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Faure, Élie
Histoire de l'art (5): L'esprit des formes — Paris: Éditions d'histoire et d'art, Librarie Plon, 1949

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https://doi.org/10.11588/diglit.71100#0097
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Il ne faut pas aller bien loin pour trouver des exemples
émouvants de ces différenciations irrésistibles qui donnent
aux constructions de provinces voisines l'accent tranché de
ces provinces, même quand ces constructions servent au
même usage, visent à la même fin. Un même principe rigou-
reux détermine, par exemple, toute l'architecture ogivale de
la France du moyen âge. Cependant regardez cette terre
d'Ile-de-France où frémissent les ruisseaux, où frémissent
les verdures, où la boue des chemins est saturée de feuilles
mortes, où la vapeur d'eau ensoleillée colore en mauve l'at-
mosphère et puis ces tours qui s'en élèvent, mauves aussi
le soir, murmurantes de métiers, couvertes de plantes sau-
vages, animées, verdâtres, tremblantes comme un pré
mouillé : si leurs murs offrent au jour diffus des surfaces
verruqueuses, c'est pour qu'il puisse jouer à l'aise dans
leurs anfractuosités (i). Regardez d'autre part ce sol langue-
docien ou provençal dont le roc perce l'écorce et ces forte-
resses farouches, nues comme un désert de pierre, où la
flamme des ogives monte entre les contreforts roux : la
lumière du Sud ne peut plus mordre sur elles qui s'y offrent
en un seul bloc, sachant que l'ornement et le jeu des sur-
faces seraient masqués par le feu (2).
Traversez maintenant quelque contrée antique où le siècle
a peu pénétré, où les villes et les villages sont restés ce qu'ils
étaient il y a trois ou quatre cents ans, trois ou quatre mille
ans peut-être, où l'homme même, par l'aspect, par les mœurs,
par le costume, par les idées, a peu changé. Tout y paraît
émanation, et même fonction de la terre. Voyez, au bord du
Nil, ces temples réguliers, d'arêtes rectilignes, répétant l'as-
pect des falaises qui bordent la Vallée des Rois, leurs salles
hypostyles où des fûts droits sommés de feuilles rappellent
les palmeraies claires sous lesquelles il fait jour (3). Voyez
ces petits temples grecs couronnant les promontoires qui
semblent leurs socles naturels, et leurs frontons triangu-
laires comme la forme des collines où pas un arbre ne pousse,
(!) Fig. 33, 40, 50 et 75.
(2) Fig. 71 et 72.
(3) Art Antique, p. 58.

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