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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0562
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482 VOYAGE EN ESPAGNE.
d'œuvre ignorés, j'ai eu la pensée que nous étions mystifiés, et que cet
amateur n'était qu'un monomaniaque ignorant.
Le second étage ne vaut guère mieux que le premier; cependant j'ai
aperçu un Velâzquez et un Ribéra ne manquant pas de mérite, j'ai
commencé à croire que notre hôte avait voulu parer sa marchandise,
comme on le dit, et que ses meilleurs tableaux nous paraîtraient encore
meilleurs après avoir vu les médiocres. Je ne m'étais pas trompé :
bientôt nous pénétrâmes dans le vrai sanctuaire où se tient le dieu, et
là nous fûmes convenablement dédommagés de notre promenade au
travers des croûtes précédentes.
Le vieux possesseur de ces tableaux a raconté une foule d'anecdotes à
propos de ces peintures qui font son orgueil et sa joie. « Ce Velasquez,
un Anglais m'en a offert mille guinées; ce Murillo n'a pas son pareil en
Espagne, et je ne le donnerais pas pour cent mille francs !
« Voyez-vous cet Alonso Cano, c'est un chef-d'œuvre, il vaut plus
à lui seul que tout votre Musée de Paris. Regardez ce Morales, c'est
pour avoir peint cette Vierge qu'on l'a surnommé el Divino.^ Et ainsi
du reste. Jamais adoration plus fervente n'a réjoui les auditeurs de ces
paroles enthousiastes, et, pour ma part, je n'en perdais pas un mot.
A force d'écouter parler les Espagnols, je commence à comprendre
beaucoup de phrases, et, Dieu aidant, la conversation ordinaire n'aura
bientôt plus de mystère pour moi. Le vieux Perez a terminé son pané-
gyrique en disant que sa maison renfermait pour trois millions de
tableaux et autres objets d'art. Il s'enflamme en parlant de ces trésors
inestimables, et dit qu'en bon Espagnol il veut les conserver à sa
patrie.
Il paraît, en effet, que la ville de Valence a proposé à notre aficio-
nado de lui acheter sa collection, de créer un musée public dont on
lui conservera la direction; mais le seûor Perez n'entend pas de cette
oreille. Se dessaisir de ses tableaux! cesser de les avoir là, sous la
main et sous la clef! céder sa propriété à n'importe qui! Non, non;
le vrai collectionneur n'oublie pas ainsi sa passion dominante; il ne
donne pas sa démission. En perdant ses tableaux, Perez perdrait la vie,
je suis certain que ce bon vieux ne survivrait pas à cette séparation.
Il faut l'entendre parler de Murillo, de Morales, et surtout de Juanès,
 
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