Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

DOI Heft:
Nr. 4
DOI Artikel:
Baignères, Arthur: Sociéte des Aquarellistes français, 2ième exposition
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0379
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
362

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

après avoir légèrement tourné le dos, il bat des mains aujourd’hui. On
retrouve les sociétaires à leur poste, en groupe compact, formant un
ensemble merveilleux de talents hors ligne et de tableaux exquis. Dans ce
monde de choix, on est fort embarrassé : par qui commencer? Comme
une maîtresse de maison qui réunit de grands personnages, on ne sait à
qui donner le pas. En pareil embarras, le mieux est de s’en remettre au
hasard, c’est encore le moyen de ne froisser personne.

Est-ce le hasard seul qui me conduit vers M. Jacquemart? et, en par-
lant de lui d’abord, est-ce que je ne cède pas à un secret penchant? Je
ne veux point m’en rendre compte, mais je crois que tout le monde fait
comme moi et court [tout de suite au pays du soleil. Avec M. Jacque-
mart le voyage est plus expéditif et plus économique qu’avec les entre-
prises Cook, Lubin et autres. On peut, grâce à lui, visiter la Corniche
en un quart d’heure, et le voyage aller et retour coûte un franc. Quel
dommage de n’avoir pas joui de ses aquarelles au mois de décembre
lorsque tout était couvert de neige! Nous nous serions réjoui les yeux,
et, qui sait? nous aurions eu moins froid. C’eût été un chauffoir comme
un autre, et l’imagination dégage autant de calorique que le charbon de
terre. Voilà Menton, le val de Gorbio, de Castagnier, tous les pays du
soleil ! puis les ports de Marseille, de Gènes, autant de merveilles ! 11
suffit de regarder les quelques centimètres carrés de papier que M. Jac-
quemart a mouillés avec son pinceau pour voir l’immense nature. On est
tout d’abord frappé par la lumière répandue, par l’éclat de la pure
atmosphère ; puis, si l’on cherche les détails, tout vit, tout se meut, tout
brille. Je voudrais choisir et ne le puis. Est-ce la route de Monte-Carlo?
est-ce la montagne de Sainte-Agnès avec son sommet brillant et ses
ombres couleur d’améthyste? Oh! le grand poète que M. Jacquemart,
et comme il a raison de si bien voir et de si bien exprimer ce qu’il voit !
Mâts de bateaux, coques de navires, quais trempés d’eau, murs brûlés par
le soleil, cieux brillants; tout cela, c’est la nature. Elle est devant nous
entre les quatre bordures de bois doré qui l’encadrent sur le frêle mor-
ceau de papier. N’est-ce pas dans les Mille et une Nuits qu’on voit sortir
d’un vase une fumée qui, en se condensant, devient un géant immense,
et qui — prodige étrange — est contenu dans l’étroite enveloppe? Je
pense toujours à ce conte, quand je vois ce que M. Jacquemart sait ren-
fermer en un pareil espace. N’ai-je pas la belle impression du port de
Gênes? ne vois-je pas la route de Menton? et, ce vallon vert, est-ce que
je ne m’y promene pas? La disproportion n’existe plus; je le répète, la
nature est là en face de nous ; nous pouvons l’admirer et, si nous
l’aimons, nous livrer à tous les rêves et à tous les enchantements qu’elle
 
Annotationen