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L' Eclipse: journal hebdomadaire politique, satirique et illustré — 7.1874

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https://doi.org/10.11588/diglit.6767#0091
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L'ECLIPSE

AVIS IMPORTANT. — I^es souscrip-
teurs à rÉolipso dont l'abonnement ex-
pire le 15 juin, sont pries de le
renouveler sans retard, s'ils ne veulent
point subir d'interrnption dans la ré-
ception du journal.

Ll TORTIE ET LE CHEfllï DE FER

FABLE

Dédiée aux mânes de M. VIENNET

Du fond d'un parc royal... de Seine-et-Oisc
Où sa marche pesante écrasait le gazon,
Une vieille tortue, en sa vieille raison,

Imagina de chercher noise
A l'express dont le vol dévore l'horizon...
Hors de sa carapace on vit cette tortue

Indignée allonger jusqu'où
Faire se put, sa tête aplatie et pointue
Pour crier au coureur terrible : casse-cou !
Comme loin de stopper, sourd à celte voix sage,

Le train doublait son élan hasardeux,
« 11 faut sauver les fous, dit-elle, en dépit d'eux ;

Courons lui barrer le passage! »
— Or activant, autant que son lourd attirail
Le permet, sa course hâtive,
A peine elle a gagné le rail
Que sur elle grondant, fond la locomoti/e...
Elle a beau rentrer prestement
La tête dans sa carapace,
Hélas 1 que fait au train qui passe
L'imperceptible craquement ?

morale : Si lentement'qil'allle

La routine, à sa perte clic n'en court que mieux.

Bonne au dos, l'écaillé

Est funeste aux yeux.

AND. GILL

UNE RÉOIOJ [INTIME DES C1IEVAI LÉ«ERS

l y a trois jours, chacun des mem-
bres de l'extrême droite recevait un
petit billet ainsi conçu :

« M. *** a l'honneur de prier M. ***,
« son collègue, de venir passer la soirée
« chez lui demnn. — On fera un peu
« de musique et on causera biaucoup de
« l'élection de la Nièvre. »

Signé : ***

Le lendemain, les invités étaient au complet; et après les
compliments d'usage, la conversation commença.

Le maître de la maison. — N'êtes-vous pas d'avis,
comme moi, messieurs, que l'élection bonapartiste qui vient de
s'accomplir si inopinément dans la Nièvre mérite toute notre
attention ?

M. Dahiuel. — Le fait est que ce résultat peut, il est vrai,
faire enrager les républicains ; mais que pour nous il manque
un peu de gaîté.

M. Lorgeril. — Je crois bien!. . 4,000 voix sur 80,000 vo-
tants, notre candidat!... c'est mince.

M.Lucien Brun, avec dé.iain. — Oh!... les élections, en
somme, cela ne signifie rien pour nous... S'il fallait faire atten-
tion au suffrage universel !... on n'en finirait pas.

M. de Kerdrel. — D'accord; mais alors, il faudrait ne
pas faire voter du tout. Si l'on ne volait pas, nous pourrions
dire que le pays est pour nous, tandis qu'en faisant voter, tous
les suffrages que nous n'avons pss, ça se voit.

Le maître de la maison. — Vous avez parfaitement rai-
son ; mais comment alloDS-nous nous y prendre pour faire face
à cette nouvelle situation? car il est évident que si nous laissons
les choses aller de ce train-là, la faiblesse numérique ie notre
parti va sauter aux yeux cle tout le monde.

m. Lorgeril. — C'est sûr.

Le maître de la maison. — Et avant trois mois, le pays
va voir qu'il n'y a plus que deux gouvernements possibles en
France : la République ou l'Empire.

M. de Kerveguen, avec feu. — L'Empire!... jamais!...

m. Belcastel, avec force. — La République!... jamais!...

Le maître de la maison. — Jamais!... jamais!... Cela
vous est bien facile à dire ; mais il n'est pas moins vrai que nous
courons à l'une ou l'autre de ces deux solutions.

M. Lucien Brun. — Le fait est que nous avons été passable-
ment roulés quand nous avons fait notre alliance avec les bona-
partistes... Un méchant petit parti de deux sous qui ne parais-
sait plus avoir de souflle... et qui, aujourd'hui!...

