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MÉLANGES D'ARCHÉO LOGEE.
mêler dans les controverses anglaises que soutiennent (/ira courra) des savants de premier
ordre. Il ne me déplaît pas du tout de voir les paléographes se prendre aux cheveux avec
les experts en miniatures ou dessins à la plume; car la confédération de ces deux États
pourrait bien n'avoir pas encore des frontières suffisamment régularisées, quoi qu'on en ait
dit. Un peu de modestie chez tous nos savants, européens ou autres, ne gâtera rien pour
l'avenir. A mon petit avis, si peu qu'il vaille, l'original pourrait être du vu" siècle au plus
tard ;'et, bien que j'aie cru précédemment avoir un certain droit de classer ce genre extraor-
dinaire dans les travaux saxons, il ne me répugnerait pas aujourd'hui de l'attribuer à l'école
irlandaise (où j'avoue n'être pourtant qu'un mince connaisseur). J'avais néanmoins imaginé,
me dira-t-on, que l'ivoire de Charles le Chauve t. I, pl. XI; etp. 43, svv.) pou-
vait bien venir de Bénévent; parce que l'ordonnance de la composition avait un aspect
relativement très-classique, où semblait se montrer l'Italie grecque. Mais alors je suivais
un tout autre point de vue, désavoué depuis p. 249-257); et, si l'on voulait me hon-
toyer pour cette assertion de majeunesse, je pourrais dire avec Turenne : « Qui n'a pas fait de
fautes à la guerre, n'a pas fait la guerre. M Cependant l'école irlandaise, si peu étudiée qu elle
soit, est tellement originale à la fois et cosmopolite en même temps, qu'on ne saurait trop
lui prêter. Les Saxons peuvent lui avoir emprunté beaucoup plus qu'on ne pense.
^ant eu communication du Psautier d'Utrecht que
pour un temps fort limité, où je n'étais même pas
maître de lui donner attention suffisante, je ne pus
l'examiner en détail comme le mériterait ce volume
important. Ceux qui voudront s'en occuper avec le
soin que demande une si curieuse publication y trou-
veraient sans peine le sujet d'un gros mémoire au-
quel je ne dois pas songer ici. Ajoutons que les ca?;-
de l'Ancien et du Nouveau Testament y sont
traités comme le Psautier, avec le G7ona arcc/m, le
Pa%r et le le symbole de saint Athanase, etc.
La singularité de gageure acceptée par les dessina-
teurs s'y complique de scènes du Nouveau Testament
lorsque la prophétie est bien visible dans un psaume; costumes, architecture et technique
d'atelier (pour représenter ruisseaux, rochers, vallons, etc.) mériteraient aussi des observa-
tions qui appellent l'étude d'un homme compétent, et dont je ne puis me donner le plaisir
dans ma course à travers les manuscrits du moyen âg'e. Peut-être cette tâche aura-t-elle
été comprise et acceptée dans quelque recueil qui n'est pas venu jusqu'à moi. Mais, quand
c'aurait été fait déjà, que nul n'en désespère pour l'avenir. Le sujet est trop étendu pour
qu'il n'y ait pas lieu de glaner encore après qui aurait voulu le traiter trop rapidement. Nul
de mes lecteurs ne peut donc dire que je lui aie coupé l'herbe sous le pied en cela, et que
je paraisse blâmer les recherches ultérieures. Passons donc à d'autres considérations tout
aussi transitoires.
