DOI issue:
No. 1 (1er octobre 1925)
DOI Page / Citation link: https://doi.org/10.11588/diglit.43076#0007
Notions d’Esthétique
VIII. L’ART (Suite).
But de l’art.
Lorsque Dante définit les bas-reliefs
de la montagne du Purgatoire « un par-
ler visible », il donne le vrai but de l’art :
parler à l’âme par les yeux.
Les peintres du moyen-âge n’avaient
pas d’autre ambition et les artistes Sien-
nois du XIVe siècle se .proposaient le
même but, comme en témoignent les
statuts de leur confrérie: « Nous som-
mes, par la grâce de Dieu, ceux qui ma-
nifestent aux hommes grossiers et qui ne
savent pas lire, les choses miraculeuses
opérées par la vertu et en vertu de la
sainte foi \ »
L’art ne se propose pas toujours, et
directement, ce but religieux. Platon
lui assigne pour fin « de donner des corps
à nos pensées et des visages aux idées
éternelles 2. »
I) 'une manière générale on peut dire
que l’art a pour but de manifester le
beau sous une forme sensible qui nous
le fasse aimer et nous procure une satis-
faction morale. Le but de l’art n’est
donc pas uniquement de nous donner ]a
vraie image d’un objet beau en soi.
« Non, c’est avant tout de nous mettre
dans l’âme la vraie, la pure jouissance du
beau 3. »
Nous ne goûterons cette jouissance,
cette émotion esthétique, qu’autant que
l’art manifestera un idéal élevé dans une
forme belle empruntée à la nature et mo-
difiée en beauté par l’imagination créa-
trice de l’artiste. Une œuvre d’art réa-
1. Cit. Henri Cochin. Le Bx Angelico de Fiesole.
2. Platon. Le Philèbe.
3. P. Longhaye. Théorie des belles-lettres.
lisée dans ees conditions se dégagera du
réel assez pour nous élever avec elle vers
les régions supérieures où la beauté ne
parle plus qu’à l’âme seule. L’art attein-
dra, alors, le but que lui marque Joubert
lorsqu’il dit : te Les beaux-arts ont pour
mérite unique, et tous doivent avoir ce
même but de faire imaginer des âmes par
le moyen des corps. » Voituron, qui de-
mande à l’art de manifester l’idéal par la
beauté sensible, lui donne un but moral,
ce Le but de l’art est de faire surgir, par
l’attrait de la beauté sensible et par la
puissance de l’idée et du sentiment,
l’homme intérieur que nous portons en
nous, pour l’opposer aux passions et au
désordre au milieu desquels nous vi-
vons h »
Dans la manifestation du beau, l’œu-
vre d’art doit tenir compte de la loi de
finalité. L’artiste n’exprimera pas un
beau quelconque, mais un beau conve-
nable et en rapport avec la fin de l’œuvre
qu’il veut réaliser.
Au début, l’art ne fut qu’une écri-
ture, une manière d’exprimer les idées
sans aucun souci de la beauté. Les Egyp-
tiens nous ont laissé des spécimens de
cet art sur leurs monuments où les hié-
roglyphes représentent les idées par des
formes sensibles et connues. Plus tard
seulement, les Egyptiens reproduisirent
des scènes de la. vie religieuse, domesti-
que et militaire, dans leurs tombeaux.
Par les définitions qui précèdent et
par le but généralement assigné à l’art,
on voit que l’art a pour mission de nous
1. Voituron. Recherches philos, sur la science du
beau, II, p. 253.
VIII. L’ART (Suite).
But de l’art.
Lorsque Dante définit les bas-reliefs
de la montagne du Purgatoire « un par-
ler visible », il donne le vrai but de l’art :
parler à l’âme par les yeux.
Les peintres du moyen-âge n’avaient
pas d’autre ambition et les artistes Sien-
nois du XIVe siècle se .proposaient le
même but, comme en témoignent les
statuts de leur confrérie: « Nous som-
mes, par la grâce de Dieu, ceux qui ma-
nifestent aux hommes grossiers et qui ne
savent pas lire, les choses miraculeuses
opérées par la vertu et en vertu de la
sainte foi \ »
L’art ne se propose pas toujours, et
directement, ce but religieux. Platon
lui assigne pour fin « de donner des corps
à nos pensées et des visages aux idées
éternelles 2. »
I) 'une manière générale on peut dire
que l’art a pour but de manifester le
beau sous une forme sensible qui nous
le fasse aimer et nous procure une satis-
faction morale. Le but de l’art n’est
donc pas uniquement de nous donner ]a
vraie image d’un objet beau en soi.
« Non, c’est avant tout de nous mettre
dans l’âme la vraie, la pure jouissance du
beau 3. »
Nous ne goûterons cette jouissance,
cette émotion esthétique, qu’autant que
l’art manifestera un idéal élevé dans une
forme belle empruntée à la nature et mo-
difiée en beauté par l’imagination créa-
trice de l’artiste. Une œuvre d’art réa-
1. Cit. Henri Cochin. Le Bx Angelico de Fiesole.
2. Platon. Le Philèbe.
3. P. Longhaye. Théorie des belles-lettres.
lisée dans ees conditions se dégagera du
réel assez pour nous élever avec elle vers
les régions supérieures où la beauté ne
parle plus qu’à l’âme seule. L’art attein-
dra, alors, le but que lui marque Joubert
lorsqu’il dit : te Les beaux-arts ont pour
mérite unique, et tous doivent avoir ce
même but de faire imaginer des âmes par
le moyen des corps. » Voituron, qui de-
mande à l’art de manifester l’idéal par la
beauté sensible, lui donne un but moral,
ce Le but de l’art est de faire surgir, par
l’attrait de la beauté sensible et par la
puissance de l’idée et du sentiment,
l’homme intérieur que nous portons en
nous, pour l’opposer aux passions et au
désordre au milieu desquels nous vi-
vons h »
Dans la manifestation du beau, l’œu-
vre d’art doit tenir compte de la loi de
finalité. L’artiste n’exprimera pas un
beau quelconque, mais un beau conve-
nable et en rapport avec la fin de l’œuvre
qu’il veut réaliser.
Au début, l’art ne fut qu’une écri-
ture, une manière d’exprimer les idées
sans aucun souci de la beauté. Les Egyp-
tiens nous ont laissé des spécimens de
cet art sur leurs monuments où les hié-
roglyphes représentent les idées par des
formes sensibles et connues. Plus tard
seulement, les Egyptiens reproduisirent
des scènes de la. vie religieuse, domesti-
que et militaire, dans leurs tombeaux.
Par les définitions qui précèdent et
par le but généralement assigné à l’art,
on voit que l’art a pour mission de nous
1. Voituron. Recherches philos, sur la science du
beau, II, p. 253.