M. Lorgbril. — Ça... c'est vrai... Nous l'avions pris tout
simplement pour nous aider à pousser un peu la charrette par
derrière... et maintenant, voilà qu'il est presque "sur le siège...

Le maître de la maison. — Oui, messieurs ; mais toutes
ces récriminations ne nous avancent pas... Que faire, pour évi-
ter de sombrer?

M. Dahirel. — Oh!... pour sombrer, nous sombrerons,
c'est sûr. Toute la question est détacher do tomber du meilleur
côté possible.

M. Lorgeril. — Qu'entendez-vous par ces paroles?

M. Dahirel. — Dame!... c'est bien simple. Notre roy est
flambé pour le moment, n'est-ce pas? Avant de le restaurer, il
faut que nous avalions l'empire ou la République. Il ne s'agit
donc plus que de savoir lequel de ces deux gouvernements doit
nous laisser le plus tôt la place libre, et de le faire tout de suite
pour qu'il nous fasse attendre moins longtemps.

M. Lucien Brun. — J'admire le machiavélisme de mon
honorable confrère M- Dahirel, et je partage entièrement sa
manière de voir.

Le maître de la maison, — Moi aussi. Nous avons donc
le choix entre deux plans très-clairs. Si nous voulons faire l'em-
pire, prolongeons le statu quo, éternisons le provisoire ; chaque
jour le pays se lassera davantage, et grâce aux préfets qui sup-
priment tous les journaux républicains, les populations des
campagnes redeviendront tout doucement mûres pour le plé-
biscite.

M. de KerveCxUen.— Très bien.

Le maître de la maison. — Si, au contraire, nous pen-
sons que la République nous débarrassera plus tôt, poussons à
la dissolution.

M. Lucien Brun. — Parfait !... Reste à savoir maintenant
quel est celui qui doit s'évanouir le plus vite de la République
ou de l'empire.

M. de Kerdrel. — Moi, je crois que nous avons intérêt à
faire l'empire. Il ne tiendra pas trois mois, il y aura une révo-
lution... et alors...

M. Lorgeril. — Pas si vite, cher confrère. Déjà, en 1848,
nous avons été jobardés par le même procédé. Nous nous di-
sions : Bonaparte n'en a pas pour six semaines., et il en a eu
pour vingt-deux ans !...

M. Lucien Brun. — J'opine dans le sens de M. de Lorgeril.
Si nous poussons à l'empire, nous sommes encore reculés de
vingt ans... Les bonapartistes sont les seuls qui savent vrai-
ment se servir du pouvoir quand ils tiennent le bon bout.
Comme ils n'ont pas plus de scrupules que d'argent, ils défen-
dent leur porte-monnaie par tous les moyens possibles, et quand
ils seront au pouvoir, ca ne sera pas de sitôt que nous pourrons
en approcher.

M. de Lorgeril. — Fort bien raisonné... Aussi je croîs
que notre intérêt est de faire ou de laisser faire la République.
La République,., à la bonne heure ! Voilà une brave fille qui
se laisse rouler à tout coup !... Quand nos ennemis l'auront
faite, il seront si enchantés de leur succès que, selon leur loua-
ble habitude, ils ne penseront à exiler aucun prétendant, à
destituer aucun fonctionnaire, et nous resterons dans la place.

M. de Kerveguen. — Le fait est que ces gens-là sont si
bêtes qu'ils croient à la sincérité de tout le monde.

M. Lorgeril. -- Quand ils ont planté onzj arbres de liber-
té, ils s'imaginent avoir déraciné tous les vieux préjugés. C'est
bien le gouvernement qui nous mènera le plus sûrement à nos
fins.

Le maître de la maison. — Je me rallie complètement
à l'avis de mes honorables collègues. Qu'est-ce qu'il faut à
wotre parti en attendant qu'il puisse tenter un coup décisif? Il
lui faut un gouvernement assez naïf pour dormir les portes ou-
vertes. Seul le gouvernement républicain est capable de cet acte
absurde, il l'a prouvé déjà plusieurs fois.

