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L' art pour tous: encyclopédie de l'art industriel et décoratif — 44.1905

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No. 10
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https://doi.org/10.11588/diglit.22779#0064
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L'ART POVR TOVS

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métaux au XIe siècle, pour fabriquer les crosses, soit que
ces dernières aient péri davantage, nous ne pourrions en
citer beaucoup en métal. On découvrit, à Angers, dans
l'église de Toussaint, une crosse de bronze doré qui était
enfermée dans un tombeau, et qu'on a attribuée à la fin du
XI" siècle, mais qui est peut-être plus récente ; dans la volute
est une tête de dragon ailé mordant une croix ; le nœud est
orné d'une bague de perles, la douille d'une bague légère-
ment ciselée. Elle est longue de lm77, la crosse de 0m22 ; on
l'a depuis déposée au musée. A Fécamp, dans le tombeau
de Guillaume II, qui vivait au XIe siècle, on découvrit une
crosse plus simple avec volute, nœud et douille conique.
Le musée de Dijon possède une crosse qu'on fait remonter
au XIe siècle, et à saint Robert, abbé de Cîteaux, mais les
filigranes dont elle est ornée me paraissent d'un âge infé-
rieur ; au centre de la volute, elle montre une tête de dragon.
En 1868, on trouva à Chartres, dans l'église abbatiale de
Saint-Père-en-Vallée, un pommeau et une pointe de crosse
en cuivre doré ; la volute avait disparu, elle devait être en
ivoire ; nous ne pouvons donc la classer parmi celles en
bronze.

Il nous reste encore, pour le XIe siècle, à citer quelques
images que nous conservent les vieux manuscrits. Les minia-
tures de la vie de saint Aubin nous montrent une crosse
d'or assez longue, nouée et munie d'une petite volute. Au
British Muséum, une crosse avec volute, nœud et douille est
peinte en noir ; je la crois prise dans une corne de bélier,
car la hampe plus étroite s'y encastre comme cela devait
être facile dans le creux de la corne. Un bas-relief de Saint-
Vincent, à Digne, nous fournit la représentation d'une crosse
avec volute et nœud. Une miniature de la bibliothèque
d'Avranches représente un abbé avec sa crosse, laquelle,
doublement nouée, nous offre une volute peu développée.
Au XIe siècle, le bâton abbatial s'appelait aussi « la crosse »,
comme on peut le voir dans une charte de 1026, citée par
Du Cange : Quod cura ipso baculo abbatis, qui crocia
dicitur factum est.

La question des crosses abbatiales nous amène à parler
de l'idée qu'en ont eue plusieurs auteurs, soutenant que les
abbés tournaient intérieurement la volute de leur crosse
pour montrer que leur juridiction s'arrêtait aux limites du
monastère, au lieu que les évêques, qui en possédaient une
beaucoup plus vaste que la leur, la tournaient vers le
dehors. Les monuments ne permettent pas d'accepter cette
assertion que le bon sens suffirait à écarter a priori, car,
pour maintenir la crosse dans la position hiérarchique
exigée ainsi, il faudrait supposer de la part du prélat une
attention soutenue et quasi impossible au milieu d'une céré-
monie religieuse.

On peut dire que, pendant les XIe, XIIe et XIIIe siècles, la
direction de la volute des crosses n'est soumise à aucune
règle sur les effigies des évêques de ce temps. Témoin des
sceaux de Tours (1005-1023), des miniatures du XIe siècle
de la Bibliothèque nationale, un sceau d'Orléans (1114), de
Tours (1136), de Paris (1140), de Chartres (1155), de Bayeux
(1164), de Sens (1169), d'Avranches (1171), de Rouen (1175),
de Langres (1179), de Coutances (1184), de Thérouanne

(1184), de Cant (Angleterre, 1198), de Troyes (1193), d'Arles
(1243), etc.

