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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 25.1882

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Nr. 3
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Müntz, Eugène: Une rivalite d'artistes au XVIe siècle, [1]: Michel-Ange et Raphael à la cour de Rome
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https://doi.org/10.11588/diglit.24257#0308

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282

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

de fond en comble1. C’était la ruine des espérances de Michel-Ange ; dès
lors commença pour lui ce qu’il appelle la tragédie, la longue tragédie
du tombeau papal.

Personne n’avait l’humeur moins endurante qne le peintre-sculpteur
florentin. Il était donc tout naturel qu’il en voulût à Bramante d’avoir fait
avorter un projet si bien mûri, et qu’il traduisît ses rancunes avec cette
indépendance dont il avait déjà donné tant de preuves. Les bons mots, ou
plutôt les impertinences de Michel-Ange sont célèbres : ils lui ont valu
ses innombrables ennemis. Dès l’école, il avait habitude de siffler (Vasari
dit « uccellare ») ses camarades: une raillerie de ce genre lui attira le
formidable coup de poing de Torreggiano. On connaît sa sortie contre le
Pêrugin, qu’il traita publiquement de « ganache. » Il se montra tout
aussi irrévérencieux vis-à-vis du grand Léonard. Celui-ci passant un jour
devant le banc des Spini, plusieurs citoyens occupés à discuter sur l’inter-
prétation d’un passage de Dante l’appelèrent pour lui demander son avis;
ils appelèrent également Michel-Ange, qui vint à passer en même temps.
Léonard, soit qu’il fût embarrassé, soit qu’il voulût faire une politesse à
son rival, répondit que Michel-Ange leur expliquerait le passage. Mais
Michel-Ange, croyant qu’il voulait se moquer de lui, s’écria tout en co-
lère : « Explique-le toi-même, toi qui as fait le dessin d’un cheval pour le
couler en bronze et qui, ne pouvant le fondre, l’as honteusement aban-
donné. » Léonard devint tout rouge à ces mots, et Michel-Ange, pour le
piquer encore davantage, ajouta : « Et qui t’étais fié à ces Capons de
Milanais2. » Mais il n’était même pas nécessaire qu'il fût provoqué pour
lancer des sarcasmes. Rencontrant un jour à Bologne le fils du brave Fran-
cia: « Ton père, lui dit-il, s’entend mieux à faire les figures vivantes que
les figures peintes ». On n’en finirait pas si l’on voulait rapporter toutes
ses boutades.

Il est probable que quelque sortie de ce genre l’aura brouillé avec Bra-
mante. Celui-ci, qui n’était pas moins vif et caustique, quoique d’un carac-
tère plus gai, ne tarda pas à lui rendre la pareille. La guerre était dé-
clarée.

Dans les confidences faites à Condivi, Michel-Ange explique d’une ma-
nière différente l’origine de la querelle. D’après lui, Bramante ne pouvait
lui pardonner d’avoir mis à nu les défauts de ses constructions : il crai-

1. Telle est la version de Condivi ( Vi.ta di Michel-Angelo), adoptée par le juge le
plus autorisé, M. de Geymüller, dans ses Projets primitifs pour la reconstruction de
Saint-Pierre de Rome.

2. Gotti, t. U, p. 48. Voyez aussi la biographie de Michel-Ange par M. de Montai-
glon : Gazette des Beaux-Arts, 1876, t. 1er, p. 249.
 
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