ËVANGÉL1A1RES (l'L. lit). 81
traçait sur le sol semble avoir été les péchés des scribes et des pharisiens qui lui déféraient
la condamnation de la pauvre pécheresse ; mais il n'y a pas lieu de se tromper sur le sens
du petit bas-relief. A g-auche du spectateur, le personnage dont la tête est entourée d'un
nimbe simple est sans doute l'évangéliste. Aussi lui fait-on tenir un livre, comme presque
toutes les fois qu'on le représente au Calvaire. Cela veut dire, comme il l'écrivit lui-même
(Joann. XIX, 3ë; XXI, 24) : « Celui qui en rend témoignage, l'a vu de ses yeux. a Cf.
b. t., p. 29.
Au-dessus de saint Jean, par compensation fâcheuse nous avons, au contraire, un récit
de saint Matthieu : c'est l'expulsion des vendeurs et changeurs que Notre-Seigneur fit
sortir du temple (Mattli. XXI, 12, sq. — Marc. XI, 13-17). La main droite du Sauveur élève
un fouet de corde qui s'aperçoit près de l'encadrement perlé, mais auquel on ne ferait pas
attention si on ne connaissait le fait. Les marchands d'oiseaux ont passé sur l'épaule leurs
volières et prennent de l'avance sans trop de hâte. Quant au changeur, il a saisi tout d'a-
bord une des sébiles qui lui servaient à exhiber ou à recueillir ses monnaies et l'appuie des
deux mains sur son cœur. Son comptoir est encore là, portant la balance et deux autres
espèces de coupes où se distribuaient sans doute les pièces de provenances diverses. L'artiste
a fort bien compris le rôle de cet homme. On sait que les prêtres juifs n acceptaient dans
le temple que des qui ne portassent nul signe tenant de près ou de loin à l'idolâtrie '.
Sous les rois grecs ou les empereurs romains et quand on arrivait de régions étrangères
pour visiter le saint lieu, il fallait donc se procurer des pièces recevables pour l'offrande L
Le changeur avait beau jeu à exploiter ainsi la religion de ses compatriotes : poids, titre,
difficulté de circulation ou de transport, estimation des diverses places commerciales, etc.,
devenaient matière à discussion avec les pèlerins qui n'étaient pas tous en mesure de ré-
soudre ou même d'apprécier les objections faites. Il y a donc lieu de penser qu'on pêchait
là beaucoup en eau trouble, et que Notre-Seigneur ne chargeait pas le tableau en disant :
« D'une maison de prière vous faites un antre de voleurs, n Les vendeurs d'oiseaux (pas-
sereaux et colombes), pour certains rites prescrits ne pouvaient tromper beaucoup sur
n Les monnaies vraiment juives ne portent aucune trace
de créature animée. Tout au pius y voit-on (et encore sous
Agrippa) une main tenant des épis ou des fruits quciconques,
pour rappeler la récolte, dont les prémices devaient être
offertes à Dieu. Cf. C. Cavcdoni, A'MWM'smaMca HMlca,
p. 26-71.
2. Le docte et judicieux C. Cavedoni,dans sa ATwMsmati'eaM-
Mica.fait observer que des monnaies bien diverses eurent cours
dans la Palestine. 11 en 'résultait un besoin de simplification
pour les receveurs lévitiques du sanctuaire. Le semi-sicle
drachme) que chacun devait payer d'après la Loi au dernier
mois de l'année, pour l'entretien du Temple, donnait encore
lieu au change avec ses variations estimées sur nouvelles
commerciales plus ou moins authentiques, et entraînait un
agio empoché parle plus habile des contractants. Cf. op. ciL,
p. 96, sgg.; iL 80-136 et 166.
Les Juifs n'ont jamais passé pour méconnaître la portée
d'un compte débattu. Leurs docteurs prétendent que vers le
temps des Ptolémées, l'Égypte ayant fait mine de vouloir
réclamer l'équivalent des trésors emportés par les Israélites
fugitifs sous la conduite de Moïse, on répondit en Palestine
par un mémoire de dommages et intérêts encore plus vieux.
11 s'agissait d'une réclamation de payements arriérés pour
journées dues à 600,000 Hébreux mis en réquisition par les
Égyptiens durant plus de deux siècles; ce qui, à un denier
par tête et par jour, atteignait la somme de 46,990,000,000.
Cf. !M., p. 164 et 26. C'était plus que prussien.
3. Le même savant (op. clL, p. 161 ; et 109, sg.) constate
quelque différence entre le prix des petits oiseaux à Jérusa-
lem (un sou la paire) durant la vie mortelle de Notre-Sci-
gneur, et celui qu'en payaient les Athéniens au temps d'Aris-
tophane (sept pinsons pour trois sous de notre monnaie).
C'est, dit-il, que les offrandes nombreuses de passereaux en-
jointes par le Lévitique devaient faire hausser la valeur vénale
de ces animaux, tandis qu'ailleurs on ne pouvait guère les
rechercher que comme objet de distraction. Tenons aussi un
certain compte de la différence des époques ou des contrées,
et de ce que les mœurs ou la spéculation peuvent y faire en
temps et lieux.
