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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 8.1860

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Galichon, Émile: École allemande [3]: Albert Dürer sa vie et ses œuvres
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ALBERT DURER. 97

chez les maîtres italiens, pénétré de la haute mission qu'il vient remplir;
il sourit et pleure comme les enfants des hommes. Plus tard, son corps
robuste, caché sous une large robe, son front élevé, son nez aquilin, sa
barbe épaisse, ses cheveux qui retombent en boucles sur ses épaules, rap-
pelleront le portrait qu'Albert Durer a fait de lui-même. La physionomie
de Jésus-Christ, empreinte d'une mélancolie touchante, peint bien
l'homme juste qui succombe sous la douleur en se résignant; mais sur
son front on chercherait en vain le reflet divin qui trahit un Dieu descendu
du ciel pour sauver l'humanité.

Quant aux costumes et aux objets dont le peintre allemand revêt et
entoure ses personnages, ils sont ceux que les modes de son temps et de
son pays consacraient. Le recueil de ses estampes est d'autant plus inté-
ressant à consulter pour l'étude de l'Allemagne à cette grande époque,
qu'on y trouve traduits avec un égal scrupule la brillante armure des
reîtres, le harnachement de leurs chevaux, le riche costume du seigneur,
l'élégante toilette des dames et le modeste habillement du pauvre.

Mais ce ne fut pas seulement en reproduisant les traits et les habi-
tudes des hommes que le maître de Nuremberg manifesta son génie; il
fut encore un des peintres qui surent le mieux comprendre et traduire
l'attitude et le caractère propre des autres êtres de la création. Personne
mieux que lui ne réussit à rendre le frêle tissu de la fleur, le léger plumage
de l'oiseau, la moelleuse fourrure ou le poil luisant et fin des animaux.

Pour ce qui est des paysages d'Albert Durer, ils ont plus *de pitto-
resque que de grandiose; ils sont plantés d'arbres aux branches brisées
par la tempête, bornés par la mer que sillonnent d'élégantes carènes, ou
par des montagnes escarpées violemment déchirées par l'action volca-
nique des premiers âges, et couronnées de châteaux forts traités avec
autant d'importance que la fleur qui émaille les premiers plans. Les
lignes y manquent de simplicité, les plans de largeur, et la perspective
aérienne y fait absolument défaut. Cependant, ces paysages intéressent
par leurs détails précieux, plaisent par la conscience de l'étude, la naïveté
du rendu, et s'harmonisent parfaitement avecles personnages qu'ils enca-
drent. Aux qualités qui distinguent le peintre de figures, d'animaux et de
paysage, Durer joignit encore-celles de l'ornemaniste. Ses habitudes d'ob-
servation, la nature de son génie le portèrent, le plus souvent, à pui-
ser ses motifs parmi les éléments mêmes de la nature, et non parmi ces
rires chimériques, ces enroulements fantastiques, pures créations de
l'imagination1.

1. Connu.' spécimen du goût d'Albert Durer en ce genre, nous offrons à nos lecteurs
le fac-similé d'un dessin à la plume tiré de la riche collection de M. Gatteaux.
 
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