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Dubois-Maisonneuve, A.; Clener, A. [Ill.]; Millin, Aubin L. [Ill.]
Peintures de vases antiques, vulgairement appelés étrusques (Band 1) — Paris, 1808

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https://doi.org/10.11588/diglit.5677#0065
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DESCRIPTION DES VASES. 39

Les soldats de ce prince voulurent tomber sur Ajax, Achille survint, les écarta
et enfonça sa lance dans la gorge de Memnon qui n'étoit plus couvert de
son bouclier1.

Le peintre a choisi ce dernier moment comme celui qui décide du sort
de son héros. Memnon vient de retirer de son flanc la lance dont Ajax Fa
frappé, la douleur l'a fait tomber sur le genou droit, et en appuyant à terre
cette lance fatale elle s'est brisée ; ce mouvement l'a obligé d'écarter son bou-
clier et de laisser tout le coté droit à découvert. Achille lui a déjà traversé
l'épaule droite d'une de ses lances2, il va lui porter un second coup avec celle
qui reste entre ses mains, et assurer sa victoire par la mort de son ennemi .
Le sol sur lequel Memnon tombe est seulement indiqué par quelques traits
et par quelques points grossièrement tracés.

Quintus de Smyrne dit que les dieux ne furent point indifférents à ce ter-
rible combat, et que Jupiter envoya aux deux héros un bon et un mauvais
génie, dont l'un s'attacha à Achille, l'autre à Memnon4. Notre artiste a suivi
une autre tradition dont l'authenticité est constatée par le titre qui nous reste
de la tragédie d'Eschyle5, et par une ancienne patère dont le savant abbé Lanzi
a donné la véritable explication6. Nous voyons par la tragédie que j'ai citée
et par deux passages classiques d'Homère7 que l'idée de la Psjchostasie est
très ancienne ; c'est une allégorie convenable aux premiers temps de la
poésie pour indiquer la prudence et l'équité que le maître des hommes et des

(i) DlCTYS CrET., IV, VI.

[i) Les héros sont souvent figurés tenant deux lances
à la main: on en trouve des exemples dans Tischbein,
I, pi. XIV, et dans mes Monum. antiq. inéd., I, p. 76,
note 33, et pi. XXIX. Homer. ,passim.

(3) Quintus de Smyrne, II, 4°6 •> dit qu'Achille
blessa d'abord Memnon à l'épaule droite; mais il dé-
crit ensuite les circonstances du combat autrement
qu'elles ne sont ici représentées. Suprà, p. 38 , note 3.

(4) Suprà, ibid.

(5) Suprà, p. 3j, note 4-

(6) Cette belle patère, figurée pi. LXXII, n° 1, a passé
du cabinet de M. Jenkins à Rome dans celui de S. M. le
roi d'Espagne. On y voit les aines d'Achille et de Memnon
qui sont pesées par Mercure dans une balance en pré-
sence d'Apollon. Winkelmann , Monum. ined., n°i33,
avoit cru qu'elle représentoit la pesée des âmes d'A-
chille et d'Hector conformément au récit d'Homère,
77., XXII, 209. Mais M. Lanzi se fonde sur les in-
scriptions dont les figures sont accompagnées ; celles
de tous les autres personnages n'ont rien d'insolite. Au-
près de l'ame de Memnon on lit £ ft^ ^ Evas; M. Lanzi
pense qu'il faut lire eoas, et que ce mot eoas, au géni-
tif eoantis, peut désigner le fils de l'Aurore : cette déesse

en grec se nomme HftS, Eos. Notre vase que M. Lanzi
a également cité, Saggio délia lingua etrusca, part. I,
t. II, p, 0,4 » ph XII, n° 4, et De i Kasi antichi depinti,
72, est une autorité de plus en sa faveur.

(7) Au moment où les Grecs et les Troyens sont sur
le point d'en venir aux mains, Jujnter élève sa balance
d'or ; il y place les deux destinées ( kères ) qui amè-
nent le long sommeil et la mort, celles des Grecs et des
Troyens : il prend la balance par le milieu ; le mal-
heur des Grecs se déclare, leur destinée descend sur la
terre, et celui des Troyens s'élève jusqu'aux cieux. 7/.,
VIII, 69. LorsquAchille et Hector vont combattre,
Homère, 77., XXII, 209, répète les mêmes expres-
sions : Jupiter pèse leurs destinées de la même manière,
le bassin dans lequel est celle d'Hector touche aux en-
fers, et celle d'Achille monte jusqu'aux cieux. Virgile,
jEneid., XII, 7^5, a entièrement suivi Homère; Ju-
piter pèse les destinées d'Enée et deTurnus. Les poètes
modernes ont imité en cela les poètes anciens : selon
Milton, Paradise lost, IV, 996, l'Eternel prend dans
le zodiaque la balance d'or d'Astrée pour peser la des-
tinée du combat entre Satan et les Anges; mais cette
fiction de Milton est un abus de l'érudition et une fausse
application de la mythologie.

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