ET DE LA CURIOSITÉ
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nier qui a été achetée il y a quelques semaines
par la Société des Amis du Louvre, puis deux
autres tapisseries flamandes, beaucoup moins
grandes, mais non moins belles ni moins bien
conservées : l'une est do' la fin du xv° siècle et
l'on y voit saint Luc faisant le portrait de la
Vierge; elle provient du legs Leroux. L'autre,
d'un art incomparable, qui fait partie du don Da-
villier, disposée en triptyque, représente ces
trois sujots : iloïse frappant le rocher, La
Vierrje glorieuse, La Piscine probatique.
PETITES EXPOSITIONS
QUELQUES ÉLÈVES DE GUSTAVE MOREAU
Il faut se borner, pour savoir non seule-
ment écrire, mais comprendre. Les exposi-
tions nous menacent : elles sont trop! Mais,
à l'avant-garde, à deux pas des novateurs
do la « bande noire », les élèves de l'atelier
Morcau sont l'intérêt de nos deux Salons,
et, depuis longtemps, je réclame l'exposition
d'ensemble qui manifesterait soudain la
vigoureuse variété do leurs efforts. A son
défaut, en voici quelques-uns qui se groupent
avec leurs amis, 11, rue Boissonnadc, chez
chez M. J. de Frobervillc, en un quartier
paisible. Ils sont douze peintres. Des élèves
de Morcau, ceux-là seuls sont captivants
qui ne l'imitent point... C'est pourquoi Jules
Flandrin, Charles Guérin sollicitent les
yeux. Ils prouvent leur vénération pour le
maître en « étant autres ». Déjà remarqué,
près de Milcendeau, avec un puissant Crépus-
cule, à la Société Moderne des Beaux-Arts,
le premier s'affirme « peintre » en une sim-
ple pochade, Après l'orage, ou dans la pâte
naïvement robuste d'un petit cadre, Fleurs
et fruits, à rendre jaloux Cézanne. Depuis
son grand panneau du Luxembourg, le se-
cond s'efforce de plus en plus vers l'har-
monie : les gris chaleureux de ses natures
mortes l'expriment. Quand reverrons-nous
leurs chaudes lithographies"?... A l'aquarelle
ou au pastel, Gustave Poëtzsch et son ami
Jean Morax interrogent la montagne bleuâ-
tre ; et ce dernier devient exquis sur la
Tamise. Sans préjudice de la frileuse Amster-
dam, la Bretagne pensive attire kBréhat les
pastellistes nerveux ou délicats : Dabadie ou
Koënig, l'aquarelliste ami des beaux soirs,
René Thiry. Discret et vivant ensemble. Et
d'autres regardent la nature avec une sym-
pathie tacite, Henri du Verne, en Bretagne
encore, Paul Briaudcau, crépusculaire, Lu-
dovic Vallée, dilettante amoureux des har-
monies lumineuses, M. Vieillard, dessinateur
coloré dans l'effroi du Paris nocturne... Une
Loire finement verdoyante dans l'air mauve
est signée Frob. Loin de la vanité préten-
tieuse, c'est avec ces riens que s'écrit
l'histoire de l'art .
EXPOSITION DE DIVERS ARTISTES
CHEZ HESSÈLE
Aussi bien vais-je rencontrer 18, rue
Laffitte, chez l'éditeur Hessèle, un autre
élève de Gustave Morcau parmi des jeunes :
J.-G. Besson; c'est le confident faubourien
des humbles auxquels apparaît parfois, si
pâle, un Christ consolateur... Là, des études
seulement, des pastels, des coins excen-
triques où les compagnons trinquent, où la
blanchisseuse trime pour rester à peu près
honnête, où la fille ébauche son mauvais
rire à la brune... Les peintures de M. Bra-
quaval sont plus classiques d'âme et de
forme : des vues de Boulogne-sur-Mer ou du
Paris heureux, en un reflet lunaire ou dans
la mêlée des voitures. Une impression;
point d'impressionnisme. Dans le même
décor que Charles Guérin, Ait Jardin du
Luxembourg, M. A. Marquet recherche de
préférence la synthèse violente, les opposi-
tions sonores qui s'adoucissent dans ses pas-
tels. Moins outrancicr, l'aquarelliste M.
