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L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré — 7.1874

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https://doi.org/10.11588/diglit.6767#0043
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L'ECLIPSE

NOUVELLES

PRIMES DE L'ÉCLIPSÉ

Toute personne qui enverra au directeur du journal le mon-
tant d'un abonnement d'un an, aura droit à une des primes
ci-dessous annoncées et aux conditions suivantes :

1° almanach des travailleurs; illustré par Gill, texte
de E. Zola, J. Claretie.'E. d'Hervilly, E. Siebecker, etc.

Offert gratuitement aux personnes qui le retireront au bu-
reau. — Ajouter T6 centimes au prix de l'abonnement pour le
recevoir franco de port dans les départements.

2° l'album des fleurs, fruits et légumes du jour,
dans lequel Alfred Le Petit a crayonné avec l'humour et l'esprit
de Granville trente-deux charges des hommes célèbres de notre
époque. Ces caricatures, fort réussies, accompagnées de qua-
trains spirituels, sont coloriées avec soin.

L'Album, pris au bureau, i fr.

Ajouter i fr. pour le recevoir franco à domicile.

EN VENTE AU BUREAU DE L'ÉCLIPSÉ :
Titre et table de l'année 1873 du journal YÉclipse. 0 f. 30 c.
(franco 40 cl

Couverture dé l'année 1873 du journal l'Éclipsé, 0 f. 20 c.
(franco 30 c.)

ENCORE LA LOI ÉLECTORALE

cote des kligibles

h ! bien... vrai... si le principe du suf-
frage universel résiste à la façon dont on
tire dessus de tous les"" côtés, «Test qu'il
est solide.

Depuis cinq mois que la commission des Trente s'occupe acti-
vement d'hausmanniser les listes électorale^, {le leur donner, de
l'air en y pratiquant de larges entailles, dé l'es assainir, etc., etc.,
elle n'avait fait peser ses projets d<$ réforme que sur le coté
électeurs.

+ *

Les propositions les plus libérales et les plus paternelles
avaient été faites.
L'un demandait quarante-huit ans d'âge.
L'autre, quinze aus de domicile.

Un troisième — grêlé. — voulait qu'on éloignât du scrutin
tout citoyen qui n'avait pas encore eu la petite vérole.

***

11 y en avait qui proposaient le rétablissement du cens.

Les plus enragés insistaient pour que l'on ne pût voter au-
dessous d'un mètre cinquante de ceinture de pantalon, préten-
dant que le ventre est le signe le plus certain des opinions con-
servatrices.

* *

Bref, la commission des Trente, prenant un peu du projet d.e,
celui-ci, un peu' de l'idée de celui-là, était arrivée à se mettre à
peu près d'accord sur le'çôté électeurs.

On avait calculé que les vingt-cinq ans d'âge, les trois ans de
domici e, etc., etc., enlèveraient une bonne partie des yp.teji
républicains.

Et l'on s'était dit :

— Comme ça... ça pourra aller.

Mais, comme prudence est mère de sûreté, et, qu'en somme,
on n'était pas plus certain que cela que les électeurs conservés
par la nouvelle loi fussent tous des votants bien pensants...

Un membre do la Commission, M. Delsol, homme de pré-
caution, dit à ses collègue» :

— Messieurs, nous avons mis deux millions d'électeurs au
salon des r.efùsjs, c'est fort bien!'... Majjs,".sii nous nous sommes
trompés... si dans ces deux millions d'évincés, il y a autant de
monarchistes que de républicains, le résultat des élections res-
tera le même, et nous nous serons donné le ridicule de nous
faire à notre mesure une loi qui habillera bien tout le monde,
excepté nous.

Les vingt-neuf collègues de M. Delsol lurent frappés de la
justesse de son observation et lui répondirent en chœur :
— Vous avez raison!... mais, comment faire?...

