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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 15.1877

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Nr. 6
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Duranty, Edmond: Réflexions d'un bourgeois sur le Salon de Peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.21844#0568

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

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baraques foraines. Ils n’étaient point marchands! Aussi T ont-ils bien
vu : on ne leur a jamais rien acheté en France. C’est l’Angleterre qui
les a accueillis et une partie d’entre eux, Legros en tête, a été obligée
de s’expatrier. Quant à ceux qui sont restés ici, c’est toujours Londres
qui seul a ouvert quelques galeries à leurs tableaux. Paris leur est fermé.
Et cependant plusieurs de ces artistes sont et seront eux aussi l’honneur
de l’art français dans la période actuelle. Pour gagner l’estime qu’ils
méritent, il leur a manqué de ne pas être originaux. Si au lieu de renou-
veler la tradition, si au lieu d’appliquer à l’âge moderne les grandeurs
de l’ancien style, mais en en changeant les aspects et les formules, ils
avaient exécuté de simples pastiches, ou si, tapant à grand bruit sur le
chaudron à couleurs, plein de vermillon, de laques, de jaunes, de toutes
les colorations détonantes, ils avaient, à coups de cuiller, éclaboussé de
longues métrées de toile avec des taches tumultueuses et criardes, on
les criblerait d’applaudissements.

Les esprits qui suivent attentivement la marche de l’art moderne,
connaissent, il est vrai, MM. Legros, Fantin-Latour, Lhermitte, et ceux qui
les accompagnent. Mais où est l’écho, au-delà de ce cercle? Après vingt
ans de travaux, MM. Legros et Fantin ont-ils la situation importante qui
leur est due? Personne ne s’est douté, l’an dernier, que le Souvenir ci
Berlioz de M. Fantin, sortait des mains d’un coloriste de la plus rare
valeur. Au Luxembourg, un tableau de M. Legros est relégué sous la
corniche. On en a honte, et c’est tout ! L’artiste, il est vrai, en est
quitte pour se venger en se rappelant à notre « bon souvenir » par
l’envoi d’un chef-d’œuvre comme le Portrait du cardinal Manning, à la
pointe sèche et de grandeur naturelle, qu’on voit à la vitrine de quelques
marchands d’estampes. Notre pays est fâcheux pour l’art, avec ses petits
goûts de propreté, d’ajustage minutieux, de brillante fadeur, ou ses fai-
blesses pour le bruyant, la mise en scène, l’extravagant, le tour de main,
le truqué et le tripoté à outrance. Nul endroit n’était meilleur pour dire
ces choses, que ce recueil important et écouté, où l’on aime, où l’on
célèbre à si juste titre l’art sérieux et élevé. Après avoir fait, le matin,
notre prière devant Léonard de Vinci, sachons retrouver, l’après-midi,
parmi nos contemporains, ceux qui ont gardé, non pas la lettre, mais
l’esprit de l’ancien art.

C’est pourquoi nous parlerons un peu de M. Fantin-Latour. Le succès
qu il obtient enfin nous servira d’excuse pour la liberté grande.

Lu général, une composition historique ou philosophique est consi-
déice comme le résultat d’un grand effort, comme un hommage rendu
aux juges, puisqu’on soumet un travail considérable à leur méditation et
 
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