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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 10.1874

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Nr. 3
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Ménard, René: Paul Baudry, [3]
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https://doi.org/10.11588/diglit.21839#0258

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

2 hh

haut, Bellone qui pousse le cri de guerre? Voyez-vous ce guerrier que la
musique enivré, et qui, le fer en main, va enjamber les cadavres amon-
celés pour se ruer sur l’armée ennemie? Ce vieillard qui semble donner
des ordres, tandis qu’un combattant mortellement frappé tombe aux pieds
de son cheval, est-ce le général qui commande la bataille, ou le poëte
inspiré qui préside à la musique guerrière? Peut-être l’un et l’autre à la
fois, car dans l’âge héroïque ils ne faisaient qu’un. La poésie et la musique
sont bien loin des calculs savants de la stratégie, mais on les trouve tou-
jours là où des cœurs généreux battent pour la patrie.

L’ensemble de la composition est plein de feu et d’animation. 11 y a
une vie singulière dans ce dessin animé et nerveux qui rappelle l’école
florentine et nous laisse également loin des froideurs académiques et des
vulgarités contemporaines. Mais comment pourrais-je avec ma plume
décrire une scène où le peintre a mis toutes les passions viriles de l’anti-
quité? Cependant, si les arts peuvent s’élever à cette hauteur, il ne faut
pas médire des lettres, et je ne peux accuser ici que mon impuissance
personnelle. La preuve, c’est que pour donner une idée exacte du tableau
de M. Baudry, je n’ai qu’à transcrire un des rares fragments qui nous
sont restés du poëte Tyrtée :

« Que chaque guerrier tienne son bouclier dressé contre les assaillants ;
qu’il abjure l’amour de la vie et chérisse les sentiers de la mort autant
que les rayons du soleil. Mars fait verser beaucoup de larmes, mais aussi
quelle gloire il distribue! Ceux qui osent, serrés les uns contre les autres,
marcher d’un pas ferme devant les rangs ennemis, meurent en petit
nombre et sauvent les soldats qui les suivent. Les guerriers timides
perdent courage, et on ne saurait dire quels maux sont réservés au lâche.
C’est une honte cruelle d’être frappé par derrière en fuyant l’ennemi;
c’est une honte cruelle qu’un cadavre gisant dans la poussière et présen-
tant sur le dos une sanglante blessure ! Mais qu’il est beau l’homme qui,
un pied en avant, se tient ferme à la terre, mord ses lèvres avec ses dents,
brandit de la main droite sa forte lance et agite sur sa tête son aigrette
redoutable. Apprends à combattre vaillamment; ne va pas, à l’ombre
d’un bouclier, te tenir loin delà portée des traits; élance-toi plutôt, armé
de la longue pique et du glaive, frappe au premier rang, empare-toi d’un
ennemi. Pied contre pied, bouclier contre bouclier, aigrette contre
aigrette, casque contre casque, poitrine contre poitrine, lutte avec ton
ennemi, saisis le pommeau de son glaive ou le bout de sa lance. »

RENÉ MÉNARD.

(La mite prochainement.)
 
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