- 11 y auçait un moyen, répondit M. Delsol, ce serait de
rédiger la loi électorale en un seul article, ainsi conçu :

« Sont électeurs toits les citoyens qui voteront pour les candidats
officiels. »

Cela souriait assez aux Trente ; mais l'un d'eux fit observer,
que, peut-être, cette mesure paraîtrait un peu arbitraire.

Alors, M. Delsol, qui était sûr de son petit effet, parla en ces
termes :

* *

— Mes chers collègues... nous avons rogné tant que nous
avons pu du cùté électeurs; mais nous n'avons rien fait du
côté éligibles.

Chœur des vingt-neuf. — C'est vrai!... c'est vrai!.,.

— Décidons que, pour être éligible, il faudra être domicilié
dans le département, ou mieux dans l'arrondisssement, et
comme les radicaux en vue sont généralement fixés dans les
grands centres, nous aurons une masse de localités qui seront
obligées d'envoyer à la Chambre des nullités comme mon hono-
rable compère Belcastel, n'ayant pas d'homme de mérite à leur
pprtée.

Ici, M. Belcastel se leva d'un air vexé, trouvant l'argument
assez désobligeant.

Mais M. Delsol lui fit comprendre que c'était pour le bien de
la cause; or, qu'après tout, il avait dit M. Belcastel comme il
eût pu dire Lorgeril, de Kerdrel ou Du Temple.

Comme bien l'on pense, la Commission se jeta sur la propo -
sition Delsol comme un écrivain bonapartiste sur une lettre
chargée lui arrivant de Chisleiurst.

Elle accepta le projet avec ivresse.

Et voilà cornu10 Quoi — si les conclusions de la Commission
sont accueillies par l'Assemblée, — ces va-nu-pieds de candidats
républicains, qui sont obligés de demeurer dans les grandes
villes pour y gagner leur vie, ne pourront plus aller jeter leur
candidature dans les jambes des châtelains de campagne,
ayant neuf cents ans de domicile dans le même village, de père
en fils.

*

t *

Maintenant, beaucoup de gens se demanderont sans doute
pourquoi un homme qui habite la rue Saint-Lazare depuis dix
ans n'est pas aussi bon qu'un autre pour défendre l'impôt sur le
revenu, la liberté de la presse ou l'instruction gratuite, au nom
des électeurs de Saône-et-Loire, par exemple.

* *

Ces mêmes personnes se diront — peut-être avec quelque
raison — que la Commune ayant été vaincue au nom du prin-
cipe de la grande unité française, il est assez drôle de vouloir
parquer les gens dans des circonscriptions spéciales et d'inter-
dire aux électeurs d'un département de faire venir leurs dépu-
tés d'un département voisin.

Mais tout cela c'est de la politique trop compliquée, et nous
nous bornerons à déplorer la mesure provoquée par M. Delsol
au simple point de vue du libre écliange des produits entre
contrées différentes.

11 serait on ne peut plus fâcheux qu'au moment ou l'établis-
sement des chemins de fer sur tous les points de notre hien-
aimé pays, permet à chacune de nos provinces, d'échanger avec
les autres les produits de son sol, de son commerce et de son
industrie; il serait fâcheux, disions-nous, que» les candidats
fussent la seule marchandise qui ne pût être expédiée d'un
endroit où il y en a beaucoup à un autre où il en manque.

Urâce aux progrès immenses de nos transports, on mange du
saucisson de Lyon partout, des poulardes du Maus partout,
des madeleines de Commercy partout.

Le Périgord a beaucoup de truffes, il en envoie à ceux qui
n'en ont pas.

Les ports de mer envoient du maquereau jusqu'à Batignolles,
qui, livré à ses propres ressources, en mangerait fort peu.

Le Midi, sachant que nous n'avons que nos vieilles plumes
métalliques hors de service pour faire de l'huile à manger, nous
envoie gracieusement le jus de ses olives parfumées.

*

* *

Eulin tout se croise, tout circule, tout se troque.

