillons ne
remontait qu'au XVe siècle. Ce n'est pas sortir de notre
sujet que de dire un mot de ces instruments. Le plus ancien
n'est pas, comme on l'a dit, celui d'Alost en Flandre, qui
fut installé en 1487 ; on voit par une chronique que, au
commencement du XIVe siècle, des carillons de clocher
jouaient des hymnes d'église ; ainsi le carillon de Sainte-
Catherine-lez-Rouen jouait l'hymne Conditor aime siderum.
Mais la véritable origine des carillons est beaucoup plus
ancienne ; nous savons qu'il y avait déjà à l'époque romane
des roues garnies de sonnettes qu'on faisait tourner en
frappant les timbres à coups de maillet ; cette manière de
musique, si nous acceptons le témoignage des miniatures,
semble avoir eu sa principale vogue pendant les XIIIe et
XIVe siècles. Les cloches, rangées selon l'ordre des timbres,
sont tantôt placées sur une tige horizontale et tantôt sur la
roue. On ne peut dire s'il s'agit d'un carillon proprement
dit dans la miniature d'un manuscrit de la bibliothèque de
Troyes que nous reproduisons ci-contre ; la cloche, unique,
semble-t-il, et commandée par une roue, devait servir plutôt
à annoncer les divers moments de l'office. Pour les roues
sonores nous citerons un bas-relief d'Orvieto et une minia-
ture de la Bibliothèque nationale. Les édicules qui les
abritent sont quelquefois très élégants. Les roues se meu-
vent verticalement ; sur un bréviaire de la Bibliothèque de
Bruxelles, nous en trouvons une en or roulant sur un plan
horizontal et soutenant sur son pourtour une suite de cloches
en bronze.

Dans un dessin de miniature inachevée existant dans les
papiers de Montfaucon et qui est resté au trait, on voit
deux personnages assis, munis chacun d'un marteau et
faisant résonner un jeu de quatre cloches suspendues hori-
zontalement entre eux. Mais déjà au XIV6 siècle on était
plus savant ; un manuscrit de Bruxelles figure un agence-
ment complet où les marteaux sont indépendants de la
main humaine et doivent obéir aux notes d'un clavier. Du
reste, nombreux sont les monuments de la peinture et de la

sculpture où les cloches et leurs usages sont représentés
avec fidélité. On voit une fois de plus, par là, quelle énorme
importance elles avaient au moyen âge. Pour ne citer qu'un
document, il existe à Jouarre une dalle funéraire sur laquelle
est figuré un sonneur et où l'on voit la manière de sus-
pendre les cloches à cette époque. Toute la partie supé-
rieure du monument représente un clocher flanqué de
quatre clochetons ; les cordes des cloches passent à travers
les voûtes ogivales de l'église.

Pour en revenir aux cloches elles-mêmes, Sauvageot en
cite une qui, d'un siècle postérieure à celle de Moissac, n'a
pas la pureté de forme de cette dernière. La cloche en
question se voit dans une riche lanterne ajoutée, vers 1520,
à l'une des tours de la cathédrale de Sens, et elle sert de
timbre à l'horloge, cloche et horloge ayant été placées,
en décembre 1377, par Pierre Mellin, horlogeur du roi.
Charles V voulut donner pour cela une somme de 500 francs
d'or et l'inscription dudit timbre nous apprend que le roi
fut parrain de l'instrument :

+ CHARLES A Y NOM POVR LE ROY DE FRANCE VII-M
ET PLVS POISE EN BALANCE LES BOURGEOIS DE SENS
M'ONT FAIT FAIRE L'AN MCCCLXXVI EN CEST
ORLOGE JE SVIS MISE DE LEVR CHATEL A LEVR
DEVISE + NOMEN VIRGINEVM DICO MARIA

La cloche a lm52 de diamètre ; l'inscription est en carac-
tères fort beaux. Tout auprès de ce gros et grave instru-
ment, il y en a deux autres plus petits, fondus
presque en même temps, par Jean Jouvente
(1367). C'est le cas de rappeler ici que Sens
passait jadis pour posséder la plus remarquable,
la plus ancienne et la plus harmonieuse sonnerie
de France. Une légende intéressante, à laquelle
nous avons déjà fait allusion, se rattache même
à l'une de ses cloches. En 613, Clotaire II, roi
de Soissons, voulant s'emparer des états de
Thierry II, roi de Bourgogne, qui venait de
mourir, envoya une armée pour attaquer Sens.
Saint Loup entra alors dans son église et fit
sonner la cloche Marie, pour appeler les fidèles
à la prière. Les ennemis, dont les oreilles n'é-
taient pas faites au bruit d'une cloche si grosse, Manuscrit

r & ' de la

furent saisis d une terreur subite et se retirèrent bibliothèque

aussitôt. Mais, quelque temps après, Clotaire xv^sîecle
s'étant rendu maître de Sens, fit enlever la
cloche qui précédemment avait épouvanté ses troupes et la
fit transporter dans son palais de Paris, où, selon la chro-
nique, elle arriva en ayant perdu toute sa voix. Devenue
inutile, Clotaire la renvoya à Sens et elle y recouvra le son.
Plusieurs fois refondue depuis l'année 613, cette cloche
l'aurait été une dernière fois en 1524 ; puis elle fut fêlée en
1792 et descendue alors de la tour de plomb qui la conte-
nait. Transportée à Paris avec d'autres cloches sénonaises,
on en fit des canons ou des sous.

Comme types de cloches du XIVe siècle, nous donnons
encore une cloche de Milan, de 1352 ( W), œuvre de maître
Ambroise de Colderariis, cloche historique qui sonna à
 
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