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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 13.1862

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Nr. 5
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Delaborde, Henri: De quelques traditions de l'art francais à propos du tableau de M. Ingres Jésus au Milieu des Docteurs
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https://doi.org/10.11588/diglit.17332#0406

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386

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

et les caractères, si longtemps méconnus ou dédaignés, de notre vieil art
national, ne nous trouvent plus indifférents aujourd'hui. Des écrits, diver-
sement instructifs, ont eu raison sur ce point de nos préjugés ou de notre
ignorance. Depuis quelques années surtout, nous avons appris à être
plus fiers de notre passé, à honorer comme il convient, chez les aïeux ou
chez les descendants de Poussin et de Lesueur, ce ferme bon sens, ce
goût pour les vérités morales qui, malgré des infidélités apparentes,
est demeuré jusqu'au siècle où nous sommes la vertu intime et l'inspira-
tion même de l'art français. D'un autre côté, la désillusion commence à
nous venir en ce qui concerne certaines innovations acceptées d'abord
comme des conquêtes de l'esprit libéral, mais dont la multiplicité même
et les prétentions contradictoires dénoncent assez clairement le caractère
anarchique. On cessera bientôt, on a cessé déjà d'être dupe ou complice
des violences aussi bien que des subtilités pittoresques. Ces imitations
menues ou brutales de la réalité opposées aux afféteries ou à l'archaïsme
du style, ces tours d'adresse de l'outil en regard de je ne sais quel
sentimentalisme pleurard se formulant tantôt en complaintes vulgaires,
tantôt en élégies puériles, tous ces démentis aux vrais instincts de notre
école et de notre goût sont bien près de ne plus abuser personne. On
croit, et on a raison de croire, aux progrès accomplis depuis quelques
années dans la peinture de genre et dans la peinture de paysage; poux
ce qui est de la peinture d'un autre ordre et des récentes transformations
qu'elle a subies, à notre confiance d'hier succède aujourd'hui le scepti-
cisme. Peut-être l'ancienne foi nous reviendra-t-elle demain; peut-être
la conversion qu'auront préparée déjà quelques œuvres d'élite, quelques
grands travaux de peinture monumentale, se déterminera-t-elle en face
du nouveau tableau de M. Ingres, et sentirons-nous s'achever, avec
notre admiration pour un maître, un juste mouvement d'attention aux
traditions qu'il continue.

Où trouver en effet des enseignements plus formels sur la fonction de
l'art, et particulièrement de l'art français? Rien de pédantesque pourtant,
rien d'amer ni de morose dans cette leçon à notre adresse. En représentant
Jésus au milieu des docteurs, Y illustre maître n'a voulu se souvenir que de
la scène qu'il avait à peindre, comme s'il ne lui appartenait pas, en figurant
cette douce victoire de la vérité sur les sophismes, d'en renouveler à son
tour quelque chose par l'action personnelle qu'il exercerait sur nous. De
là l'extrême sérénité des intentions et du faire, la certitude, la facilité
du style, les marques en toutes choses d'une science sûre d'elle-même
et d'un esprit fortement convaincu. Point de tâtonnements ni de demi-
mesures; point de recherches minutieuses non plus, ni d'aperçus trop
 
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