{Chaleureux applaudissements.)

On se sépare complètement d'accord sur ce point quo les
royalistes — impuissants pour l'instant — doivent pousser à
l'établissement de la République à titre d'enlr'acte, et qu'à la
prochaine occasion, on coupera l'herbe sous... le nez aux bona-
partistes en votant pour la dissolution.

*

* *

Maintenant voilà le parti républicain prévenu. La droite très-
probablement va préparer le triomphe de la République pour
se garer de l'Empire qui lui paraît devoir durer plus long-
temps.

Une fois faite, la République « dormira-t-elle encore cette
fois les portes ouvertes » comme on l'espère ?
Voi'à la question !...

LÉON BIENVENU.

CHOSES ET AUTRES

A force de chercher, j'ai trouvé un Calino, a\ocat.

Il avait grande confiance dans le succès de don Carlos et
s'était chargé d'une affaire pour un Espagnol ami des rois
légitimes qui lui avait promis unè décoration 'du futur
Charles VIL

Malheureusement, depuis lu dernière débâcle, les espérances
du ruban soAÏ évanouies. Calino est désillusionné.
Hier un nouveau client se présente chez l'avocat.

— Monsieur, dit-il, je viens pour une affaire de revendication
d'un doa manuel.

— Don manuel, s'écria Calino, allez ailleurs; je ne veux plus
avoir affaire aux Espagnols !

Depuis qu'il est prouvé qu'on peut avaler sans danger une
fourchette en argent, il s'est élevé un chœur de regrets en

Allemagne :

— Que de couverts nous aurions pu emporter, répètent sol-
dats et landwehrs, si nous avions su cela !

Monsieur... {vous ne tenez pas à ce que je le pomme) quoique
marié, n'a pas renoncé aux conquêtes de hasard.

En général il jette, partout où il arrive, son dévolu sur la
partie féminine du personnel domestique.

Sa femme (qui connaît toutes les faiblesses de son mari, y
compris celle-ci) l'excusait dernièrement :

— Que voulez-voUs> disait-elle, chez lui, la première idée,
ç'est toujours la bonfle ! • ■

Il est question maintenant de faire payer des droits d'entrée
aux escargots.
— Encore un impôt sur la petite vitesse.

On sait qu'il y a une brouille entre M. de Bismark et
M. d'Arnim, son ancien ambassadeur à Paris. Ce dernier est
fort arnimô contre le chancelier.

La Gazette de l'Allemagne dit à ce sujet que l'attitude de cer-
tains journaux français qui prennent parti contre M. BismarK,
donne lieu à de sérieuses reflexions et qu'on en prend bonne note en
Allemagne.

— Eh bien ! vrai, là, ça ne m'étonne pas !
Ces Allemands ! ils ne négligent jamais l'occasion de prendre
quelque chose.

GEORGES STENNE.

TYPES DE PROVINCE

REVE DE JEUNE FILLE

e soir, parfois, les murmures puissants que
font entendre, autour de chez moi, les grands
arbres secoués avec rage par les bourrasques
d'équinoxe m'arrachent à la lecture com-
mencée, et mon esprit se met à dévider silen-
cieusement l'écheveau des rêveries et des
souvenirs.

J'écoute, par exemple, une girouette (la dernière peut-être
du faubourg que j'habite) grincr sur le toit de mi demeure,
et les gémissements métalliques qu'elle pousse me rappellent
tout de suite les plaintes pénibles d'une autre girouette rouillée
depuis cent aos peut-être par les pluies d'hiver, au faîte d'une
vieille maison de province, et qui me glaçaient d'effroi jadis.