Roux-Champion ne méprise point, pourtant,
les chatoiements colorés que la minute fugi-
tive enserre dans un contour : son Brignoux,
ses Falaises attestent une vibration. Ses
dessins bretons alternent avec la peinture
non moins bretonne et plus emportée de
M. A. Wilder, un nouveau venu; la Boule
bleuo scintille, les aquarelles sont un hom-
mage candide à Jongkind. Et, parmi les
estampes deux fois « originales », on se
croit revenu aux jours des piquantes expo-
sitions chez feu Le Barc do Bouttoville...
AU PHOTO-CLUB
Avec M. F. Holland Day et les œuvres de
la nouvelle école américaine, c'est encore et
toujours la photographie qui veut substituer
à l'art humain la nature; mais, sans parler
des procédés savants, cette nature est de
l'art encore, puisqu'elle recourt à l'ordon-
nance, à l'arrangement, à la disposition du
modèle : le n" 'i3, Adam et Eve, de M. Frank
Eugène, est typique. A remarquer, do même,
les Sept paroles du Christ et les Portraits de
M. F. Holland Day, de Boston.
EXPOSITION DE GASTON MARQUET
A la Bodinièro, en la cohue mondaine,
c'est moins par ses petites études sagement
peintes que cette exposition semble « artis-
tique» que par l'amusant essai de ses bois
bridés et teintés, qui, lorsqu'ils veulent res-
ter discrets, provoquent des sensations pré-
cises, inédites, grâce aux secrets nouveaux
de la pyrogravure armée du thermocau-
tère.
EXPOSITION DE Mmc HENRIETTE RONNER
Plus mystérieux les modèles élus par
Mmc Henriette Ronncr, de Bruxelles, une ar-
tiste. Le compagnon qui charma les écri-
vains, depuis Montaigne jusqu'à Baude-
laire, a trouvé son peintre. « Les amou-
reux fervents et les savants austères » re-
connaîtront leurs amis dans ces beaux
chats aux yeux de changeante cmeraude,
qui savent unir tant de bonhomie à
tant de ruse, tant d'élégance à tant d'mti-
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nier qui a été achetée il y a quelques semaines
par la Société des Amis du Louvre, puis deux
autres tapisseries flamandes, beaucoup moins
grandes, mais non moins belles ni moins bien
conservées : l'une est do' la fin du xv° siècle et
l'on y voit saint Luc faisant le portrait de la
Vierge; elle provient du legs Leroux. L'autre,
d'un art incomparable, qui fait partie du don Da-
villier, disposée en triptyque, représente ces
trois sujots : iloïse frappant le rocher, La
Vierrje glorieuse, La Piscine probatique.
PETITES EXPOSITIONS
QUELQUES ÉLÈVES DE GUSTAVE MOREAU
Il faut se borner, pour savoir non seule-
ment écrire, mais comprendre. Les exposi-
tions nous menacent : elles sont trop! Mais,
à l'avant-garde, à deux pas des novateurs
do la « bande noire », les élèves de l'atelier
Morcau sont l'intérêt de nos deux Salons,
et, depuis longtemps, je réclame l'exposition
d'ensemble qui manifesterait soudain la
vigoureuse variété do leurs efforts. A son
défaut, en voici quelques-uns qui se groupent
avec leurs amis, 11, rue Boissonnadc, chez
chez M. J. de Frobervillc, en un quartier
paisible. Ils sont douze peintres. Des élèves
de Morcau, ceux-là seuls sont captivants
qui ne l'imitent point... C'est pourquoi Jules
Flandrin, Charles Guérin sollicitent les
yeux. Ils prouvent leur vénération pour le
maître en « étant autres ». Déjà remarqué,
près de Milcendeau, avec un puissant Crépus-
cule, à la Société Moderne des Beaux-Arts,
le premier s'affirme « peintre » en une sim-
ple pochade, Après l'orage, ou dans la pâte
naïvement robuste d'un petit cadre, Fleurs
et fruits, à rendre jaloux Cézanne. Depuis
son grand panneau du Luxembourg, le se-
cond s'efforce de plus en plus vers l'har-
monie : les gris chaleureux de ses natures
mortes l'expriment. Quand reverrons-nous
leurs chaudes lithographies"?... A l'aquarelle
ou au pastel, Gustave Poëtzsch et son ami
Jean Morax interrogent la montagne bleuâ-
tre ; et ce dernier devient exquis sur la
Tamise. Sans préjudice de la frileuse Amster-
dam, la Bretagne pensive attire kBréhat les
pastellistes nerveux ou délicats : Dabadie ou
Koënig, l'aquarelliste ami des beaux soirs,
René Thiry. Discret et vivant ensemble. Et
d'autres regardent la nature avec une sym-
pathie tacite, Henri du Verne, en Bretagne
encore, Paul Briaudcau, crépusculaire, Lu-
dovic Vallée, dilettante amoureux des har-
monies lumineuses, M. Vieillard, dessinateur
coloré dans l'effroi du Paris nocturne... Une
Loire finement verdoyante dans l'air mauve
est signée Frob. Loin de la vanité préten-
tieuse, c'est avec ces riens que s'écrit
l'histoire de l'art .
