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Bulletin de l' art pour tous — 1892

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No 78 (Juin 1892)
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L'ART-POUR-TOUS

FATCrCLOPEDJE D£ L ARTJA^EUSTRIEL ET DECORATIF
-paraissant taus les Trwns
Emile Reiber ! C. Sauvageot I , P. Gélis-Didot

Directeur - Fondateur Directeur Directeur

1861-64 o i886-go\ i865-S5 j [Sgi

Librairies-imprimeries réunies

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^ ^a^^m ^J^S^Uxh.Jm ç\ PARIS

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31e Année ' ----^ Juin 1892

BULLETIN DE JUIN 1892

L'Art pour Tous au Salon

h

Les Ghamps-Élysées (1)

Le Salon des Champs-Elysées compte cette
année un peu plus de 1,700 toiles, 482 dessins
ou cartons, et un millier d'oeuvres de sculpture.

On sait que ces chiffres élevés sont le résultat
d'une sélection des plus étroites. Nous avons
étudié, dans le précédent numéro de Y Art pour
Tous, la façon singulière dont est menée cette
opération délicate entre toules, et les calculs
mesquins et personnels qui, du haut en bas de
l'échelle, dirigent ceux qui s'en sont chargés.

A juger les nouveaux règlements par leurs
résultais, on éprouve une déception : la visite
du Salon est devenue moins fatigante ; son
niveau artistique ne s'est pas élevé; un certain
nombre de très bons ouvrages; une foule de
mauvais ou de ridicules; une moyenne très suf- ;
fisante comme habileté, médiocre au point de
l'art: voilà le bilan, toujours le même.

Ce n'est pas une revue détaillée du Salon que
nous voulons faire passer à nos lecteurs : un
pareil travail viendrait trop tard, et dépasserait
les limites au delà desquelles nous ne devons
pas les entraîner. L'art décoratif les intéresse
surtout : nous étudierons de plus près les ou-
vrages qui s'y rapportent, nous bornant pour les
autres à une très sobre énumération.

* *

Après le Panthéon et la Sorbonne, l'Hôtel de
Ville est devenu le grand champ de bataille de
nos décorateurs. Voici trois grands plafonds
qui lui sont destinés : la Ville de Paris conviant
le monde à ses fêtes, par M. Benjamin Constant;
la Danse française à travers les âges, par
M. Aimé Morot; les Fleurs, par M. Ferrier.

Que deviendra l'œuvre de M. B. Constant,
installée à sa place définitive? Bien prétentieux
qui voudrait le prévoir. Au Salon, l'opinion a été
unanime : l'effet est mauvais. Cette débauche de
tons criards et bizarres évoque le souvenir des
affiches tapageuses de la rue : il y a là du
Chérel, du Besnard, un peu de tout ce qu'on
voudra. La surprise a été grande de voir le
nom de M. B. Constant au bas de cette œuvre
incompréhensible, et la critique l'a durement
témoigné à l'artiste. Est-ce donc si uniquement
sa faute? Pourquoi ne pas en rejeter une partie
Sur l'idée absurde d'exposer au jour blanc et
°ru du Salon, le long d'une muraille verticale
u les personnages se renversent les uns sur
;s autres comme capucins de cartes, une toile

I) Voir le Bulletin de Mai.
BULLETINS DE L'ART FOUR TOUS. — N° 78.

destinée à la perspective fuyante, à la pénombre j
très adoucie d'un plafond ? Nous ne nous sen-
tons pas le courage de chercher querelle à
M. B. Constant, quelque malheureux que pa-
raisse ici son essai. C'est en place que sa pein-
ture doit être jugée, et qu'il la jugera lui-même.

D'ailleurs, il y a quelquefois pour ces erreurs
d'artiste, des circonstances atténuantes : cer-
tains états d'esprit, certaines préoccupations,
dont ils ne peuvent se défendre, troublent l'œil
et font errer la main. Depuis longtemps déjà
M. B. Constant nous en paraît obsédé. Le jour
OÙ le peintre des Cherifas aura la médaille
d'honneur qu'il mérita jadis, peut-être le ver-
rons-nous, plus maître de lui-même, revenir à
la note d'art où il a trouvé tant de belles œuvres.

Le plafond de M. Aimé Morot est plein de
charmantes qualités : un arrangement pitto-
resque, un séduisant papillotage de couleurs,
une étonnante adresse d'exécution. L'ensemble
n'est-il pas un peu dur d'effet, les morceaux
découpés parfois les uns sur les autres, par une
excessive préoccupation de relief? Nous le ver-
rons une fois en place.