Dans cette vieille maison qui s'adosse au mur d'un parc, j
quand j'étais tout enfant, j'ai passé de gaies journées. Les soi-
r'es, je dois l'avouer, étaient beaucoup moins joyeuses. La fil- ,
taie qui verdoyait, majestueuse et vénérable, derrière la mai-
son, exhalait, ie soir, d'immenses soupirs très-lamentables, et
dans mon Ht, je frissonnais fréquemment en y prêtant l'oreille'

Et puis, il faut dire aussi, pour ma justification, que, pen-
dant le jour, ma cousine, une jolie petite fille très-blonde, très-
frêle, qui n'avait rien du tout d'une paysanne et que j'adorais,
naturellement, se plaisait à me faire part de tous les contes de
bonne femme qui couraient les environs. Elle me racontai'
d'épouvantables histoires de personnes assassinées dans le parc
et qu'on avait enterrées dans les taillis. Elle s'amusait encore
(peut être croyait-elle à tout cela très-sincèrement ?) à me dire
que les hurlements mélancoliques de la girouette de la maison
annonçaient indubitablement la mort de quelqu'un.

Et dame, la nuit, quand réveillé en sursaut, tout en sueur,
j'écoutais les grincements sinistres de cette maudite machine
de fer, j'avais une chienne de peur. Je croyais que mon tout
allait venir. Et cela m'ennuyait extrêmement. Car, le lende-
main, on devait, soit aller en bateau sur le Rù qui serpente dan«
le parc, soit se rendre chez une meunière habile en l'art défaire
de la galette, soit monter à âne. Et l'idée de manquer l'un o« |
l'autre de ces plaisirs, par le fait d'une mort évidemment pré'
maturée, me navrait tout à fait.

Donc, maintenant je pense parfois, et non sans plaisir, quand
le vent d'équinoxe souffle autour de chez moi, aux soirées jadis ;
assombries par les hurlements profonds des arbres et de la gi' !
rou'Cttè» <ïûe j'ai passées dans la vieille maison de province.

Et je pense aussi à la jolie petite campagnarde (je vois tou-
jours son énorme bonnet de vieille!; qui est ma parente, et vit;
ÎA-btts, solitaire, surtout le soir.

Surtout le soir: car son père, veuf de bonne heure, a pris
insensiblement l'habitude, depuis de longues années déjà, d'al-
ler faire une partie de cartes dans une auberge du pays, et il
laisse seule la jeuae fille, dès la tombée de la nuit.

La jeune fille reste seule, le soir, dans une vaste chambre
plafond haut ; et, près de la grande cheminée dont le feu s'éteint»
elle ressemble à une Cendiillon songeuse gardant le logis, pe:
dant quo ses sœurs sont au bal.

Que fait ma cousine? A quoi rêve cette jeune fille solitaire
qui fut si blonde et si frêle, et qui me parlait si gravement de*
morts annoncés par les grincements de la girouette?

Ce qu'elle fait, je puis vous le dire; car ma cousine n'a fai
aucune difficulté pour l'avouer, un soir que jo lui avais pos^
la question.

Elle fait « des héritages, n

Qu'Alfred de Musset s'en tonsole;mais ce n'est pas d'un jeune
homme inconnu, en manteau de velours noir, et dont les épe-
rons d'argent brillent dans l'herbe aux rayons de la lune, que
rêve la jeune paysanne assise, dans la cendre, au coin de l'âtre
gigantesque.

Elle fait « de* héritages. »

Elle m'a fait part un jour (nous étions grands, alors), de cet
occupation étrange, avec le calme et l'indifférence qu'elle appo;
tait jadis en me parlant des décès futurs proclamés par la
rouette.

Ah! mon Dieu oui, la petite paysanne, toujours jolie comme
Greuze, qui est ma parente, m'a dit cela très tranquillement v$
jour, en causant de choses et d'autres.

Elle fait « des héritages. » C'est son jeu, sa distraction, s<*
plaisir de chaque soir.

Assise sur sa chaise basse, croisant sur son genou ses mai
jointes, les yeux perdus d'ans la flamme du foyer, elle pense
ceux de ses parents qttô leur âge où leur constitution fero-
bientôt dégringoler dans là tombe.

Elle calcule avec Un sourire grave ce que chacune de
morts mettra de lingi tians son armoire et de pièces de ce
sous chez le notaire de la ville voisine. Elle se dit que ses J?3
rents de Paris mènent une vie fiévreuse, qu'ils respirent11 {
mauvais, air, que la dernière fois qu'ils sont venus ils étaie11

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