E* Paris ne pourrait pas envoyer dans le Bordelais, en
échange de ses ' vins si généreux, un candidat de temps en
temps !...

Allons donc!,..

*

* *

il faut que chacun continue à donner aux autres de ce qui
pousse chez lui eu abondance.
Les campagues, leurs bons légumes, frais.
Les villes, leurs bons, républicains avancés.
Voilà la, vraie France !.„

Mais vouloir que chacun consomme sa récolte sur place,sans
en faire part au voisin;

Laisser perdre les choux dans les plaines quand ils feraient
tant de plaisir aux citadins ;

Laissa- inoccupés les républicains dans les cités quand il on
manque dans les campagnes !,..

L'Assemblée nationale ne fera pas cela.

LÉON BIENVENU.

Nous venons de recevoir un mot qui nous touche bien pro-
fondément.

N.o.tre ami Doublemard, l'auteur couronné de la statue du
géi.éral Moncey, nous offre, pour le monument de notre re-
gretté Polo, un médaillon en terre cuite, dont ses amis pour-
raient ensuite se procurer une réduction'.

Nous n'avons pas besoin de dire avec quelle..joie nous accep-
tons cette nouvelle preuve de la sympathie et de l'affection que
notre cher François semait autour de lui.

Et nous rcmerei..,ns de tout cœur notre excellent Doublemar d
pour cette bon- e pensée et ce bon souvenir.

CE QUI RESTE DE CLICHY

En gravissait la rampe escarpée qui conduit du square de la,
Trinité au plateau des Batignolles, vous remarquerez, k mi-
côte, sur la droite,—approchant le milieu de la rue de Clic hy,—
un grand mur déchaperonné, qui semble avoir été mojd.u par
la pioche du démolisseur. Ce grand mur gris, gacé, branlant,
d'une laideur désolée, est pe-cé d'ouvertures qui ont été des
portes et de fenêtres qui n'ont plus que des barreaux.. Or, si
vous mettez l'œil à l'un de ces trous béants, voici ce que vous
apercevrez ;

Un vaste carré de terrain encadré de noir par le derrièredes
maisons à pic qui l'enserrent. L'aspect de ce terrain est affreux.
Ce sont partout des plâtras, des tas de décombres et des taches
de cette vilaine herbe bleuâtre qui pousse, du jour au lende-
main, dans tous les endroits déserts de Paris. Rien n'y vit,
sinon, le soir, des bandes de rats démesurés qui trottent, four-
rageant à travers cette misère et essayant de ruiner ces ruines.

C'est là tout ce qui reste de Clichy.

Clichy I...

La cé.èbre prison pour dettes qui tient udo si large place
dans tous les drames, dans tous les romans parisiens !...
Clichy!...

11 y a de tout dans ces six lettres assemblées ! Des éclats de
ripe et des sanglots, des chocs de verres et des grincements de
verroux, des malédictions et des refrains, — de bons mots, de
méchantes actions!...

Il y a, surtout, des légendes à défrayer plusieurs douzaines
de feuilletons, et des nouvelles à la main à alimenter, —pendant
des mois, — les échotiers de nos journaux !...

Ah ! si les pierres pouvaient parler !...

Tenez, elles vous raconteraient, par exemple, l'histoire de ce
fnmeux A..., semi-italien, semi-grec, — dans toutes les accep-
tions du mot, — sur lequel le guichet de la Dette se referma et
s'ouvrit, en cinq ans, à onze reprises différentes.

La dernière fois qu'il fut bouclé, A... avait ppuisé au dehors
tout son crédit, toutes ses ressources. Il résolut de trouver,
dans l'intérieur même de la prison, les éléments de sa déli-
vrance.

Faire payer ses créanciers par un co-détenu ! C'est incroya-
ble, n'est-ce pas? Il y réussit cependant.

Il y avait alors, à Clichy, le iils d'un prince moldave colossa-
lement riche. Cet étranger mangeait, d'ordinaire, en six mois
une pension de cent mille francs. Le reste du temps, il souscri-
vait des lettres de change que son père acquittait, sans trop se
faire prier.

