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N3 ii.

1921.

BUREAUX! I06, BOULEVARD SAINT-GERMAIN (6e)

15 juin.

CHRONIQUE DES ARTS

ET DE LA CURIOSITÉ

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Le Numéro : i franc

PROPOS DU JOUR

Il faut noter comme un indice précieux les
déclarations faites, en diverses circonstances,
par M. Goumain, président de la Chambre
syndicale de l’ameublement, président aussi
de la Fédération issue du récent congrès de
l’ameublement. Elles démontrent avec évidence
(car on les sent sincères) qu’un esprit nouveau
anime la corporation du meuble, considérée à
bon droit, jusqu’ici, comme fort routinière et
attachée uniquement aux formes du passé. Ces
formes ne lui évitaient-elles pas tout souci de
création, toute dépense de renouvellement du
stock de modèles dont elle tirait des reproductions
à l’infini, au plus grand préjudice de l’esprit d’in-
vention et de la formation professionnelle ?

Le copieux et lourd insuccès du Salon du
. mobilier, organisé aux Tuileries l’an dernier avec
le mauvais goût que l’on sait, ainsi que toutes les
tentatives qui, un peu partout, affirment les ten-
dances modernistes, ont ouvert les yeux des plus
réfractaires. Et cette sorte de tutelle qu’exer-
çaient deux ou trois grosses maisons, protago-
nistes de la copie, de la copie sans trêve, semble
prendre fin pour le salut du faubourg Saint-
Antoine, qui périssait effectivement et' rapide-
ment, et pour le bon renom de l’art décoratif
français.

C’est surtout dans un discours prononcé lors
de la distribution des récompenses des cours du
Patronage industriel des enfants de l’ébénisterie,
à la Sorbonne, que M. Goumain s’est prononcé
avec une netteté bien faite pour éveiller l’intérêt
et l’espoir. Il y a déploré l’indifférence coupable
du patronat à l’égard de la question de l’appren-
tissage, signalé le danger du fonctionnarisme
officiel et privé qui vide les ateliers au profit des
bureaux. Mais surtout, il a fait appel aux artistes
décorateurs avec lesquels, a-t-il dit, ce nous som-
mes prêts à marcher la main dans la main » en

vue d’une loyale collaboration; et, parlant du
prochain Salon du mobilier, il n’a pas craint de
demander à tous ses collègues qu’ils s’y renfer-
ment dans une note « franchement moderne »,
C’est le langage de la raison, et l’on ne devrait
point s’en étonner : il est vrai qu’on n’était pas
habitué à l’entendre en certains milieux pour qui
le pastiche était l’alpha et l’omega de l’art, du
commerce et du goût.

Cette collaboration souhaitée avec les artistes,
c’est tout bonnement le salut d’une industrie qui
fut immense et célèbre. Par exemple, il ne fau-
dra pas que les industriels du « faubourg » se
bornent à la réclamer après avoir cru si longtemps
qu’ils pouvaient s’en passer; il faudra qu’ils s’en
fassent une conception très haute et aussi, disons-
le, qu’ils la payent, car c’était là le mot de
l’énigme: pourquoi payer une composition nou-
velle alors que l’on disposait de ce bon vieux stock
Louis XVI et autres où il n’y avait qu’à puiser
sans que l’on risque de voir ses créateurs venir
réclamer le prix de leur effort? Mais l’intérêt
bien entendu marche désormais de pair avec le
sentiment de l’art et la logique enfin retrouvée ;
et bien que la Foire de Paris ne nous ait pas
fait toucher du doigt les modalités d’une rénova-
tion nécessaire, on peut espérer que celle-ci va
développer peu à peu ses fécondes tentatives.

M. Goumain a été tout aussi positif dans une
interview publiée par un journal du soir, qui a
intitulé son article, avec une emphase peu digne
d’un si grave sujet: « La France de 1921 crée un
style nouveau ». C’est la guerre à la routine,
c’est une réaction vigoureuse contre les abus du
style, c’est la responsabilité des architectes trop
peu soucieux de créer des intérieurs propres à
notre époque, que M. Goumain envisage ici avec
bien d’autres points sur lesquels nous ne pouvons
nous appesantir. Il est maintenant du devoir de
tous ceux qui sentent le prix de cette rénovation
d’appuyer ceux qui, comme M. Goumain, s’en
font résolument les apôtres.
 
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