A voir en place aussi les Fleurs de M. Ferrier.
Vraiment, quelle impression a dû éprouver cet
habile artiste, ce coloriste brillant et délicat, en
voyant exposées dans cette petite salle, juste sur
la cimaise, tout comme un tableau de chevalet,
ces énormes figures plafonnantes qui seront peut-
être superbes quand elles auront pris leur en-
volée sous les voûtes de l'Hôtel de Ville? Leur
effet, ici, lient de la caricature; et qui donc vou-
dra croire que dans tout le Palais de l'Industrie \
dont ils disposent, les organisateurs du Salon j
ne trouvent pas une place pour exposer à leur !
dislance et dans leur vrai jour des oeuvres de
cette importance? On le fait au Champ de Mars.
Voilà un progrès que les Champs-Elysées de-
vraient bien chercher à copier, puisqu'ils veu-
lent avoir l'air de s'engager dans cette voie. A
cette réforme-là, le public et les arlistes trou-
veraient un égal profit.

MM. F. Flameng et Moreau-Néret en bénéficie-
raient cette année, et leurs ouvrages en vau-
draient la peine. Très élégamment composé,
dans la gamme douce et argentée qui leur est
familière, YOlympe de M. Flameng serait un
des plus intéressanls morceaux du Salon, s'il ne
se présentait pas les pieds en avant, avec de pé-
nibles bizarreries de perspectives. M. Moreau-
Néret, dont le plafond fait pendant à celui de
M. Flameng, y montre de réelles qualités de
couleurs et d'arrangement.

Dans sa grande toile des Conquérants, M. Fri-
tel a fait œuvre de philosophe autant que de
peintre. Le sombre et menaçant cortège de ces
grands faucheurs d'hommes, qui chevauchent
à travers la moisson des cadavres, la lueur bla-
farde tamisée sur ce paysage, sinistre comme
ceux que Dante rêva pour le vestibule de son
Enfer, le souffle de terreur et de mort qui passe
sur cette scène, tout cela révèle le tempéra-
ment de penseur qui a déjà inspiré à M. Fritel
le Solum Patriœ. Peut-être pèche-t-il ici par

l'excès de ses qualités : l'idée empiète sur l'im-
pression. A vouloir trop philosopher sur son
sujet, M. Fritel a rendu son travail un peu pé-
nible. Celle réserve faile, reconnaissons qu'il a
atteint son but, et que les Conquérants sont une
des rares œuvres de ce Salon au fond desquelles
il y ait vraiment une pensée.

Cet abus de l'idée abstraite, que nous repro-
cherions volontiers à M. Fritel, M. Henri
Martin (l'Homme entre le Vice et la Vertu)
est bien près d'y tomber. Ce bizarre effet de
lumière qui joue à travers son groupe, laisse
le Vice dans l'ombre, illumine la Vertu, jette
son reflet sur le mouvement de l'homme qui
suit la claire vision, tout cela est ingénieux
sans doute, un peu trop suivant nous. Son
tableau du Salon précédent, que celui-ci
rappelle singulièrement, était d'un vrai primitif
dans son exquise naïveté. Cette fois encore il
veut être simple. Mais la simplicité, c'est pour
l'artiste l'insaisissable chimèrequ'il nous peignait
si bien l'an dernier : elle se dérobe à qui la
cherche : on ne la possède qu'à la condition de
ne pas s'en douter.

* *

M. Raphaël Collin est peut-être, de tous nos
artistes, celui qui apporte à l'étude du nu les
plus rares qualités. Habile et sincère à la fois,
— chose rare, — il sait lui conserver l'ampleur
du grand style tempérée d'une délicate nuance
de modernité. Ses femmes, dont la ronde dé-
roule sur l'horizon gris de la mer de si fines
silhouettes, sont observées d'un œil attentif,
peintes d'une main souple et libre.

Plusieurs artistes s'inspirent, avec des succès
divers, des mêmes traditions : citons VAmour
et Psyché, d'un élégant sentiment décoratif, par
M. Royer Lionel; la Jeunesse, de M. Calbet ;
Phœbé s'éveille, de M. Berthault; la Tentation,
où M. Surand, modernisant à outrance la vieille
légende de saint Antoine, n'a pas trop de tout
son talent pour faire admettre les audaces de sa
composition ; enfin, pour clore la liste par le
nom d'un maître, M. Albert Maignan, qui. dans
une superbe page, évoque autour de Carpeaux
mourant, dans une vaporeuse vision, les per-
sonnages enfantés par son génie.

L'Histoire a inspiré cette année deux grandes
toiles : l'Entrée de Louis XI à Paris, par
M. Tattegrain, peintre d'un solide et conscien-
cieux talent, à qui on pardonnera cette erreur
en mémoire de ses Cassellois et des belles
scènes marines d'antan ; — et la Reddition de
Huningue, de M. Détaille, une curieuse et pit-
toresque composition, celle peut-être où ce
grand artiste a le plus affirmé ses qualités d'ob-
servateur et d'exécutant.

A leur suite, mentionnons MM. Bussière (la
Mort des Preux), Chicotot (Corneille mourant)
et Jean Veber, avec son très curieux Siméon le
Stylite.

On sait le nombre de Portraits qui passent
annuellement au Salon : ce n'est pas un de ses
moindres ennuis que ce défilé interminable de
 
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