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Faure, Élie
Histoire de l'art (5): L'esprit des formes — Paris: Éditions d'histoire et d'art, Librarie Plon, 1949

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https://doi.org/10.11588/diglit.71100#0123
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dicte le « sujet », que c'est même là son rôle le moins contes-
table, mais aussi le moins important, car le Musée de Ver-
sailles, qui conte l'épopée guerrière française, est beaucoup
moins français, en comptant ses cinquante salles, que telle
tasse de Chardin sur le coin d'un évier (i). Quand nous
aurons dit, par exemple, que l'art picard et champenois du
moyen âge, parce qu'il parle surtout des moissons et des
vendanges, révèle un peuple de cultivateurs ; que l'art hollan-
dais, parce qu'il nous entretient de la mer, des pâturages,
des établis, des officines, exprime un peuple de marins, d'éle-
veurs, de boutiquiers; que l'art anglais, parce qu'il nous
promène dans des parcs avec de beaux enfants et de gra-
cieuses femmes exprime une riche aristocratie, nous ne sau-
rons à peu près rien de l'art champenois ou picard, hollan-
dais ou anglais. Au contraire, nous saurons beaucoup du
peuple italien, dont l'art ne conte que fort peu les occupa-
tions journalières, si nous en montrons les tendances intel-
lectuelles, l'énergie tendue et passionnée, la volonté de
continuité structurale dans le drame du mouvement. Beau-
coup du peuple espagnol si nous insistons sur ses harmonies
mystérieuses, sa force lointaine et secrète, son goût du
silence, plus que sur les mendiants, les estropiés et les idiots
dont il nous entretient si fréquemment. Beaucoup du peuple
assyrien, beaucoup du peuple persan, si nous comparons la
cruauté des scènes de chasse et de guerre dont nous parle
l'art du premier, à l'élégance des scènes de chasse et de
guerre dont nous parle l'art du second. L'art aztèque, je
crois bien, ne nous a pas laissé une seule de ces scènes de
supplice qu'on trouve si fréquemment, par exemple, sur les
tableaux des paisibles bourgeois de Gand, ou de Bruges :
il nous révèle, cependant, un peuple de bourreaux (2).
(1) Fig. 87.
(2) Art Médiéval, p. 113.

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