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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 18.1878

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Nr. 4
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Fillon, Benjamin: L' art romain et ses dégénérescences au Trocadéro: exposition universelle
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https://doi.org/10.11588/diglit.22838#0506

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L’ART ROMAIN ET SES DÉGÉNÉRESCENCES.

487

II

« Excudent alii spirantia mollius æra,

Credo equidem; vivos ducen-t de marmore vultus ;

Tu, regere imperio populos, Romane, memento;

Hæ tibi erunt artes, pacisque imponere morem,

Parcere subjectis et debellare superbos 1, »

a dit Virgile, caractérisant ainsi, d’un trait, l’action sociale, dans le monde,
du génie latin, plus porté par sa nature aux réalités pratiques qu’aux
aspirations d’ordre supérieur. Chez les Romains, l’art ne fut, à de rares
exceptions près, qu’un auxiliaire de la politique. Tant que les vieilles
mœurs républicaines furent en faveur, il se borna à reproduire les
images hiératiques des divinités protectrices de la cité ou du foyer
domestique et celles de certains héros légendaires. Issu des arts étrusque
et gréco-italien, pratiqué par des adeptes directs de ces écoles, il en
retint les caractères originels, accentués davantage encore par une plus
grande austérité dans les formes. Survint la conquête de la Grèce, et
Rome fut inondée de dépouilles opimes, quelle affecta d’abord de traiter
avec un dédain superbe, où il entrait beaucoup de celui du vainqueur
pour le vaincu. Mais, si rebelle qu’il fût aux beautés de la sculpture et de
la peinture, ce vainqueur ne tarda pas à rechercher leurs œuvres avec
un soin jaloux, afin d’en parer les édifices publics et sa propre demeure.
Le forum, encombré, à la suite de nouvelles victoires, des plus belles et
des plus rares productions du monde entier, ressembla bientôt à un
marché immense, au travers duquel circulaient sénateurs, chevaliers,
plébéiens, plus remplis d’étonnement qu’ils ne voulaient le laisser
paraître.

Ce contact journalier avec tant de merveilles artistiques eut son
résultat naturel : Rome se sentit peu à peu envahie par un besoin de
luxe et de raffinement quelle avait d’abord repoussé. Avec son sens
pratique ordinaire, elle comprit bien vite quel prestige ajoute l’art à la
grandeur d’un peuple. Elle n’en conserva pas moins, longtemps encore,
un mépris instinctif pour les auteurs des chefs-d’œuvre dont elle entre-
voyait plus futilité civilisatrice que la beauté réelle, beaucoup, et des
plus habiles, continuèrent d’être des artisans esclaves, d’origine 4

4. jEnéide, vi, 848-54.
 
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