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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 34.1886

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Nr. 3
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Durand-Gréville, Émile: L' art aux États-Unis: correspondance d'Amérique
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https://doi.org/10.11588/diglit.19428#0269

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250

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

d’arabesques et de figures décoratives à plusieurs teintes, d’un ton amorti. Cette
ornementation n’est pas livrée aux soins d’un décorateur vulgaire : faite par l’artiste
lui-même, elle est souvent d’un très heureux effet.

Ce que nous venons de dire se rapporte, notamment, à un très beau volume
paru l’hiver dernier que nous avons rencontré sur la table de M. Gilder, rédacteur
du Century. C’est un poème de Keats, Lamia (la Lamie), illustré par M. William
Low. L’idée première de ce poème se trouve dans la Vie cl’Apollonius de Ttjane,
de Philostrate. Une lamie obtient d’Hermès la permission de quitter sa forme de
serpent pour prendre celle d’une femme. Après sa métamorphose, elle rencontre
Apollonius et le séduit au point de lui faire oublier ses amis et ses études. Elle
l’emmène dans son palais enchanté et obtient de lui le mariage; mais c’est ce qui
la perd : Apollonius ayant invité à la cérémonie ses anciens amis, son vieux
maître de philosophie vient comme les autres et démasque la vraie origine de la
lamie. Celle-ci s’évanouit en fumée ainsi que son palais.

Le fond du poème importe peu; mais la forme en est exquise, et le sujet offrait
à l’artiste une foule de scènes antiques dont il a tiré un excellent parti. M. Low a
étudié sept ou huit ans dans les ateliers de Paris, et, soit dit sans chauvinisme,
cela se voit. Il dessine élégamment, compose avec goût, et sait faire frissonner
les plis du costume antique sur un joli corps de femme. Au point de vue de la
lumière et de l’harmonie des valeurs, ses compositions sont d’un effet blond et
piquant. Voilà bien des qualités diverses. Le jour où il aura encore un peu simplifié
sa manière, il sera un maître, et nous croyons que cela ne tardera guère.

M. Low est un jeune, — trente-trois ans tout au plus. M. Vedder touche à la
cinquantaine. Il est, dit-on, l’auteur d’un bon nombre de tableaux quelquefois
remarquables au point de vue de la conception. Nous ne connaissons de lui qu’un
volume de luxe dont les cinquante planches servent d’illustrations aux quatrains
persans d’Omar Khayam (The Rubayat of Omar Khayam), traduits en anglais
par M. Fitzgerald; cela suffit pour donner une idée juste de son talent un peu
lourd, un peu philosophique — on dirait que Chenavard a passé par là, — mais
aussi de sa fertilité d’imagination. Beaucoup de peintres anglais plus connus sont
loin de le valoir.

Nous n’avons pas eu l’occasion de voir beaucoup d’expositions d’artistes
américains. Il faut pourtant citer à Boston une nouvelle société d’aquarellistes,
composée de treize membres, parmi lesquels MM. Triscott, Praser et surtout Childe
Hassam promettent d’avoir un réel talent, s’ils échappent aux terribles dangers
de l’habileté de main. Au cercle Century, de New-York, nous avons remarqué un
bon portrait fait par M. Butler, un artiste qui a perdu le bras droit pendant la
guerre de la Sécession; mais cela ne l’a pas beaucoup gêné pour continuer à
peindre, car il était gaucher. A citer encore, au même club, des portraits et des
fleurs de M. Alden Weir, élève des écoles de Paris et habitué de nos expositions.
Nous avons retrouvé ici sa Tête d’orpheline, oeuvre peu tapageuse, perdue jadis
dans le brouhaha de nos Salons, mais que nous y avions remarquée à cause de
ses qualités de dessin juste, de modelé délicat, de couleur simple et harmonieuse.
M. Weir, qui est encore jeune, a-t-il produit souvent des œuvres de cette valeur?
Nous le souhaitons vivement pour lui.

La veille même de notre départ de New-York, on faisait un grand remue-
ménage au Musée métropolitain. Une centaine de toiles, sinon davantage, œuvres
 
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