ET DES A R T S. L i v. I, 87
ce de Transylvanie , homme sage & vaillant , expérimenté en Paix,
& en Guerre ; qui profitant de l’inclination que la pluspartde la Noblesie
avoir pour Iuy, pendant que Maximilien balançoit, vint à Cracovie, où
il épousa Anne, èc receut la Couronne au commencement de Février de
l’an 1J76. Cette éle&ion fut marquée par ce Cronographe,
regaLI gaVDet stephanVs, reX MagnVs, honoré.
Ce fut sous ce Roy , grand amateur de la Vertu & des Sciences, qüe Za-
mosky se tignala dans les premières Charges du Royaume : la belle sym-
pathie qui estoit entre ces deux grands hommes porta ce Prince à luy
donner pour femme sa Niece Griselide Battori, fille de son frere Chrillo-
phîe. Prince de Transylvanie : il le créa grand Chancelier du Royaume,
Chef de huit mille hommes en la guerre de Moscovie; &c peu après Capi-
taine general des armées de toute la Pologne. Zamoski s’acquitta de ces
grandsemploys avec autant de courage que de bonheur : il dompta l’ar-
rogance de Jean Basilides, Grand Duc de Moscovie : il délivra la Pôle-
sie, la Velesie, & la Livonie du joug de ce redoutable voisin 5 5c Iuy sit
unerude, & forte guerre5 pendant laquelle arriva unechose, quimerice
d’estreicy racontée pour le contentement des amateurs des belles Lettres i
qui me pardonneront bien cette petite digresslon , par le plaisir qu’ils
prendront au récit de cette avanture.
Ce vaillant homme asslegeoit avec une puissante armée au plus fort d’un
aspre hyver Plescovie, ville grande, & riche par le commerce de diver-
sès Nations qui y abordent : & comme la rigueur de la saison faisoit tirée
ce siege en longueur ; quelques Seigneurs Poîonois , ennuyez d’esire
oysifs dans le Camp, firent delTein d’en sortir, & d’entrer plus avant dans
la Moscovie , pour en remarquer les singularitez : ils menèrent avec
eux un nommé Voinuski, homme bien versé dans les langues Latine,
Grecque, & Hébraïque: leur desirne demeura pas long-temps sans sa-
tisfa&ion ; car ils trouvèrent en des lieux écartez , 6c parmy des habi-
tans barbares, plusieurs beaux monumensdes Lettres anciennes j entre
autres les Livres de Cicéron de la Republique, addressez à Atticus, eserits
en lettres d’or. Ce succez agréable, & inopiné les invitant à chercher plus
avant; ils cheminèrent six jours en des Régions inhabitées. Ayant tra-
versé des Forets, &desDeserts ; ils rencontrèrent un Valon tres-agrea-
ble , au milieu duquel paroisioit prés d’une claire fontaine un Tombeau
antique , couvert en partie de terre , 6c de mousse par la longueur du
temps : la curiosité les porta en cét endroit ; ils le nettoyèrent le mieux
qu’il leur fut potfîble, & reconnurent que c’efioitleTombeau du fameux
Poète Ovide, par quelques caraderes usèz qu’ils virent gravez sur la pier-
re, 6c parmy lesquels ils leurent ces Vers avec peine.
Hic situs e(l Val es quem Dm Cœsaris ira
Augufti Latia cedere jujjît bumo,
Sœfè mifer volait patriis occumbere terris $
Sed srustrà : hune iUi sata dedere locum.