Malgré la quasi-exclusion que j'ai donnée à l'Église grecque dans ces études, pour les cir-
conscrire plus nettement, on ne me reprochera sûrement pas d'avoir introduit à cet endroit
deux miniatures du xi° siècle (1056-1067) empruntées au célèbre évangéliaire slavon d'Os-
tromir. Ce semble être le plus ancien vestige des miniateurs russes avant la consommation
du schisme de Photius par Michel Cérulaire. Le manuscrit paraît avoir été fad pour un prince
MÉLANGES D'ARCHÉO LOGEE.
mêler dans les controverses anglaises que soutiennent (/ira courra) des savants de premier
ordre. Il ne me déplaît pas du tout de voir les paléographes se prendre aux cheveux avec
les experts en miniatures ou dessins à la plume; car la confédération de ces deux États
pourrait bien n'avoir pas encore des frontières suffisamment régularisées, quoi qu'on en ait
dit. Un peu de modestie chez tous nos savants, européens ou autres, ne gâtera rien pour
l'avenir. A mon petit avis, si peu qu'il vaille, l'original pourrait être du vu" siècle au plus
tard ;'et, bien que j'aie cru précédemment avoir un certain droit de classer ce genre extraor-
dinaire dans les travaux saxons, il ne me répugnerait pas aujourd'hui de l'attribuer à l'école
irlandaise (où j'avoue n'être pourtant qu'un mince connaisseur). J'avais néanmoins imaginé,
me dira-t-on, que l'ivoire de Charles le Chauve t. I, pl. XI; etp. 43, svv.) pou-
vait bien venir de Bénévent; parce que l'ordonnance de la composition avait un aspect
relativement très-classique, où semblait se montrer l'Italie grecque. Mais alors je suivais
un tout autre point de vue, désavoué depuis p. 249-257); et, si l'on voulait me hon-
toyer pour cette assertion de majeunesse, je pourrais dire avec Turenne : « Qui n'a pas fait de
fautes à la guerre, n'a pas fait la guerre. M Cependant l'école irlandaise, si peu étudiée qu elle
soit, est tellement originale à la fois et cosmopolite en même temps, qu'on ne saurait trop
lui prêter. Les Saxons peuvent lui avoir emprunté beaucoup plus qu'on ne pense.
^ant eu communication du Psautier d'Utrecht que
pour un temps fort limité, où je n'étais même pas
maître de lui donner attention suffisante, je ne pus
l'examiner en détail comme le mériterait ce volume
important. Ceux qui voudront s'en occuper avec le
soin que demande une si curieuse publication y trou-
veraient sans peine le sujet d'un gros mémoire au-
quel je ne dois pas songer ici. Ajoutons que les ca?;-
de l'Ancien et du Nouveau Testament y sont
traités comme le Psautier, avec le G7ona arcc/m, le
Pa%r et le le symbole de saint Athanase, etc.
La singularité de gageure acceptée par les dessina-
teurs s'y complique de scènes du Nouveau Testament
lorsque la prophétie est bien visible dans un psaume; costumes, architecture et technique
d'atelier (pour représenter ruisseaux, rochers, vallons, etc.) mériteraient aussi des observa-
tions qui appellent l'étude d'un homme compétent, et dont je ne puis me donner le plaisir
dans ma course à travers les manuscrits du moyen âg'e. Peut-être cette tâche aura-t-elle
été comprise et acceptée dans quelque recueil qui n'est pas venu jusqu'à moi. Mais, quand
c'aurait été fait déjà, que nul n'en désespère pour l'avenir. Le sujet est trop étendu pour
qu'il n'y ait pas lieu de glaner encore après qui aurait voulu le traiter trop rapidement. Nul
de mes lecteurs ne peut donc dire que je lui aie coupé l'herbe sous le pied en cela, et que
je paraisse blâmer les recherches ultérieures. Passons donc à d'autres considérations tout
aussi transitoires.
Malgré la quasi-exclusion que j'ai donnée à l'Église grecque dans ces études, pour les cir-
conscrire plus nettement, on ne me reprochera sûrement pas d'avoir introduit à cet endroit
deux miniatures du xi° siècle (1056-1067) empruntées au célèbre évangéliaire slavon d'Os-
tromir. Ce semble être le plus ancien vestige des miniateurs russes avant la consommation
du schisme de Photius par Michel Cérulaire. Le manuscrit paraît avoir été fad pour un prince