Les marchands de moineaux à Jérusalem avouaient d'ail-
leurs implicitement que leur commerce n'était pas ruineux,
puisqu'ils accordaient un cinquième oiseau en sus à qui payait
deux paires (Cf. AMHMsmaMca MèHca, p. 110. — Matth.x, 29;
et Luc. xn, 6). En somme, pourtant, les acheteurs grecsn'au-
raient pas été plus favorisés en fait de pinsons, qu'un juif
qui voulait faire monter son emplette jusqu'à trois couples de
passereaux; puisqu'en Palestine il obtenait déjà un cinquième
moineau par-dessus le marché, moyennant deux paires prises
n. — 11
traçait sur le sol semble avoir été les péchés des scribes et des pharisiens qui lui déféraient
la condamnation de la pauvre pécheresse ; mais il n'y a pas lieu de se tromper sur le sens
du petit bas-relief. A g-auche du spectateur, le personnage dont la tête est entourée d'un
nimbe simple est sans doute l'évangéliste. Aussi lui fait-on tenir un livre, comme presque
toutes les fois qu'on le représente au Calvaire. Cela veut dire, comme il l'écrivit lui-même
(Joann. XIX, 3ë; XXI, 24) : « Celui qui en rend témoignage, l'a vu de ses yeux. a Cf.
b. t., p. 29.
Au-dessus de saint Jean, par compensation fâcheuse nous avons, au contraire, un récit
de saint Matthieu : c'est l'expulsion des vendeurs et changeurs que Notre-Seigneur fit
sortir du temple (Mattli. XXI, 12, sq. — Marc. XI, 13-17). La main droite du Sauveur élève
un fouet de corde qui s'aperçoit près de l'encadrement perlé, mais auquel on ne ferait pas
attention si on ne connaissait le fait. Les marchands d'oiseaux ont passé sur l'épaule leurs
volières et prennent de l'avance sans trop de hâte. Quant au changeur, il a saisi tout d'a-
bord une des sébiles qui lui servaient à exhiber ou à recueillir ses monnaies et l'appuie des
deux mains sur son cœur. Son comptoir est encore là, portant la balance et deux autres
espèces de coupes où se distribuaient sans doute les pièces de provenances diverses. L'artiste
a fort bien compris le rôle de cet homme. On sait que les prêtres juifs n acceptaient dans
le temple que des qui ne portassent nul signe tenant de près ou de loin à l'idolâtrie '.
Sous les rois grecs ou les empereurs romains et quand on arrivait de régions étrangères
pour visiter le saint lieu, il fallait donc se procurer des pièces recevables pour l'offrande L
Le changeur avait beau jeu à exploiter ainsi la religion de ses compatriotes : poids, titre,
difficulté de circulation ou de transport, estimation des diverses places commerciales, etc.,
devenaient matière à discussion avec les pèlerins qui n'étaient pas tous en mesure de ré-
soudre ou même d'apprécier les objections faites. Il y a donc lieu de penser qu'on pêchait
là beaucoup en eau trouble, et que Notre-Seigneur ne chargeait pas le tableau en disant :
« D'une maison de prière vous faites un antre de voleurs, n Les vendeurs d'oiseaux (pas-
sereaux et colombes), pour certains rites prescrits ne pouvaient tromper beaucoup sur
n Les monnaies vraiment juives ne portent aucune trace
de créature animée. Tout au pius y voit-on (et encore sous
Agrippa) une main tenant des épis ou des fruits quciconques,
pour rappeler la récolte, dont les prémices devaient être
offertes à Dieu. Cf. C. Cavcdoni, A'MWM'smaMca HMlca,
p. 26-71.
2. Le docte et judicieux C. Cavedoni,dans sa ATwMsmati'eaM-
Mica.fait observer que des monnaies bien diverses eurent cours
dans la Palestine. 11 en 'résultait un besoin de simplification
pour les receveurs lévitiques du sanctuaire. Le semi-sicle
drachme) que chacun devait payer d'après la Loi au dernier
mois de l'année, pour l'entretien du Temple, donnait encore
lieu au change avec ses variations estimées sur nouvelles
commerciales plus ou moins authentiques, et entraînait un
agio empoché parle plus habile des contractants. Cf. op. ciL,
p. 96, sgg.; iL 80-136 et 166.
Les Juifs n'ont jamais passé pour méconnaître la portée
d'un compte débattu. Leurs docteurs prétendent que vers le
temps des Ptolémées, l'Égypte ayant fait mine de vouloir
réclamer l'équivalent des trésors emportés par les Israélites
fugitifs sous la conduite de Moïse, on répondit en Palestine
par un mémoire de dommages et intérêts encore plus vieux.
11 s'agissait d'une réclamation de payements arriérés pour
journées dues à 600,000 Hébreux mis en réquisition par les
Égyptiens durant plus de deux siècles; ce qui, à un denier
par tête et par jour, atteignait la somme de 46,990,000,000.
Cf. !M., p. 164 et 26. C'était plus que prussien.
3. Le même savant (op. clL, p. 161 ; et 109, sg.) constate
quelque différence entre le prix des petits oiseaux à Jérusa-
lem (un sou la paire) durant la vie mortelle de Notre-Sci-
gneur, et celui qu'en payaient les Athéniens au temps d'Aris-
tophane (sept pinsons pour trois sous de notre monnaie).
C'est, dit-il, que les offrandes nombreuses de passereaux en-
jointes par le Lévitique devaient faire hausser la valeur vénale
de ces animaux, tandis qu'ailleurs on ne pouvait guère les
rechercher que comme objet de distraction. Tenons aussi un
certain compte de la différence des époques ou des contrées,
et de ce que les mœurs ou la spéculation peuvent y faire en
temps et lieux.
Les marchands de moineaux à Jérusalem avouaient d'ail-
leurs implicitement que leur commerce n'était pas ruineux,
puisqu'ils accordaient un cinquième oiseau en sus à qui payait
deux paires (Cf. AMHMsmaMca MèHca, p. 110. — Matth.x, 29;
et Luc. xn, 6). En somme, pourtant, les acheteurs grecsn'au-
raient pas été plus favorisés en fait de pinsons, qu'un juif
qui voulait faire monter son emplette jusqu'à trois couples de
passereaux; puisqu'en Palestine il obtenait déjà un cinquième
moineau par-dessus le marché, moyennant deux paires prises
n. — 11