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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 22.1867

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Nr. 5
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Burty, Philippe: L' Exposition des Amis des Arts de Bordeaux
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https://doi.org/10.11588/diglit.19883#0510

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EXPOSITION DE BORDEAUX.

â85

que tous ces vaillants lutteurs ont conquis le suprême repos, et leurs
ouvrages, si violemment discutés, ont pris place clans des cabinets qui
ne s’en dessaisissent plus. Puis, on ne rencontre que très-difficilement,
dans les ateliers ou même chez les marchands de bonne volonté, les
quelques grandes toiles indispensables pour relever l’apparence générale
d’une exhibition, et lui donner une allure plus sérieuse. Enfin, et c’est
là le point le plus délicat, le prix des objets cl’art tend de plus en plus à
monter, et dès qu’un artiste a conquis un premier succès, il exige pour ses
moindres toiles ce que les maîtres de la grande génération qui s’éteint
osaient à peine demander pour leurs chefs-d’œuvre. Nous n’y trouvons
point à redire, puisque chacun est esclave des nécessités de la société
nouvelle. Mais le grand inconvénient et le danger pour l’école entière, c’est
que certains jeunes artistes se sont laissé prendre à l’entreprise, comme
des manœuvres qui s’embauchent. Ce sont leurs entrepreneurs qu’il faut
blâmer des prix exorbitants qu’ils demandent pour les pochades les plus
insuffisantes, mais ce sont eux qu’il faut plaindre de ne point avoir le cou-
rage de se jeter à corps perdu dans la mêlée. Outre que la lutte modeste,
persistante, désintéressée, est une période d’initiation où se trempent le
cœur, l’esprit, le caractère, la main, et devant laquelle n’ont faibli aucun
de ceux qui sont devenus de grands artistes, cette assurance prématurée
d’avoir le placement des moindres esquisses empêche les longues mé-
ditations, les essais, les repentirs, les veillées anxieuses ; cette néces-
sité de remplir loyalement les conditions d’un traité interdit les études,
les lectures, les promenades, et jusqu’à ces moments d’inaction appa-
rente pendant lesquels se précipite le mystérieux bouillonnement de la
pensée.

Notre ferme espoir est que l’élévation constante du marché parisien,
— si le terme est dur, il n’est malheureusement que juste, — aidera à
cette reconstitution des écoles provinciales que nous appelons de tous nos
vœux. Les artistes locaux, élevés dans les écoles ouvertes et patronnées
par les municipalités, seront de plus en plus distingués par leurs conci-
toyens, et encouragés, dès leurs débuts, par les Sociétés.

A ce propos, qu’on nous permette de nous appuyer d’une autorité
dont nous prisons bien haut la compétence. Cette page, empruntée à
l’impartiale étude publiée tout récemment sur Ingres par M. Henri Dela-
borde1, explique sous la forme la plus digne ce qu’était dans l’ancienne
société un artiste provincial et ce qu’il pourrait redevenir. « Depuis que
Paris est devenu le point de mire de toutes les ambitions et comme le

1. Jean-Dominique Ingres, sa vie et ses œuvres, Revue des Deux Mondes, Ier avril
1867.
 
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