Les exemples de crosses épiscopales ne prouvent pas
suffisamment ici contre la thèse, parce que l'évêque a sa
juridiction intérieure et extérieure ; les témoignages des
représentations d'abbés avec la crosse en dehors sont plus
décisifs. On en pourrait réunir un grand nombre ; en voici
quelques-uns qui suffiront à montrer que la prétendue règle
liturgique est imaginaire. Par exemple, un manuscrit du
XII° siècle, du Mont-Cassin, représente saint Benoît avec la
crosse tournée en dehors ; un sceau de Corbie (1163), un
sceau d'Albéric, abbé (en 1135), un sceau de Saint-Jean-en-
Vallée, près de Chartres (1209), de Château-Landon (1217),
la figure de saint Gall sur un manuscrit du XIIe siècle, à
Stuttgart, la mitre de saint Gildas du XVe siècle, etc.

(A suivre.)

LES MVSÉES, LES LIVRES
LES EXPOSITIONS * * * * *

PUBLICATIONS ARTISTIQUES :

Il sera rendit compte de toute publication dont deux exemplaires auront été
déposés à la rédaction de L'ART POVR TOVS, 7, rue Saint-Benoît, Paris.

— M. Lucien Morel, conservateur-adjoint de la bibliothèque de
Troyes et archiviste de la ville, vient de publier un NOUVEAU
GUIDE DE L'ETRANGER DANS TROYES ET LE DÉPARTE-
MENT DE LAUBE (Troyes, Caffé, imprimeur-éditeur, in-12) que
nous saluons volontiers comme l'une des meilleures publications de
ce genre. L'auteur est un érudit, mais il a mis juste la dose d'érudition
qu'il fallait pour que son livre soit vraiment utile aux visiteurs de la
vieille cité champenoise, sans verser dans l'habituelle sécheresse,
dans la banalité des vade-mecum ordinaires. On sait, du reste, que le
département et son chef-lieu, fort riches en œuvres d'art, devaient
fournir matière à un intéressant inventaire ; M, Morel s'est efforcé de
le dresser judicieusement, clairement, logiquement ; il y a pleinement
réussi. Nous n'énumérerons point ce que le guide contient : on s'en
rend assez compte, et nous constaterons seulement la précision des
renseignements, qui ne s'attachent point seulement aux monuments
de premier ordre, mais encore à maints édifices — comme les hôtels
particuliers, qu'il faut partout se hâter de relever et de décrire —
ou à maints objets moins considérables, et qui présentent toujours le
caractère de l'observation, de la recherche personnelles.

Un certain nombre de planches en phototypie, 14 pour être exact,
reproduisent des édifices ou parties d'édifices remarquables, ainsi
cette merveilleuse grille de ferronnerie de l'Hôtei-Dieu, classée comme
monument historique. C'est le cas de rappeler ici, d'après M. Morel,
que cette grille monumentale, placée en 1760 et sommée des armes de
France dans un magnifique cartouche, est l'œuvre d'un ferronnier
parisien, Pierre Delphin. Le musée fait l'objet d'une description assez
étendue ; notons au passage qu'il n'est ouvert publiquement que le
dimanche et les jours fériés ; voilà qui est bien insuffisant pour une
ville de plus de 53,000 habitants. Un des premiers points sur lesquels
devra se porter l'attention de la commission instituée au sous-secré-
tariat d'état des beaux-arts, en vue de la réorganisation des musées
de province, sera précisément de fixer des règles uniformes et très
libérales pour l'ouverture de ces collections, trop souvent méconnues
de leurs plus proches voisins.

On n'aura pas moins de profit à utiliser les pages relatives aux loca-
lités intéressantes du Département. Il y a là un nombre respectable
d'églises dignes d'un sérieux examen, plusieurs châteaux et manoirs,
dont l'un des plus curieux est sans contredit celui des abbés de
Molesmes, à Rumilly-les-Vaudes. Remarquons en terminant combien
la contrée est riche encore en anciens vitraux.

Jean Maxime.

Librairies-Imprimeries réunies, éditeurs, Paris. - Lk gérant: Ch. Eggimann.
 
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