Ceux qui ont recherché la vie de cét excellent Autheur; à qui Sene~
que donne la gloire du plus ingénieux de tous les Poètes Latins, ont re-
marqué, qu’ayant adoucy par sa conversation charmante 6c civile le na-
turel sauvage des hommes qui habïtoient le lieu de son exil, 5c parmy
lesquels il fut obligé à passer le relie de ses jours ; ces Barbares, le regar-
L 2, dant
ce de Transylvanie , homme sage & vaillant , expérimenté en Paix,
& en Guerre ; qui profitant de l’inclination que la pluspartde la Noblesie
avoir pour Iuy, pendant que Maximilien balançoit, vint à Cracovie, où
il épousa Anne, èc receut la Couronne au commencement de Février de
l’an 1J76. Cette éle&ion fut marquée par ce Cronographe,
regaLI gaVDet stephanVs, reX MagnVs, honoré.
Ce fut sous ce Roy , grand amateur de la Vertu & des Sciences, qüe Za-
mosky se tignala dans les premières Charges du Royaume : la belle sym-
pathie qui estoit entre ces deux grands hommes porta ce Prince à luy
donner pour femme sa Niece Griselide Battori, fille de son frere Chrillo-
phîe. Prince de Transylvanie : il le créa grand Chancelier du Royaume,
Chef de huit mille hommes en la guerre de Moscovie; &c peu après Capi-
taine general des armées de toute la Pologne. Zamoski s’acquitta de ces
grandsemploys avec autant de courage que de bonheur : il dompta l’ar-
rogance de Jean Basilides, Grand Duc de Moscovie : il délivra la Pôle-
sie, la Velesie, & la Livonie du joug de ce redoutable voisin 5 5c Iuy sit
unerude, & forte guerre5 pendant laquelle arriva unechose, quimerice
d’estreicy racontée pour le contentement des amateurs des belles Lettres i
qui me pardonneront bien cette petite digresslon , par le plaisir qu’ils
prendront au récit de cette avanture.
Ce vaillant homme asslegeoit avec une puissante armée au plus fort d’un
aspre hyver Plescovie, ville grande, & riche par le commerce de diver-
sès Nations qui y abordent : & comme la rigueur de la saison faisoit tirée
ce siege en longueur ; quelques Seigneurs Poîonois , ennuyez d’esire
oysifs dans le Camp, firent delTein d’en sortir, & d’entrer plus avant dans
la Moscovie , pour en remarquer les singularitez : ils menèrent avec
eux un nommé Voinuski, homme bien versé dans les langues Latine,
Grecque, & Hébraïque: leur desirne demeura pas long-temps sans sa-
tisfa&ion ; car ils trouvèrent en des lieux écartez , 6c parmy des habi-
tans barbares, plusieurs beaux monumensdes Lettres anciennes j entre
autres les Livres de Cicéron de la Republique, addressez à Atticus, eserits
en lettres d’or. Ce succez agréable, & inopiné les invitant à chercher plus
avant; ils cheminèrent six jours en des Régions inhabitées. Ayant tra-
versé des Forets, &desDeserts ; ils rencontrèrent un Valon tres-agrea-
ble , au milieu duquel paroisioit prés d’une claire fontaine un Tombeau
antique , couvert en partie de terre , 6c de mousse par la longueur du
temps : la curiosité les porta en cét endroit ; ils le nettoyèrent le mieux
qu’il leur fut potfîble, & reconnurent que c’efioitleTombeau du fameux
Poète Ovide, par quelques caraderes usèz qu’ils virent gravez sur la pier-
re, 6c parmy lesquels ils leurent ces Vers avec peine.
Hic situs e(l Val es quem Dm Cœsaris ira
Augufti Latia cedere jujjît bumo,
Sœfè mifer volait patriis occumbere terris $
Sed srustrà : hune iUi sata dedere locum.
Ceux qui ont recherché la vie de cét excellent Autheur; à qui Sene~
que donne la gloire du plus ingénieux de tous les Poètes Latins, ont re-
marqué, qu’ayant adoucy par sa conversation charmante 6c civile le na-
turel sauvage des hommes qui habïtoient le lieu de son exil, 5c parmy
lesquels il fut obligé à passer le relie de ses jours ; ces Barbares, le regar-
L 2, dant