Je ne sais quel accident retarda un envoi de deux mille du-
cats, — et notre Moldave fut appréhendé au corps, un beau
matin, par messieurs les gardes du commerce.

Il supporta, du reste, sa captivité gaiement, — persuadé
qu'elle ne pouvait durer.

Eu effet, le galion paternel arriva au bout d'une semaine.

Avant de quitter les compagnons de détention qui n'auraient
pas, comme lui, le bonheur de fouler, dans quelques instants,
l'asphalte du boulevard, le bon jeune homme désira leur offrir un
splendide déjeuner.

A... fut du nombre des invités, — bien entendu.

On but énormément.

Quand les têtes furent échauffées à un degré convenable,
notre gentleman d'industrie proposa aux convives un petit lans-
quenet à cinq sous, — uniquement en manière de distraction.

Cette motion fut acceptée avec enthousiasme.

Quatre heures après, A... avait gagné les deux mille ducats
du Moldave et sortait de Clichy à sa place.

Clichy a vu plus d'une grande dame fouler d'un pied mignon
les dalles de son préau.

La charmante femme, entre autres, d'un haut fonctionnaire
de l'Empire, y séjourna quelque temps à la requête de sa mo-
diste et de sa couturière.

Le jour où on l'y écroua, elle télégraphia à son mari, — en
mission à l'étranger, — cette ligne d'une brièveté éloquente :

« Je suis à la prison pour dettes. »

Le fonctionnaire riposta immédia'cment :

« Restez-y ; mais demandez une chambre au soleil. »

La dame prit son parti...

Mais elle était intriguée...

Elle envoya une nouvelle dépêche :

« Pourquoi une chambre au soleil t »

Le mari répartit, — impitoyable, — mais galant :

« Parce que les tleurs s'étiolent à l'ombre. »

F ne dernière anecdote, qui peut passer pour la revanche de
celhs qui précède :

Un gentilhomme récemment marié, le comte de B..., incar-
céré pour une facture de tapissier, écrivait à ce fournisseur :

« V. ici dix mois que vous me détenez à Clichy bêlement.
Ces t une rigueur inutile. Vous savez par aitement que je ne
puis entrer en jouissance de ma fortune, et, par conséquent,
voua solder qu'en décembre prochain. D'ici là, ne réfléchissez-
vous pas qu'il est bien sot à vous d'entretenir dans la maison
d'arrêt un pensionnaire à quarante-cinq francs par mois, pour
le barbare plaisir de le priver de sa liberté et de le séparer de
sa pauvre jeune femme, que désole un veuvage anticipé. »

Le tapïssier répondit :

« Monsieur le Comte,
« Voilà neuf mois que me sont venues, sans la secours de
personne, les réilexions que vous me communiquez. C'est pour-
quoi, le premierjour du deuxième mois de votre incarcération,
je n'ai pas versé à l'administration la provision légale sans la-
quelle, vous ne sauriez être retenu. Je vous croyais sorti depuis
ce temps. 11 faut que quelqu'autre de vos créanciers ait eu la
fâcheuse pensée de vous accompagner de sa recommandation,
oubliant qu'un homme comme vous se recommande par lui-
même. »

— Quel est ce mystère? se demanda le prisonnier.

11 n'était le débiteur d'aucun autre individu...

Et, pourtant, la provisiou alimentaire exigée par la loi arri-
vait au jour et à l'heure avec une ponctualité significative!...

La lettre du tapissier fut mise sous les yeux du directeur de
Clichy ..

Celui-ci, à la plus prochaine échéance, lit arrêter le porteur
des quarante-cinq francs...
On l'interrogea..-

Et le comte eut le mot de l'énigme. Il apprit qui lui té-
moignait, — en prison, — ce: tendre et persévérant intérêt :
C'était sa femme !

PAUL MAHALIN.
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