EXPOSITION DE DIVERS ARTISTES
CHEZ HESSÈLE
Aussi bien vais-je rencontrer 18, rue
Laffitte, chez l'éditeur Hessèle, un autre
élève de Gustave Morcau parmi des jeunes :
J.-G. Besson; c'est le confident faubourien
des humbles auxquels apparaît parfois, si
pâle, un Christ consolateur... Là, des études
seulement, des pastels, des coins excen-
triques où les compagnons trinquent, où la
blanchisseuse trime pour rester à peu près
honnête, où la fille ébauche son mauvais
rire à la brune... Les peintures de M. Bra-
quaval sont plus classiques d'âme et de
forme : des vues de Boulogne-sur-Mer ou du
Paris heureux, en un reflet lunaire ou dans
la mêlée des voitures. Une impression;
point d'impressionnisme. Dans le même
décor que Charles Guérin, Ait Jardin du
Luxembourg, M. A. Marquet recherche de
préférence la synthèse violente, les opposi-
tions sonores qui s'adoucissent dans ses pas-
tels. Moins outrancicr, l'aquarelliste M.
Roux-Champion ne méprise point, pourtant,
les chatoiements colorés que la minute fugi-
tive enserre dans un contour : son Brignoux,
ses Falaises attestent une vibration. Ses
dessins bretons alternent avec la peinture
non moins bretonne et plus emportée de
M. A. Wilder, un nouveau venu; la Boule
bleuo scintille, les aquarelles sont un hom-
mage candide à Jongkind. Et, parmi les
estampes deux fois « originales », on se
croit revenu aux jours des piquantes expo-
sitions chez feu Le Barc do Bouttoville...
AU PHOTO-CLUB
Avec M. F. Holland Day et les œuvres de
la nouvelle école américaine, c'est encore et
toujours la photographie qui veut substituer
à l'art humain la nature; mais, sans parler
des procédés savants, cette nature est de
l'art encore, puisqu'elle recourt à l'ordon-
nance, à l'arrangement, à la disposition du
modèle : le n" 'i3, Adam et Eve, de M. Frank
Eugène, est typique. A remarquer, do même,
les Sept paroles du Christ et les Portraits de
M. F. Holland Day, de Boston.
EXPOSITION DE GASTON MARQUET
A la Bodinièro, en la cohue mondaine,
c'est moins par ses petites études sagement
peintes que cette exposition semble « artis-
tique» que par l'amusant essai de ses bois
bridés et teintés, qui, lorsqu'ils veulent res-
ter discrets, provoquent des sensations pré-
cises, inédites, grâce aux secrets nouveaux
de la pyrogravure armée du thermocau-
tère.
EXPOSITION DE Mmc HENRIETTE RONNER
Plus mystérieux les modèles élus par
Mmc Henriette Ronncr, de Bruxelles, une ar-
tiste. Le compagnon qui charma les écri-
vains, depuis Montaigne jusqu'à Baude-
laire, a trouvé son peintre. « Les amou-
reux fervents et les savants austères » re-
connaîtront leurs amis dans ces beaux
chats aux yeux de changeante cmeraude,
qui savent unir tant de bonhomie à
tant de ruse, tant d'élégance à tant d'mti-